Messagede lâombudsman. Câest avec plaisir que je publie le rapport Indemnisation juste de la douleur et de la souffrance pour les vĂ©tĂ©rans et leurs survivants, qui Ă©value lâĂ©quitĂ© de lâindemnisation offerte pour des pertes non financiĂšres en vertu de la Nouvelle Charte des anciens combattants 1 (NCAC).Zola Germinal PREMIERE PARTIE I, I Dans la plaine rase, sous la nuit sans Ă©toiles, d'une obscuritĂ© et d'une Ă©paisseur d'encre, un homme suivait seul la grande route de Marchiennes Ă Montsou, dix kilomĂštres de pavĂ© coupant tout droit, Ă travers les champs de betteraves. Devant lui, il ne voyait mĂÂȘme pas le sol noir, et il n'avait la sensation de l'immense horizon plat que par les souffles du vent de mars, des rafales larges comme sur une mer, glacĂ©es d'avoir balayĂ© des lieues de marais et de terres nues. Aucune ombre d'arbre ne tachait le ciel, le pavĂ© se dĂ©roulait avec la rectitude d'une jetĂ©e, au milieu de l'embrun aveuglant des tĂ©nĂšbres. L'homme Ă©tait parti de Marchiennes vers deux heures. Il marchait d'un pas allongĂ©, grelottant sous le coton aminci de sa veste et de son pantalon de velours. Un petit paquet, nouĂ© dans un mouchoir Ă carreaux, le gĂÂȘnait beaucoup; et il le serrait contre ses flancs, tantĂÂŽt d'un coude, tantĂÂŽt de l'autre, pour glisser au fond de ses poches les deux mains Ă la fois, des mains gourdes que les laniĂšres du vent d'est faisaient saigner. Une seule idĂ©e occupait sa tĂÂȘte vide d'ouvrier sans travail et sans gĂte, l'espoir que le froid serait moins vif aprĂšs le lever du jour. Depuis une heure, il avançait ainsi, lorsque sur la gauche Ă deux kilomĂštres de Montsou, il aperçut des feux rouges, trois brasiers brĂ»lant au plein air, et comme suspendus. D'abord, il hĂ©sita, pris de crainte; puis, il ne put rĂ©sister au besoin douloureux de se chauffer un instant les mains. Un chemin creux s'enfonçait. Tout disparut. L'homme avait Ă droite une palissade, quelque mur de grosses planches fermant une voie ferrĂ©e; tandis qu'un talus d'herbe s'Ă©levait Ă gauche, surmontĂ© de pignons confus, d'une vision de village aux toitures basses et uniformes. Il fit environ deux cents pas. Brusquement, Ă un coude du chemin, les feux reparurent prĂšs de lui, sans qu'il comprĂt davantage comment ils brĂ»laient si haut dans le ciel mort, pareils Ă des lunes fumeuses. Mais, au ras du sol, un autre spectacle venait de l'arrĂÂȘter. C'Ă©tait une masse lourde, un tas Ă©crasĂ© de constructions, d'oĂÂč se dressait la silhouette d'une cheminĂ©e d'usine; de rares lueurs sortaient des fenĂÂȘtres encrassĂ©es, cinq ou six lanternes tristes Ă©taient pendues dehors, Ă des charpentes dont les bois noircis alignaient vaguement des profils de trĂ©teaux gigantesques; et, de cette apparition fantastique, noyĂ©e de nuit et de fumĂ©e, une seule voix montait, la respiration grosse et longue d'un Ă©chappement de vapeur, qu'on ne voyait point. Alors, l'homme reconnut une fosse. Il fut repris de honte Ă quoi bon? il n'y aurait pas de travail. Au lieu de se diriger vers les bĂÂątiments, il se risqua enfin Ă gravir le terri sur lequel brĂ»laient les trois feux de houille, dans des corbeilles de fonte, pour Ă©clairer et rĂ©chauffer la besogne. Les ouvriers de la coupe Ă terre avaient dĂ» travailler tard, on sortait encore les dĂ©bris inutiles. Maintenant, il entendait les moulineurs pousser les trains sur les trĂ©teaux, il distinguait des ombres vivantes culbutant les berlines, prĂšs de chaque feu. - Bonjour, dit-il en s'approchant d'une des corbeilles. Tournant le dos au brasier, le charretier Ă©tait debout, un vieillard vĂÂȘtu d'un tricot de laine violette, coiffĂ© d'une casquette en poil de lapin; pendant que son cheval, un gros cheval jaune, attendait, dans une immobilitĂ© de pierre, qu'on eĂ»t vidĂ© les six berlines montĂ©es par lui. Le manoeuvre employĂ© au culbuteur, un gaillard roux et efflanquĂ©, ne se pressait guĂšre, pesait sur le levier d'une main endormie. Et, lĂ -haut, le vent redoublait, une bise glaciale, dont les grandes haleines rĂ©guliĂšres passaient comme des coups de faux. - Bonjour, rĂ©pondit le vieux. Un silence se fit. L'homme, qui se sentait regardĂ© d'un oeil mĂ©fiant, dit son nom tout de suite. - Je me nomme Etienne Lantier, je suis machineur... Il n'y a pas de travail ici? Les flammes l'Ă©clairaient, il devait avoir vingt et un ans, trĂšs brun, joli homme, l'air fort malgrĂ© ses membres menus. RassurĂ©, le charretier hochait la tĂÂȘte. - Du travail pour un machineur, non, non... Il s'en est encore prĂ©sentĂ© deux hier. Il n'y a rien. Une rafale leur coupa la parole. Puis, Etienne demanda, en montrant le tas sombre des constructions, au pied du terri - C'est une fosse, n'est-ce pas? Le vieux, cette fois, ne put rĂ©pondre. Un violent accĂšs de toux l'Ă©tranglait. Enfin, il cracha, et son crachat, sur le sol empourprĂ©, laissa une tache noire. - Oui, une fosse, le Voreux... Tenez! le coron est tout prĂšs. A son tour, de son bras tendu, il dĂ©signait dans la nuit le village dont le jeune homme avait devinĂ© les toitures. Mais les six berlines Ă©taient vides, il les suivit sans un claquement de fouet, les jambes raidies par des rhumatismes; tandis que le gros cheval jaune repartait tout seul, tirait pesamment entre les rails, sous une nouvelle bourrasque, qui lui hĂ©rissait le poil. Le Voreux, Ă prĂ©sent, sortait du rĂÂȘve. Etienne, qui s'oubliait devant le brasier Ă chauffer ses pauvres mains saignantes, regardait, retrouvait chaque partie de la fosse, le hangar goudronnĂ© du criblage, le beffroi du puits, la vaste chambre de la machine d'extraction, la tourelle carrĂ©e de la pompe d'Ă©puisement. Cette fosse, tassĂ©e au fond d'un creux, avec ses constructions trapues de briques, dressant sa cheminĂ©e comme une corne menaçante, lui semblait avoir un air mauvais de bĂÂȘte goulue, accroupie lĂ pour manger le monde. Tout en l'examinant, il songeait Ă lui, Ă son existence de vagabond, depuis huit jours qu'il cherchait une place; il se revoyait dans son atelier du chemin de fer, giflant son chef, chassĂ© de Lille, chassĂ© de partout; le samedi, il Ă©tait arrivĂ© Ă Marchiennes, oĂÂč l'on disait qu'il y avait du travail, aux Forges; et rien, ni aux Forges, ni chez Sonneville, il avait dĂ» passer le dimanche cachĂ© sous les bois d'un chantier de charronnage, dont le surveillant venait de l'expulser, Ă deux heures de la nuit. Rien, plus un sou, pas mĂÂȘme une croĂ»te qu'allait-il faire ainsi par les chemins, sans but, ne sachant seulement oĂÂč s'abriter contre la bise? Oui, c'Ă©tait bien une fosse, les rares lanternes Ă©clairaient le carreau, une porte brusquement ouverte lui avait permis d'entrevoir les foyers des gĂ©nĂ©rateurs, dans une clartĂ© vive. Il s'expliquait jusqu'Ă l'Ă©chappement de la pompe, cette respiration grosse et longue, soufflant sans relĂÂąche, qui Ă©tait comme l'haleine engorgĂ©e du monstre. Le manoeuvre du culbuteur, gonflant le dos, n'avait pas mĂÂȘme levĂ© les yeux sur Etienne, et celui-ci allait ramasser son petit paquet tombĂ© Ă terre, lorsqu'un accĂšs de toux annonça le retour du charretier. Lentement, on le vit sortir de l'ombre, suivi du cheval jaune, qui montait six nouvelles berlines pleines. - Il y a des fabriques Ă Montsou? demanda le jeune homme. Le vieux cracha noir, puis rĂ©pondit dans le vent - Oh! ce ne sont pas les fabriques qui manquent. Fallait voir ça, il y a trois ou quatre ans! Tout ronflait, on ne pouvait trouver des hommes, jamais on n'avait tant gagnĂ©... Et voilĂ qu'on se remet Ă se serrer le ventre. Une vraie pitiĂ© dans le pays, on renvoie le monde, les ateliers ferment les uns aprĂšs les autres... Ce n'est peut-ĂÂȘtre pas la faute de l'empereur; mais pourquoi va-t-il se battre en AmĂ©rique? Sans compter que les bĂÂȘtes meurent du cholĂ©ra, comme les gens. Alors, en courtes phrases, l'haleine coupĂ©e, tous deux continuĂšrent Ă se plaindre. Etienne racontait ses courses inutiles depuis une semaine; il fallait donc crever de faim? BientĂÂŽt les routes seraient pleines de mendiants. Oui, disait le vieillard, ça finirait par mal tourner, car il n'Ă©tait pas Dieu permis de jeter tant de chrĂ©tiens Ă la rue. - On n'a pas de la viande tous les jours. - Encore si l'on avait du pain! - C'est vrai, si l'on avait du pain seulement! Leurs voix se perdaient, des bourrasques emportaient les mots dans un hurlement mĂ©lancolique. - Tenez! reprit trĂšs haut le charretier en se tournant vers le midi, Montsou est lĂ ... Et, de sa main tendue de nouveau, il dĂ©signa dans les tĂ©nĂšbres des points invisibles, Ă mesure qu'il les nommait. LĂ -bas, Ă Montsou, la sucrerie Fauvelle marchait encore, mais la sucrerie Hoton venait de rĂ©duire son personnel, il n'y avait guĂšre que la minoterie Dutilleul et la corderie Bleuze pour les cĂÂąbles de mine, qui tinssent le coup. Puis, d'un geste large, il indiqua, au nord, toute une moitiĂ© de l'horizon les ateliers de construction Sonneville n'avaient pas reçu les deux tiers de leurs commandes habituelles; sur les trois hauts fourneaux des Forges de Marchiennes, deux seulement Ă©taient allumĂ©s; enfin, Ă la verrerie Gagebois, une grĂšve menaçait, car on parlait d'une rĂ©duction de salaire. - Je sais, je sais, rĂ©pĂ©tait le jeune homme Ă chaque indication. J'en viens. - Nous autres, ça va jusqu'Ă prĂ©sent, ajouta le charretier. Les fosses ont pourtant diminuĂ© leur extraction. Et regardez, en face, Ă la Victoire, il n'y a aussi que deux batteries de fours Ă coke qui flambent. Il cracha, il repartit derriĂšre son cheval somnolent, aprĂšs l'avoir attelĂ© aux berlines vides. Maintenant, Etienne dominait le pays entier. Les tĂ©nĂšbres demeuraient profondes, mais la main du vieillard les avait comme emplies de grandes misĂšres, que le jeune homme, inconsciemment, sentait Ă cette heure autour de lui, partout, dans l'Ă©tendue sans bornes. N'Ă©tait-ce pas un cri de famine que roulait le vent de mars, au travers de cette campagne nue? Les rafales s'Ă©taient enragĂ©es, elles semblaient apporter la mort du travail, une disette qui tuerait beaucoup d'hommes. Et, les yeux errants, il s'efforçait de percer les ombres, tourmentĂ© du dĂ©sir et de la peur de voir. Tout s'anĂ©antissait au fond de l'inconnu des nuits obscures, il n'apercevait, trĂšs loin, que les hauts fourneaux et les fours Ă coke. Ceux-ci, des batteries de cent cheminĂ©es, plantĂ©es obliquement, alignaient des rampes de flammes rouges; tandis que les deux tours, plus Ă gauche, brĂ»laient toutes bleues en plein ciel, comme des torches gĂ©antes. C'Ă©tait d'une tristesse d'incendie, il n'y avait d'autres levers d'astres, Ă l'horizon menaçant, que ces feux nocturnes des pays de la houille et du fer. - Vous ĂÂȘtes peut-ĂÂȘtre de la Belgique? reprit derriĂšre Etienne le charretier, qui Ă©tait revenu. Cette fois, il n'amenait que trois berlines. On pouvait toujours culbuter celles-lĂ un accident arrivĂ© Ă la cage d'extraction, un Ă©crou cassĂ©, allait arrĂÂȘter le travail pendant un grand quart d'heure. En bas du terri, un silence s'Ă©tait fait, les moulineurs n'Ă©branlaient plus les trĂ©teaux d'un roulement prolongĂ©. On entendait seulement sortir de la fosse le bruit lointain d'un marteau, tapant sur de la tĂÂŽle. - Non, je suis du Midi, rĂ©pondit le jeune homme. Le manoeuvre, aprĂšs avoir vidĂ© les berlines, s'Ă©tait assis Ă terre, heureux de l'accident; et il gardait sa sauvagerie muette, il avait simplement levĂ© de gros yeux Ă©teints sur le charretier, comme gĂÂȘnĂ© par tant de paroles. Ce dernier, en effet, n'en disait pas si long d'habitude. Il fallait que le visage de l'inconnu lui convĂnt et qu'il fĂ»t pris d'une de ces dĂ©mangeaisons de confidences, qui font parfois causer les vieilles gens tout seuls, Ă haute voix. - Moi, dit-il, je suis de Montsou, je m'appelle Bonnemort. - C'est un surnom? demanda Etienne Ă©tonnĂ©. Le vieux eut un ricanement d'aise, et montrant le Voreux - Oui, oui... On m'a retirĂ© trois fois de lĂ -dedans en morceaux, une fois avec tout le poil roussi, une autre avec de la terre jusque dans le gĂ©sier, la troisiĂšme avec le ventre gonflĂ© d'eau comme une grenouille... Alors, quand ils ont vu que je ne voulais pas crever, ils m'ont appelĂ© Bonnemort, pour rire. Sa gaietĂ© redoubla, un grincement de poulie mal graissĂ©e, qui finit par dĂ©gĂ©nĂ©rer en un accĂšs terrible de toux. La corbeille de feu, maintenant, Ă©clairait en plein sa grosse tĂÂȘte, aux cheveux blancs et rares, Ă la face plate, d'une pĂÂąleur livide, maculĂ©e de taches bleuĂÂątres. Il Ă©tait petit, le cou Ă©norme, les mollets et les talons en dehors, avec de longs bras dont les mains carrĂ©es tombaient Ă ses genoux. Du reste, comme son cheval qui demeurait immobile sur les pieds, sans paraĂtre souffrir du vent, il semblait en pierre, il n'avait l'air de se douter ni du froid ni des bourrasques sifflant Ă ses oreilles. Quand il eut toussĂ©, la gorge arrachĂ©e par un raclement profond, il cracha au pied de la corbeille, et la terre noircit. Etienne le regardait, regardait le sol qu'il tachait de la sorte. - Il y a longtemps, reprit-il, que vous travaillez Ă la mine? Bonnemort ouvrit tout grands les deux bras. - Longtemps, ah! oui!... Je n'avais pas huit ans, lorsque je suis descendu, tenez! juste dans le Voreux, et j'en ai cinquante-huit, Ă cette heure. Calculez un peu... J'ai tout fait lĂ -dedans, galibot d'abord, puis herscheur, quand j'ai eu la force de rouler, puis haveur pendant dix-huit ans. Ensuite, Ă cause de mes sacrĂ©es jambes, ils m'ont mis de la coupe Ă terre, remblayeur, raccommodeur, jusqu'au moment oĂÂč il leur a fallu me sortir du fond, parce que le mĂ©decin disait que j'allais y rester. Alors, il y a cinq annĂ©es de cela, ils m'ont fait charretier... Hein? c'est joli, cinquante ans de mine, dont quarante-cinq au fond! Tandis qu'il parlait, des morceaux de houille enflammĂ©s, qui, par moments, tombaient de la corbeille, allumaient sa face blĂÂȘme d'un reflet sanglant. - Ils me disent de me reposer, continua-t-il. Moi, je ne veux pas, ils me croient trop bĂÂȘte!... J'irai bien deux annĂ©es, jusqu'Ă ma soixantaine, pour avoir la pension de cent quatre-vingts francs. Si je leur souhaitais le bonsoir aujourd'hui, ils m'accorderaient tout de suite celle de cent cinquante. Ils sont malins, les bougres!... D'ailleurs, je suis solide, Ă part les jambes. C'est, voyez-vous, l'eau qui m'est entrĂ©e sous la peau, Ă force d'ĂÂȘtre arrosĂ© dans les tailles. Il y a des jours oĂÂč je ne peux pas remuer une patte sans crier. Une crise de toux l'interrompit encore. - Et ça vous fait tousser aussi? dit Etienne. Mais il rĂ©pondit non de la tĂÂȘte, violemment. Puis, quand il put parler - Non, non, je me suis enrhumĂ©, l'autre mois. Jamais je ne toussais, Ă prĂ©sent je ne peux plus me dĂ©barrasser... Et le drĂÂŽle, c'est que je crache, c'est que je crache... Un raclement monta de sa gorge, il cracha noir. - Est-ce que c'est du sang? demanda Etienne, osant enfin le questionner. Lentement, Bonnemort s'essuyait la bouche d'un revers de main. - C'est du charbon... J'en ai dans la carcasse de quoi me chauffer jusqu'Ă la fin de mes jours. Et voilĂ cinq ans que je ne remets pas les pieds au fond. J'avais ça en magasin, paraĂt-il, sans mĂÂȘme m'en douter. Bah! ça conserve! Il y eut un silence, le marteau lointain battait Ă coups rĂ©guliers dans la fosse, le vent passait avec sa plainte, comme un cri de faim et de lassitude venu des profondeurs de la nuit. Devant les flammes qui s'effaraient, le vieux continuait plus bas, remĂÂąchant des souvenirs. Ah! bien sĂ»r, ce n'Ă©tait pas d'hier que lui et les siens tapaient Ă la veine! La famille travaillait pour la Compagnie des mines de Montsou, depuis la crĂ©ation; et cela datait de loin, il y avait dĂ©jĂ cent six ans. Son aĂÂŻeul, Guillaume Maheu, un gamin de quinze ans alors, avait trouvĂ© le charbon gras Ă RĂ©quillart, la premiĂšre fosse de la Compagnie, une vieille fosse aujourd'hui abandonnĂ©e, lĂ -bas, prĂšs de la sucrerie Fauvelle. Tout le pays le savait, Ă preuve que la veine dĂ©couverte s'appelait la veine Guillaume, du prĂ©nom de son grand-pĂšre. Il ne l'avait pas connu, un gros Ă ce qu'on racontait, trĂšs fort, mort de vieillesse Ă soixante ans. Puis, son pĂšre, Nicolas Maheu dit le Rouge, ĂÂągĂ© de quarante ans Ă peine, Ă©tait restĂ© dans le Voreux, que l'on fonçait en ce temps-lĂ un Ă©boulement, un aplatissement complet, le sang bu et les os avalĂ©s par les roches. Deux de ses oncles et ses trois frĂšres, plus tard, y avaient aussi laissĂ© leur peau. Lui, Vincent Maheu, qui en Ă©tait sorti Ă peu prĂšs entier, les jambes mal d'aplomb seulement, passait pour un malin. Quoi faire, d'ailleurs? Il fallait travailler. On faisait ça de pĂšre en fils, comme on aurait fait autre chose. Son fils, Toussaint Maheu, y crevait maintenant, et ses petits-fils, et tout son monde, qui logeait en face, dans le coron. Cent six ans d'abattage, les mioches aprĂšs les vieux, pour le mĂÂȘme patron hein? beaucoup de bourgeois n'auraient pas su dire si bien leur histoire! - Encore, lorsqu'on mange! murmura de nouveau Etienne. - C'est ce que je dis, tant qu'on a du pain Ă manger, on peut vivre. Bonnemort se tut, les yeux tournĂ©s vers le coron, oĂÂč des lueurs s'allumaient une Ă une. Quatre heures sonnaient au clocher de Montsou, le froid devenait plus vif. - Et elle est riche, votre Compagnie? reprit Etienne. Le vieux haussa les Ă©paules, puis les laissa retomber, comme accablĂ© sous un Ă©croulement d'Ă©cus. - Ah! oui, ah! oui... Pas aussi riche peut-ĂÂȘtre que sa voisine, la Compagnie d'Anzin. Mais des millions et des millions tout de mĂÂȘme. On ne compte plus... Dix-neuf fosses, dont treize pour l'exploitation, le Voreux, la Victoire, CrĂšvecoeur, Mirou, Saint-Thomas, Madeleine, Feutry-Cantel, d'autres encore, et six pour l'Ă©puisement ou l'aĂ©rage, comme RĂ©quillart... Dix mille ouvriers, des concessions qui s'Ă©tendent sur soixante-sept communes, une extraction de cinq mille tonnes par jour, un chemin de fer reliant toutes les fosses, et des ateliers, et des fabriques!... Ah! oui, ah! oui, il y en a, de l'argent! Un roulement de berlines, sur les trĂ©teaux, fit dresser les oreilles du gros cheval jaune. En bas, la cage devait ĂÂȘtre rĂ©parĂ©e, les moulineurs avaient repris leur besogne. Pendant qu'il attelait sa bĂÂȘte, pour redescendre, le charretier ajouta doucement, en s'adressant Ă elle - Faut pas t'habituer Ă bavarder, fichu paresseux!... Si monsieur Hennebeau savait Ă quoi tu perds le temps! Etienne, songeur, regardait la nuit. Il demanda - Alors, c'est Ă monsieur Hennebeau, la mine? - Non, expliqua le vieux, monsieur Hennebeau n'est que le directeur gĂ©nĂ©ral. Il est payĂ© comme nous. D'un geste, le jeune homme montra l'immensitĂ© des tĂ©nĂšbres. - A qui est-ce donc, tout ça? Mais Bonnemort resta un instant suffoquĂ© par une nouvelle crise, d'une telle violence, qu'il ne pouvait reprendre haleine. Enfin, quand il eut crachĂ© et essuyĂ© l'Ă©cume noire de ses lĂšvres, il dit, dans le vent qui redoublait - Hein? Ă qui tout ça?... On n'en sait rien. A des gens. Et, de la main, il dĂ©signait dans l'ombre un point vague, un lieu ignorĂ© et reculĂ©, peuplĂ© de ces gens, pour qui les Maheu tapaient Ă la veine depuis plus d'un siĂšcle. Sa voix avait pris une sorte de peur religieuse, c'Ă©tait comme s'il eĂ»t parlĂ© d'un tabernacle inaccessible, oĂÂč se cachait le dieu repu et accroupi, auquel ils donnaient tous leur chair, et qu'ils n'avaient jamais vu. - Au moins si l'on mangeait du pain Ă sa suffisance! rĂ©pĂ©ta pour la troisiĂšme fois Etienne, sans transition apparente. - Dame, oui! si l'on mangeait toujours du pain, ça serait trop beau! Le cheval Ă©tait parti, le charretier disparut Ă son tour, d'un pas traĂnard d'invalide. PrĂšs du culbuteur, le manoeuvre n'avait point bougĂ©, ramassĂ© en boule, enfonçant le menton entre ses genoux, fixant sur le vide ses gros yeux Ă©teints. Quand il eut repris son paquet, Etienne ne s'Ă©loigna pas encore. Il sentait les rafales lui glacer le dos, pendant que sa poitrine brĂ»lait, devant le grand feu. Peut-ĂÂȘtre, tout de mĂÂȘme, ferait-il bien de s'adresser Ă la fosse le vieux pouvait ne pas savoir; puis, il se rĂ©signait, il accepterait n'importe quelle besogne. OĂÂč aller et que devenir, Ă travers ce pays affamĂ© par le chĂÂŽmage? Laisser derriĂšre un mur sa carcasse de chien perdu? Cependant, une hĂ©sitation le troublait, une peur du Voreux, au milieu de cette plaine rase, noyĂ©e sous une nuit si Ă©paisse. A chaque bourrasque, le vent paraissait grandir, comme s'il eĂ»t soufflĂ© d'un horizon sans cesse Ă©largi. Aucune aube ne blanchissait dans le ciel mort, les hauts fourneaux seuls flambaient, ainsi que les fours Ă coke, ensanglantant les tĂ©nĂšbres, sans en Ă©clairer l'inconnu. Et le Voreux, au fond de son trou, avec son tassement de bĂÂȘte mĂ©chante, s'Ă©crasait davantage, respirait d'une haleine plus grosse et plus longue, l'air gĂÂȘnĂ© par sa digestion pĂ©nible de chair humaine. I, II Au milieu des champs de blĂ© et de betteraves, le coron des Deux-Cent-Quarante dormait sous la nuit noire. On distinguait vaguement les quatre immenses corps de petites maisons adossĂ©es, des corps de caserne ou d'hĂÂŽpital, gĂ©omĂ©triques, parallĂšles, que sĂ©paraient les trois larges avenues, divisĂ©es en jardins Ă©gaux. Et, sur le plateau dĂ©sert, on entendait la seule plainte des rafales, dans les treillages arrachĂ©s des clĂÂŽtures. Chez les Maheu, au numĂ©ro 16 du deuxiĂšme corps, rien ne bougeait. Des tĂ©nĂšbres Ă©paisses noyaient l'unique chambre du premier Ă©tage, comme Ă©crasant de leur poids le sommeil des ĂÂȘtres que l'on sentait lĂ , en tas, la bouche ouverte, assommĂ©s de fatigue. MalgrĂ© le froid vif du dehors, l'air alourdi avait une chaleur vivante, cet Ă©touffement chaud des chambrĂ©es les mieux tenues, qui sentent le bĂ©tail humain. Quatre heures sonnĂšrent au coucou de la salle du rez-de-chaussĂ©e, rien encore ne remua, des haleines grĂÂȘles sifflaient, accompagnĂ©es de deux ronflements sonores. Et brusquement, ce fut Catherine qui se leva. Dans sa fatigue, elle avait, par habitude, comptĂ© les quatre coups du timbre, Ă travers le plancher, sans trouver la force de s'Ă©veiller complĂštement. Puis, les jambes jetĂ©es hors des couvertures, elle tĂÂątonna, frotta enfin une allumette et alluma la chandelle. Mais elle restait assise, la tĂÂȘte si pesante, qu'elle se renversait entre les deux Ă©paules, cĂ©dant au besoin invincible de retomber sur le traversin. Maintenant, la chandelle Ă©clairait la chambre, carrĂ©e, Ă deux fenĂÂȘtres, que trois lits emplissaient. Il y avait une armoire, une table, deux chaises de vieux noyer, dont le ton fumeux tachait durement les murs, peints en jaune clair. Et rien autre, des hardes pendues Ă des clous, une cruche posĂ©e sur le carreau, prĂšs d'une terrine rouge servant de cuvette. Dans le lit de gauche, Zacharie, l'aĂnĂ©, un garçon de vingt et un ans, Ă©tait couchĂ© avec son frĂšre Jeanlin, qui achevait sa onziĂšme annĂ©e; dans celui de droite, deux mioches, LĂ©nore et Henri, la premiĂšre de six ans, le second de quatre, dormaient aux bras l'un de l'autre; tandis que Catherine partageait le troisiĂšme lit avec sa soeur Alzire, si chĂ©tive pour ses neuf ans, qu'elle ne l'aurait mĂÂȘme pas sentie prĂšs d'elle, sans la bosse de la petite infirme qui lui enfonçait les cĂÂŽtes. La porte vitrĂ©e Ă©tait ouverte, on apercevait le couloir du palier, l'espĂšce de boyau oĂÂč le pĂšre et la mĂšre occupaient un quatriĂšme lit, contre lequel ils avaient dĂ» installer le berceau de la derniĂšre venue, Estelle, ĂÂągĂ©e de trois mois Ă peine. Cependant, Catherine fit un effort dĂ©sespĂ©rĂ©. Elle s'Ă©tirait, elle crispait ses deux mains dans ses cheveux roux, qui lui embroussaillaient le front et la nuque. Fluette pour ses quinze ans, elle ne montrait de ses membres, hors du fourreau Ă©troit de sa chemise, que des pieds bleuis, comme tatouĂ©s de charbon, et des bras dĂ©licats, dont la blancheur de lait tranchait sur le teint blĂÂȘme du visage, dĂ©jĂ gĂÂątĂ© par les continuels lavages au savon noir. Un dernier bĂÂąillement ouvrit sa bouche un peu grande, aux dents superbes dans la pĂÂąleur chlorotique des gencives; pendant que ses yeux gris pleuraient de sommeil combattu, avec une expression douloureuse et brisĂ©e, qui semblait enfler de fatigue sa nuditĂ© entiĂšre. Mais un grognement arriva du palier, la voix de Maheu bĂ©gayait, empĂÂątĂ©e - SacrĂ© nom! il est l'heure... C'est toi qui allumes, Catherine? - Oui, pĂšre... Ca vient de sonner, en bas. - DĂ©pĂÂȘche-toi donc, fainĂ©ante! Si tu avais moins dansĂ© hier dimanche, tu nous aurais rĂ©veillĂ©s plus tĂÂŽt... En voilĂ une vie de paresse! Et il continua de gronder, mais le sommeil le reprit Ă son tour, ses reproches s'embarrassĂšrent, s'Ă©teignirent dans un nouveau ronflement. La jeune fille, en chemise, pieds nus sur le carreau, allait et venait par la chambre. Comme elle passait devant le lit d'Henri et de LĂ©nore, elle rejeta sur eux la couverture, qui avait glissĂ©; et ils ne s'Ă©veillaient pas, anĂ©antis dans le gros sommeil de l'enfance. Alzire, les yeux ouverts, s'Ă©tait retournĂ©e pour prendre la place chaude de sa grande soeur, sans prononcer un mot. - Dis donc, Zacharie! et toi, Jeanlin, dis donc! rĂ©pĂ©tait Catherine, debout devant les deux frĂšres, qui restaient vautrĂ©s, le nez dans le traversin. Elle dut saisir le grand par l'Ă©paule et le secouer; puis, tandis qu'il mĂÂąchait des injures, elle prit le parti de les dĂ©couvrir, en arrachant le drap. Cela lui parut drĂÂŽle, elle se mit Ă rire, lorsqu'elle vit les deux garçons se dĂ©battre, les jambes nues. - C'est bĂÂȘte, lĂÂąche-moi! grogna Zacharie de mĂ©chante humeur, quand il se fut assis. Je n'aime pas les farces... Dire, nom de Dieu! qu'il faut se lever! Il Ă©tait maigre, dĂ©gingandĂ©, la figure longue, salie de quelques rares poils de barbe, avec les cheveux jaunes et la pĂÂąleur anĂ©mique de toute la famille. Sa chemise lui remontait au ventre, et il la baissa, non par pudeur, mais parce qu'il n'avait pas chaud. - C'est sonnĂ© en bas, rĂ©pĂ©tait Catherine. Allons, houp! le pĂšre se fĂÂąche. Jeanlin, qui s'Ă©tait pelotonnĂ©, referma les yeux, en disant - Va te faire fiche, je dors! Elle eut un nouveau rire de bonne fille. Il Ă©tait si petit, les membres grĂÂȘles, avec des articulations Ă©normes, grossies par des scrofules, qu'elle le prit, Ă pleins bras. Mais il gigotait, son masque de singe blafard et crĂ©pu, trouĂ© de ses yeux verts, Ă©largi par ses grandes oreilles, pĂÂąlissait de la rage d'ĂÂȘtre faible. Il ne dit rien, il la mordit au sein droit. - MĂ©chant bougre! murmura-t-elle en retenant un cri et en le posant par terre. Alzire, silencieuse, le drap au menton, ne s'Ă©tait pas rendormie. Elle suivait de ses yeux intelligents d'infirme sa soeur et ses deux frĂšres, qui maintenant s'habillaient. Une autre querelle Ă©clata autour de la terrine, les garçons bousculĂšrent la jeune fille, parce qu'elle se lavait trop longtemps. Les chemises volaient, pendant que, gonflĂ©s encore de sommeil, ils se soulageaient sans honte, avec l'aisance tranquille d'une portĂ©e de jeunes chiens, grandis ensemble. Du reste, Catherine fut prĂÂȘte la premiĂšre. Elle enfila sa culotte de mineur, passa la veste de toile, noua le bĂ©guin bleu autour de son chignon; et, dans ces vĂÂȘtements propres du lundi, elle avait l'air d'un petit homme, rien ne lui restait de son sexe, que le dandinement lĂ©ger des hanches. - Quand le vieux rentrera, dit mĂ©chamment Zacharie, il sera content de trouver le lit dĂ©fait... Tu sais, je lui raconterai que c'est toi. Le vieux, c'Ă©tait le grand-pĂšre, Bonnemort, qui, travaillant la nuit, se couchait au jour; de sorte que le lit ne refroidissait pas, il y avait toujours dedans quelqu'un Ă ronfler. Sans rĂ©pondre, Catherine s'Ă©tait mise Ă tirer la couverture et Ă la border. Mais, depuis un instant, des bruits s'entendaient derriĂšre le mur, dans la maison voisine. Ces constructions de briques, installĂ©es Ă©conomiquement par la Compagnie, Ă©taient si minces, que les moindres souffles les traversaient. On vivait coude Ă coude, d'un bout Ă l'autre; et rien de la vie intime n'y restait cachĂ©, mĂÂȘme aux gamins. Un pas lourd avait Ă©branlĂ© un escalier, puis il y eut comme une chute molle, suivie d'un soupir d'aise. - Bon! dit Catherine, Levaque descend, et voilĂ Bouteloup qui va retrouver la Levaque. Jeanlin ricana, les yeux d'Alzire eux-mĂÂȘmes brillĂšrent. Chaque matin, ils s'Ă©gayaient ainsi du mĂ©nage Ă trois des voisins, un haveur qui logeait un ouvrier de la coupe Ă terre, ce qui donnait Ă la femme deux hommes, l'un de nuit, l'autre de jour. - PhilomĂšne tousse, reprit Catherine aprĂšs avoir tendu l'oreille. Elle parlait de l'aĂnĂ©e des Levaque, une grande fille de dix-neuf ans, la maĂtresse de Zacharie, dont elle avait deux enfants dĂ©jĂ , si dĂ©licate de poitrine d'ailleurs, qu'elle Ă©tait cribleuse Ă la fosse, n'ayant jamais pu travailler au fond. - Ah, ouiche! PhilomĂšne! rĂ©pondit Zacharie, elle s'en moque, elle dort!... C'est cochon de dormir jusqu'Ă six heures! Il passait sa culotte, lorsqu'il ouvrit une fenĂÂȘtre, prĂ©occupĂ© d'une idĂ©e brusque. Au-dehors, dans les tĂ©nĂšbres, le coron s'Ă©veillait, des lumiĂšres pointaient une Ă une, entre les lames des persiennes. Et ce fut encore une dispute il se penchait pour guetter s'il ne verrait pas sortir de chez les Pierron, en face, le maĂtre-porion du Voreux, qu'on accusait de coucher avec la Pierronne; tandis que sa soeur lui criait que le mari avait, depuis la veille, pris son service de jour Ă l'accrochage, et que bien sĂ»r Dansaert n'avait pu coucher, cette nuit-lĂ . L'air entrait par bouffĂ©es glaciales, tous deux s'emportaient, en soutenant chacun l'exactitude de ses renseignements, lorsque des cris et des larmes Ă©clatĂšrent. C'Ă©tait, dans son berceau, Estelle que le froid contrariait. Du coup, Maheu se rĂ©veilla. Qu'avait-il donc dans les os? VoilĂ qu'il se rendormait comme un propre Ă rien. Et il jurait si fort, que les enfants, Ă cĂÂŽtĂ©, ne soufflaient plus. Zacharie et Jeanlin achevĂšrent de se laver, avec une lenteur dĂ©jĂ lasse. Alzire, les yeux grands ouverts, regardait toujours. Les deux mioches, LĂ©nore et Henri, aux bras l'un de l'autre, n'avaient pas remuĂ©, respirant du mĂÂȘme petit souffle, malgrĂ© le vacarme. - Catherine, donne-moi la chandelle! cria Maheu. Elle finissait de boutonner sa veste, elle porta la chandelle dans le cabinet, laissant ses frĂšres chercher leurs vĂÂȘtements, au peu de clartĂ© qui venait de la porte. Son pĂšre sautait du lit. Mais elle ne s'arrĂÂȘta point, elle descendit en gros bas de laine, Ă tĂÂątons, et alluma dans la salle une autre chandelle, pour prĂ©parer le cafĂ©. Tous les sabots de la famille Ă©taient sous le buffet. - Te tairas-tu, vermine! reprit Maheu, exaspĂ©rĂ© des cris d'Estelle, qui continuaient. Il Ă©tait petit comme le vieux Bonnemort, et il lui ressemblait en gras, la tĂÂȘte forte, la face plate et livide, sous les cheveux jaunes, coupĂ©s trĂšs courts. L'enfant hurlait davantage, effrayĂ©e par ces grands bras noueux qui se balançaient au-dessus d'elle. - Laisse-la, tu sais bien qu'elle ne veut pas se taire, dit la Maheude, en s'allongeant au milieu du lit. Elle aussi venait de s'Ă©veiller, et elle se plaignait, c'Ă©tait bĂÂȘte de ne jamais faire sa nuit complĂšte. Ils ne pouvaient donc partir doucement? Enfouie dans la couverture, elle ne montrait que sa figure longue, aux grands traits, d'une beautĂ© lourde, dĂ©jĂ dĂ©formĂ©e Ă trente-neuf ans par sa vie de misĂšre et les sept enfants qu'elle avait eus. Les yeux au plafond, elle parla avec lenteur, pendant que son homme s'habillait. Ni l'un ni l'autre n'entendait plus la petite qui s'Ă©tranglait Ă crier. - Hein? tu sais, je suis sans le sou, et nous voici Ă lundi seulement encore six jours Ă attendre la quinzaine... Il n'y a pas moyen que ça dure. A vous tous, vous apportez neuf francs. Comment veux-tu que j'arrive? Nous sommes dix Ă la maison. - Oh! neuf francs! se rĂ©cria Maheu. Moi et Zacharie, trois ça fait six... Catherine et le pĂšre, deux ça fait quatre; quatre et six, dix... Et Jeanlin, un, ça fait onze. - Oui, onze, mais il y a les dimanches et les jours de chĂÂŽmage... Jamais plus de neuf, entends-tu? Il ne rĂ©pondit pas, occupĂ© Ă chercher par terre sa ceinture de cuir. Puis, il dit en se relevant - Faut pas se plaindre, je suis tout de mĂÂȘme solide. Il y en a plus d'un, Ă quarante-deux ans, qui passe au raccommodage. - Possible, mon vieux, mais ça ne nous donne pas du pain... Qu'est-ce que je vais fiche, dis? Tu n'as rien, toi? - J'ai deux sous. - Garde-les pour boire une chope... Mon Dieu! qu'est-ce que je vais fiche? Six jours, ça n'en finit plus. Nous devons soixante francs Ă Maigrat, qui m'a mise Ă la porte avant-hier. Ca ne m'empĂÂȘchera pas de retourner le voir. Mais, s'il s'entĂÂȘte Ă refuser... Et la Maheude continua d'une voix morne, la tĂÂȘte immobile, fermant par instants les yeux sous la clartĂ© triste de la chandelle. Elle disait le buffet vide, les petits demandant des tartines, le cafĂ© mĂÂȘme manquant, et l'eau qui donnait des coliques, et les longues journĂ©es passĂ©es Ă tromper la faim avec des feuilles de choux bouillies. Peu Ă peu, elle avait dĂ» hausser le ton, car le hurlement d'Estelle couvrait ses paroles. Ces cris devenaient insoutenables. Maheu parut tout d'un coup les entendre, hors de lui, et il saisit la petite dans le berceau, il la jeta sur le lit de la mĂšre, en balbutiant de fureur - Tiens! prends-la, je l'Ă©craserais. Nom de Dieu d'enfant! ça ne manque de rien, ça tĂšte, et ça se plaint plus haut que les autres! Estelle s'Ă©tait mise Ă tĂ©ter, en effet. Disparue sous la couverture, calmĂ©e par la tiĂ©deur du lit, elle n'avait plus qu'un petit bruit goulu des lĂšvres. - Est-ce que les bourgeois de la Piolaine ne t'ont pas dit d'aller les voir? reprit le pĂšre au bout d'un silence. La mĂšre pinça la bouche, d'un air de doute dĂ©couragĂ©. - Oui, ils m'ont rencontrĂ©e, ils portent des vĂÂȘtements aux enfants pauvres... Enfin, je mĂšnerai ce matin chez eux LĂ©nore et Henri. S'ils me donnaient cent sous seulement. Le silence recommença. Maheu Ă©tait prĂÂȘt. Il demeura un moment immobile, puis il conclut de sa voix sourde - Qu'est-ce que tu veux? c'est comme ça, arrange-toi pour la soupe... Ca n'avance Ă rien d'en causer, vaut mieux ĂÂȘtre lĂ -bas au travail. - Bien sur, rĂ©pondit la Maheude. Souffle la chandelle, je n'ai pas besoin de voir la couleur de mes idĂ©es. Il souffla la chandelle. DĂ©jĂ , Zacharie et Jeanlin descendaient; il les suivit; et l'escalier de bois craquait sous leurs pieds lourds, chaussĂ©s de laine. DerriĂšre eux, le cabinet et la chambre Ă©taient retombĂ©s aux tĂ©nĂšbres. Les enfants dormaient, les paupiĂšres d'Alzire elle-mĂÂȘme s'Ă©taient closes. Mais la mĂšre restait maintenant les yeux ouverts dans l'obscuritĂ©, tandis que, tirant sur sa mamelle pendante de femme Ă©puisĂ©e, Estelle ronronnait comme un petit chat. En bas, Catherine s'Ă©tait d'abord occupĂ©e du feu, la cheminĂ©e de fonte, Ă grille centrale, flanquĂ©e de deux fours, et oĂÂč brĂ»lait constamment un feu de houille. La Compagnie distribuait par mois, Ă chaque famille, huit hectolitres d'escaillage, charbon dur ramassĂ© dans les voies. Il s'allumait difficilement, et la jeune fille qui couvrait le feu chaque soir, n'avait qu'Ă le secouer le matin, en ajoutant des petits morceaux de charbon tendre, triĂ©s avec soin. Puis, aprĂšs avoir posĂ© une bouillotte sur la grille, elle s'accroupit devant le buffet. C'Ă©tait une salle assez vaste, tenant tout le rez-de-chaussĂ©e, peinte en vert pomme, d'une propretĂ© flamande, avec ses dalles lavĂ©es Ă grande eau et semĂ©es de sable blanc. Outre le buffet de sapin verni, l'ameublement consistait en une table et des chaises du mĂÂȘme bois. CollĂ©es sur les murs, des enluminures violentes, les portraits de l'Empereur et de l'ImpĂ©ratrice donnĂ©s par la Compagnie, des soldats et des saints, bariolĂ©s d'or, tranchaient crĂ»ment dans la nuditĂ© claire de la piĂšce; et il n'y avait d'autres ornements qu'une boĂte de carton rose sur le buffet, et que le coucou Ă cadran peinturlurĂ©, dont le gros tic-tac semblait remplir le vide du plafond. PrĂšs de la porte de l'escalier, une autre porte conduisait Ă la cave. MalgrĂ© la propretĂ©, une odeur d'oignon cuit, enfermĂ©e depuis la veille, empoisonnait l'air chaud, cet air alourdi, toujours chargĂ© d'une ĂÂącretĂ© de houille. Devant le buffet ouvert, Catherine rĂ©flĂ©chissait. Il ne restait qu'un bout de pain, du fromage blanc en suffisance, mais Ă peine une lichette de beurre; et il s'agissait de faire les tartines pour eux quatre. Enfin, elle se dĂ©cida, coupa les tranches, en prit une qu'elle couvrit de fromage, en frotta une autre de beurre, puis les colla ensemble c'Ă©tait "le briquet", la double tartine emportĂ©e chaque matin Ă la fosse. BientĂÂŽt, les quatre briquets furent en rang sur la table, rĂ©partis avec une sĂ©vĂšre justice, depuis le gros du pĂšre jusqu'au petit de Jeanlin. Catherine, qui paraissait toute Ă son mĂ©nage, devait pourtant rĂÂȘvasser aux histoires que Zacharie racontait sur le maĂtre-porion et la Pierronne, car elle entrebĂÂąilla la porte d'entrĂ©e et jeta un coup d'oeil dehors. Le vent soufflait toujours, des clartĂ©s plus nombreuses couraient sur les façades basses du coron, d'oĂÂč montait une vague trĂ©pidation de rĂ©veil. DĂ©jĂ des portes se refermaient, des files noires d'ouvriers s'Ă©loignaient dans la nuit. Etait-elle bĂÂȘte, de se refroidir, puisque le chargeur Ă l'accrochage dormait bien sĂ»r, en attendant d'aller prendre son service, Ă six heures! Et elle restait, elle regardait la maison, de l'autre cĂÂŽtĂ© des jardins. La porte s'ouvrit, sa curiositĂ© s'alluma. Mais ce ne pouvait ĂÂȘtre que la petite des Pierron, Lydie, qui partait pour la fosse. Un bruit sifflant de vapeur la fit se tourner. Elle ferma, se hĂÂąta de courir l'eau bouillait et se rĂ©pandait, Ă©teignant le feu. Il ne restait plus de cafĂ©, elle dut se contenter de passer l'eau sur le marc de la veille; puis, elle sucra dans la cafetiĂšre, avec de la cassonade. Justement, son pĂšre et ses deux frĂšres descendaient. - Fichtre! dĂ©clara Zacharie, quand il eut mis le nez dans son bol, en voilĂ un qui ne nous cassera pas la tĂÂȘte! Maheu haussa les Ă©paules d'un air rĂ©signĂ©. - Bah! c'est chaud, c'est bon tout de mĂÂȘme. Jeanlin avait ramassĂ© les miettes des tartines et trempait une soupe. AprĂšs avoir bu, Catherine acheva de vider la cafetiĂšre dans les gourdes de fer-blanc. Tous quatre, debout, mal Ă©clairĂ©s par la chandelle fumeuse, avalaient en hĂÂąte. - Y sommes-nous Ă la fin!! dit le pĂšre. On croirait qu'on a des rentes! Mais une voix vint de l'escalier, dont ils avaient laissĂ© la porte ouverte. C'Ă©tait la Maheude qui criait - Prenez tout le pain, j'ai un peu de vermicelle pour les enfants! - Oui, oui! rĂ©pondit Catherine. Elle avait recouvert le feu, en calant, sur un coin de la grille, un restant de soupe, que le grand-pĂšre trouverait chaude, lorsqu'il rentrerait Ă six heures. Chacun prit sa paire de sabots sous le buffet, se passa la ficelle de sa gourde Ă l'Ă©paule, et fourra son briquet dans son dos, entre la chemise et la veste. Et ils sortirent, les hommes devant, la fille derriĂšre, soufflant la chandelle, donnant un tour de clef. La maison redevint noire. - Tiens! nous filons ensemble, dit un homme qui refermait la porte de la maison voisine. C'Ă©tait Levaque, avec son fils BĂ©bert, un gamin de douze ans, grand ami de Jeanlin. Catherine, Ă©tonnĂ©e, Ă©touffa un rire, Ă l'oreille de Zacharie quoi donc? Bouteloup n'attendait mĂÂȘme plus que le mari fĂ»t parti! Maintenant, dans le coron, les lumiĂšres s'Ă©teignaient. Une derniĂšre porte claqua, tout dormait de nouveau, les femmes et les petits reprenaient leur somme, au fond des lits plus larges. Et, du village Ă©teint au Voreux qui soufflait, c'Ă©tait sous les rafales un lent dĂ©filĂ© d'ombres, le dĂ©part des charbonniers pour le travail, roulant des Ă©paules, embarrassĂ©s de leurs bras, qu'ils croisaient sur la poitrine; tandis que, derriĂšre, le briquet faisait Ă chacun une bosse. VĂÂȘtus de toile mince, ils grelottaient de froid, sans se hĂÂąter davantage, dĂ©bandĂ©s le long de la route, avec un piĂ©tinement de troupeau. I, III Etienne, descendu enfin du terri, venait d'entrer au Voreux; et les hommes auxquels il s'adressait, demandant s'il y avait du travail, hochaient la tĂÂȘte, lui disaient tous d'attendre le maĂtre-porion. On le laissait libre, au milieu des bĂÂątiments mal Ă©clairĂ©s, pleins de trous noirs, inquiĂ©tants avec la complication de leurs salles et de leurs Ă©tages. AprĂšs avoir montĂ© un escalier obscur Ă moitiĂ© dĂ©truit, il s'Ă©tait trouvĂ© sur une passerelle branlante, puis avait traversĂ© le hangar du criblage, plongĂ© dans une nuit si profonde, qu'il marchait les mains en avant, pour ne pas se heurter. Devant lui, brusquement, deux yeux jaunes, Ă©normes, trouĂšrent les tĂ©nĂšbres. Il Ă©tait sous le beffroi, dans la salle de recette, Ă la bouche mĂÂȘme du puits. Un porion, le pĂšre Richomme, un gros Ă figure de bon gendarme, barrĂ©e de moustaches grises, se dirigeait justement vers le bureau du receveur. - On n'a pas besoin d'un ouvrier ici, pour n'importe quel travail? demanda de nouveau Etienne. Richomme allait dire non; mais il se reprit et rĂ©pondit comme les autres, en s'Ă©loignant - Attendez monsieur Dansaert, le maĂtre-porion. Quatre lanternes Ă©taient plantĂ©es lĂ , et les rĂ©flecteurs, qui jetaient toute la lumiĂšre sur le puits, Ă©clairaient vivement les rampes de fer, les leviers des signaux et des verrous, les madriers des guides, oĂÂč glissaient les deux cages. Le reste, la vaste salle, pareille Ă une nef d'Ă©glise, se noyait, peuplĂ©e de grandes ombres flottantes. Seule, la lampisterie flambait au fond, tandis que, dans le bureau du receveur, une maigre lampe mettait comme une Ă©toile prĂšs de s'Ă©teindre. L'extraction venait d'ĂÂȘtre reprise; et, sur les dalles de fonte, c'Ă©tait un tonnerre continu, les berlines de charbon roulĂ©es sans cesse, les courses des moulineurs, dont on distinguait les longues Ă©chines penchĂ©es, dans le remuement de toutes ces choses noires et bruyantes qui s'agitaient. Un instant, Etienne resta immobile, assourdi, aveuglĂ©. Il Ă©tait glacĂ©, des courants d'air entraient de partout. Alors, il fit quelques pas, attirĂ© par la machine, dont il voyait maintenant luire les aciers et les cuivres. Elle se trouvait en arriĂšre du puits, Ă vingt-cinq mĂštres, dans une salle plus haute, et assise si carrĂ©ment sur son massif de briques, qu'elle marchait Ă toute vapeur, de toute sa force de quatre cents chevaux, sans que le mouvement de sa bielle Ă©norme, Ă©mergeant et plongeant, avec une douceur huilĂ©e, donnĂÂąt un frisson aux murs. Le machineur, debout Ă la barre de mise en train, Ă©coutait les sonneries des signaux, ne quittait pas des yeux le tableau indicateur, oĂÂč le puits Ă©tait figurĂ©, avec ses Ă©tages diffĂ©rents, par une rainure verticale, que parcouraient des plombs pendus Ă des ficelles, reprĂ©sentant les cages. Et, Ă chaque dĂ©part, quand la machine se remettait en branle, les bobines, les deux immenses roues de cinq mĂštres de rayon, aux moyeux desquels les deux cĂÂąbles d'acier s'enroulaient et se dĂ©roulaient en sens contraire, tournaient d'une telle vitesse, qu'elles n'Ă©taient plus qu'une poussiĂšre grise. - Attention donc! criĂšrent trois moulineurs, qui traĂnaient une Ă©chelle gigantesque. Etienne avait manquĂ© d'ĂÂȘtre Ă©crasĂ©. Ses yeux s'habituaient il regardait en l'air filer les cĂÂąbles, plus de trente mĂštres de ruban d'acier, qui montaient d'une volĂ©e dans le beffroi, oĂÂč ils passaient sur les molettes, pour descendre Ă pic dans le puits s'attacher aux cages d'extraction. Une charpente de fer, pareille Ă la haute charpente d'un clocher, portait les molettes. C'Ă©tait un glissement d'oiseau, sans un bruit, sans un heurt, la fuite rapide, le continuel va-et-vient d'un fil de poids Ă©norme, qui pouvait enlever jusqu'Ă douze mille kilogrammes, avec une vitesse de dix mĂštres Ă la seconde. - Attention donc, nom de Dieu! criĂšrent de nouveau les moulineurs, qui poussaient l'Ă©chelle de l'autre cĂÂŽtĂ©, pour visiter la molette de gauche. Lentement, Etienne revint Ă la recette. Ce vol gĂ©ant sur sa tĂÂȘte l'ahurissait. Et, grelottant dans les courants d'air, il regarda la manoeuvre des cages, les oreilles cassĂ©es par le roulement des berlines. PrĂšs du puits, le signal fonctionnait, un lourd marteau Ă levier, qu'une corde tirĂ©e du fond laissait tomber sur un billot. Un coup pour arrĂÂȘter, deux pour descendre, trois pour monter c'Ă©tait sans relĂÂąche comme des coups de massue dominant le tumulte, accompagnĂ©s d'une claire sonnerie de timbre; pendant que le moulineur, dirigeant la manoeuvre, augmentait encore le tapage, en criant des ordres au machineur, dans un porte-voix. Les cages, au milieu de ce branle-bas, apparaissaient et s'enfonçaient, se vidaient et se remplissaient, sans qu'Etienne comprĂt rien Ă ces besognes compliquĂ©es. Il ne comprenait bien qu'une chose le puits avalait des hommes par bouchĂ©es de vingt et de trente, et d'un coup de gosier si facile, qu'il semblait ne pas les sentir passer. DĂšs quatre heures, la descente des ouvriers commençait. Ils arrivaient de la baraque, pieds nus, la lampe Ă la main, attendant par petits groupes d'ĂÂȘtre en nombre suffisant. Sans un bruit, d'un jaillissement doux de bĂÂȘte nocturne, la cage de fer montait du noir, se calait sur les verrous, avec ses quatre Ă©tages contenant chacun deux berlines pleines de charbon. Des moulineurs, aux diffĂ©rents paliers, sortaient les berlines, les remplaçaient par d'autres, vides ou chargĂ©es Ă l'avance des bois de taille. Et c'Ă©tait dans les berlines vides que s'empilaient les ouvriers, cinq par cinq, jusqu'Ă quarante d'un coup, lorsqu'ils tenaient toutes les cases. Un ordre partait du porte-voix, un beuglement sourd et indistinct, pendant qu'on tirait quatre fois la corde du signal d'en bas, "sonnant Ă la viande", pour prĂ©venir de ce chargement de chair humaine. Puis, aprĂšs un lĂ©ger sursaut, la cage plongeait silencieuse, tombait comme une pierre, ne laissait derriĂšre elle que la fuite vibrante du cĂÂąble. - C'est profond? demanda Etienne Ă un mineur, qui attendait prĂšs de lui, l'air somnolent. - Cinq cent cinquante-quatre mĂštres, rĂ©pondit l'homme. Mais il y a quatre accrochages au-dessus, le premier Ă trois cent vingt. Tous deux se turent, les yeux sur le cĂÂąble qui remontait. Etienne reprit - Et quand ça casse? - Ah! quand ça casse... Le mineur acheva d'un geste. Son tour Ă©tait arrivĂ©, la cage avait reparu, de son mouvement aisĂ© et sans fatigue. Il s'y accroupit avec des camarades, elle replongea, puis jaillit de nouveau au bout de quatre minutes Ă peine, pour engloutir une autre charge d'hommes. Pendant une demi-heure, le puits en dĂ©vora de la sorte, d'une gueule plus ou moins gloutonne, selon la profondeur de l'accrochage oĂÂč ils descendaient, mais sans un arrĂÂȘt, toujours affamĂ©, de boyaux gĂ©ants capables de digĂ©rer un peuple. Cela s'emplissait, s'emplissait encore, et les tĂ©nĂšbres restaient mortes, la cage montait du vide dans le mĂÂȘme silence vorace. Etienne, Ă la longue, fut repris du malaise qu'il avait Ă©prouvĂ© dĂ©jĂ sur le terri. Pourquoi s'entĂÂȘter? ce maĂtre-porion le congĂ©dierait comme les autres. Une peur vague le dĂ©cida brusquement il s'en alla, il ne s'arrĂÂȘta dehors que devant le bĂÂątiment des gĂ©nĂ©rateurs. La porte, grande ouverte, laissait voir sept chaudiĂšres Ă deux foyers. Au milieu de la buĂ©e blanche, dans le sifflement des fuites, un chauffeur Ă©tait occupĂ© Ă charger un des foyers, dont l'ardente fournaise se faisait sentir jusque sur le seuil; et le jeune homme, heureux d'avoir chaud, s'approchait, lorsqu'il rencontra une nouvelle bande de charbonniers, qui arrivait Ă la fosse. C'Ă©taient les Maheu et les Levaque. Quand il aperçut, en tĂÂȘte, Catherine avec son air doux de garçon, l'idĂ©e superstitieuse lui vint de risquer une derniĂšre demande. - Dites donc, camarade, on n'a pas besoin d'un ouvrier ici, pour n'importe quel travail? Elle le regarda, surprise, un peu effrayĂ©e de cette voix brusque qui sortait de l'ombre. Mais, derriĂšre elle, Maheu avait entendu, et il rĂ©pondit, il causa un instant. Non, on n'avait besoin de personne. Ce pauvre diable d'ouvrier, perdu sur les routes, l'intĂ©ressait. Lorsqu'il le quitta, il dit aux autres - Hein! on pourrait ĂÂȘtre comme ça... Faut pas se plaindre, tous n'ont pas du travail Ă crever. La bande entra et alla droit Ă la baraque, vaste salle grossiĂšrement crĂ©pie, entourĂ©e d'armoires que fermaient des cadenas. Au centre, une cheminĂ©e de fer, une sorte de poĂÂȘle sans porte, Ă©tait rouge, si bourrĂ©e de houille incandescente, que des morceaux craquaient et dĂ©boulaient sur la terre battue du sol. La salle ne se trouvait Ă©clairĂ©e que par ce brasier, dont les reflets sanglants dansaient le long des boiseries crasseuses, jusqu'au plafond sali d'une poussiĂšre noire. Comme les Maheu arrivaient, des rires Ă©clataient dans la grosse chaleur. Une trentaine d'ouvriers Ă©taient debout, le dos tournĂ© Ă la flamme, se rĂÂŽtissant d'un air de jouissance. Avant la descente, tous venaient ainsi prendre et emporter dans la peau un bon coup de feu, pour braver l'humiditĂ© du puits. Mais, ce matin-lĂ , on s'Ă©gayait davantage, on plaisantait la Mouquette, une herscheuse de dix-huit ans, bonne fille dont la gorge et le derriĂšre Ă©normes crevaient la veste et la culotte. Elle habitait RĂ©quillart avec son pĂšre, le vieux Mouque, palefrenier, et Mouquet son frĂšre, moulineur; seulement, les heures de travail n'Ă©tant pas les mĂÂȘmes, elle se rendait seule Ă la fosse; et, au milieu des blĂ©s en Ă©tĂ©, contre un mur en hiver, elle se donnait du plaisir, en compagnie de son amoureux de la semaine. Toute la mine y passait, une vraie tournĂ©e de camarades, sans autre consĂ©quence. Un jour qu'on lui reprochait un cloutier de Marchiennes, elle avait failli crever de colĂšre, criant qu'elle se respectait trop, qu'elle se couperait un bras, si quelqu'un pouvait se flatter de l'avoir vue avec un autre qu'un charbonnier. - Ce n'est donc plus le grand Chaval? disait un mineur en ricanant. T'as pris ce petiot-lĂ ? Mais lui faudrait une Ă©chelle!... Je vous ai aperçus derriĂšre RĂ©quillart. A preuve qu'il est montĂ© sur une borne. - AprĂšs? rĂ©pondait la Mouquette en belle humeur. Qu'est-ce que ça te fiche? On ne t'a pas appelĂ© pour que tu pousses. Et cette grossiĂšretĂ© bonne enfant redoublait les Ă©clats des hommes, qui enflaient leurs Ă©paules, Ă demi cuites par le poĂÂȘle; tandis que, secouĂ©e elle-mĂÂȘme de rires, elle promenait au milieu d'eux l'indĂ©cence de son costume, d'un comique troublant, avec ses bosses de chair, exagĂ©rĂ©es jusqu'Ă l'infirmitĂ©. Mais la gaietĂ© tomba, Mouquette racontait Ă Maheu que Fleurance, la grande Fleurance, ne viendrait plus on l'avait trouvĂ©e, la veille, raide sur son lit, les uns disaient d'un dĂ©crochement du coeur, les autres d'un litre de geniĂšvre bu trop vite. Et Maheu se dĂ©sespĂ©rait encore de la malchance, voilĂ qu'il perdait une de ses herscheuses, sans pouvoir la remplacer immĂ©diatement! Il travaillait au marchandage, ils Ă©taient quatre haveurs associĂ©s dans sa taille, lui, Zacharie, Levaque et Chaval. S'ils n'avaient plus que Catherine pour rouler, la besogne allait souffrir. Tout d'un coup, il cria - Tiens! et cet homme qui cherchait de l'ouvrage! Justement, Dansaert passait devant la baraque. Maheu lui conta l'histoire, demanda l'autorisation d'embaucher l'homme; et il insistait sur le dĂ©sir que tĂ©moignait la Compagnie de substituer aux herscheuses des garçons, comme Ă Anzin. Le maĂtre-porion eut d'abord un sourire, car le projet d'exclure les femmes du fond rĂ©pugnait d'ordinaire aux mineurs, qui s'inquiĂ©taient du placement de leurs filles, peu touchĂ©s de la question de moralitĂ© et d'hygiĂšne. Enfin, aprĂšs avoir hĂ©sitĂ©, il permit, mais en se rĂ©servant de faire ratifier sa dĂ©cision par M. NĂ©grel, l'ingĂ©nieur. - Ah bien! dĂ©clara Zacharie, il est loin, l'homme, s'il court toujours! - Non, dit Catherine, je l'ai vu s'arrĂÂȘter aux chaudiĂšres. - Va donc, fainĂ©ante! cria Maheu. La jeune fille s'Ă©lança, pendant qu'un flot de mineurs montaient au puits, cĂ©dant le feu Ă d'autres. Jeanlin, sans attendre son pĂšre, alla lui aussi prendre sa lampe, avec BĂ©bert, gros garçon naĂÂŻf, et Lydie, chĂ©tive fillette de dix ans. Partie devant eux, la Mouquette s'exclamait dans l'escalier noir, en les traitant de sales mioches et en menaçant de les gifler, s'ils la pinçaient. Etienne, dans le bĂÂątiment aux chaudiĂšres, causait en effet avec le chauffeur, qui chargeait les foyers de charbon. Il Ă©prouvait un grand froid, Ă l'idĂ©e de la nuit oĂÂč il lui fallait rentrer. Pourtant, il se dĂ©cidait Ă partir, lorsqu'il sentit une main se poser sur son Ă©paule. - Venez, dit Catherine, il y a quelque chose pour vous. D'abord, il ne comprit pas. Puis, il eut un Ă©lan de joie, il serra Ă©nergiquement les mains de la jeune fille. - Merci, camarade... Ah! vous ĂÂȘtes un bon bougre, par exemple! Elle se mit Ă rire, en le regardant dans la rouge lueur des foyers, qui les Ă©clairaient. Cela l'amusait, qu'il la prĂt pour un garçon, fluette encore, son chignon cachĂ© sous le bĂ©guin. Lui, riait aussi de contentement; et ils restĂšrent un instant tous deux Ă se rire Ă la face, les joues allumĂ©es. Maheu, dans la baraque, accroupi devant sa caisse, retirait ses sabots et ses gros bas de laine. Lorsque Etienne fut lĂ , on rĂ©gla tout en quatre paroles trente sous par jour, un travail fatigant, mais qu'il apprendrait vite. Le haveur lui conseilla de garder ses souliers, et il lui prĂÂȘta une vieille barrette, un chapeau de cuir destinĂ© Ă garantir le crĂÂąne, prĂ©caution que le pĂšre et les enfants dĂ©daignaient. Les outils furent sortis de la caisse, oĂÂč se trouvait justement la pelle de Fleurance. Puis, quand Maheu y eut enfermĂ© leurs sabots, leurs bas, ainsi que le paquet d'Etienne, il s'impatienta brusquement. - Que fait-il donc, cette rosse de Chaval? Encore quelque fille culbutĂ©e sur un tas de pierres!... Nous sommes en retard d'une demi-heure, aujourd'hui. Zacharie et Levaque se rĂÂŽtissaient tranquillement les Ă©paules. Le premier finit par dire - C'est Chaval que tu attends?... Il est arrivĂ© avant nous, il est descendu tout de suite. - Comment! tu sais ça et tu ne m'en dis rien!... Allons! allons! dĂ©pĂÂȘchons. Catherine, qui chauffait ses mains, dut suivre la bande. Etienne la laissa passer, monta derriĂšre elle. De nouveau, il voyageait dans un dĂ©dale d'escaliers et de couloirs obscurs, oĂÂč les pieds nus faisaient un bruit mou de vieux chaussons. Mais la lampisterie flamboya, une piĂšce vitrĂ©e, emplie de rĂÂąteliers qui alignaient par Ă©tages des centaines de lampes Davy, visitĂ©es, lavĂ©es de la veille, allumĂ©es comme des cierges au fond d'une chapelle ardente. Au guichet, chaque ouvrier prenait la sienne, poinçonnĂ©e Ă son chiffre; puis, il l'examinait, la fermait lui-mĂÂȘme; pendant que le marqueur, assis Ă une table, inscrivait sur le registre l'heure de la descente. Il fallut que Maheu intervĂnt pour la lampe de son nouveau herscheur. Et il y avait encore une prĂ©caution, les ouvriers dĂ©filaient devant un vĂ©rificateur, qui s'assurait si toutes les lampes Ă©taient bien fermĂ©es. - Fichtre! il ne fait pas chaud ici, murmura Catherine grelottante. Etienne se contenta de hocher la tĂÂȘte. Il se retrouvait devant le puits, au milieu de la vaste salle, balayĂ©e de courants d'air. Certes, il se croyait brave, et pourtant une Ă©motion dĂ©sagrĂ©able le serrait Ă la gorge, dans le tonnerre des berlines, les coups sourds des signaux, le beuglement Ă©touffĂ© du porte-voix, en face du vol continu de ces cĂÂąbles, dĂ©roulĂ©s et enroulĂ©s Ă toute vapeur par les bobines de la machine. Les cages montaient, descendaient avec leur glissement de bĂÂȘte de nuit, engouffraient toujours des hommes, que la gueule du trou semblait boire. C'Ă©tait son tour maintenant, il avait trĂšs froid, il gardait un silence nerveux, qui faisait ricaner Zacharie et Levaque; car tous deux dĂ©sapprouvaient l'embauchage de cet inconnu, Levaque surtout, blessĂ© de n'avoir pas Ă©tĂ© consultĂ©. Aussi Catherine fut-elle heureuse d'entendre son pĂšre expliquer les choses au jeune homme. - Regardez, au-dessus de la cage, il y a un parachute, des crampons de fer qui s'enfoncent dans les guides, en cas de rupture. Ca fonctionne, oh! pas toujours... Oui, le puits est divisĂ© en trois compartiments, fermĂ©s par des planches, du haut en bas au milieu les cages, Ă gauche le goyot des Ă©chelles... Mais il s'interrompit pour gronder, sans se permettre de trop hausser la voix - Qu'est-ce que nous fichons lĂ , nom de Dieu! Est-il permis de nous faire geler de la sorte! Le porion Richomme, qui allait descendre lui aussi, sa lampe Ă feu libre fixĂ©e par un clou dans le cuir de sa barrette, l'entendit se plaindre. - MĂ©fie-toi, gare aux oreilles! murmura-t-il paternellement, en vieux mineur restĂ© bon pour les camarades. Faut bien que les manoeuvres se fassent... Tiens! nous y, sommes, embarque avec ton monde. La cage, en effet, garnie de bandes de tĂÂŽle et d'un grillage Ă petites mailles, les attendait, d'aplomb sur les verrous. Maheu, Zacharie, Levaque, Catherine se glissĂšrent dans une berline du fond; et, comme ils devaient y tenir cinq, Etienne y entra Ă son tour; mais les bonnes places Ă©taient prises, il lui fallut se tasser prĂšs de la jeune fille, dont un coude lui labourait le ventre. Sa lampe l'embarrassait, on lui conseilla de l'accrocher Ă une boutonniĂšre de sa veste. Il n'entendit pas, la garda maladroitement Ă la main. L'embarquement continuait, dessus et dessous, un enfournement confus de bĂ©tail. On ne pouvait donc partir, que se passait-il? Il lui semblait s'impatienter depuis de longues minutes. Enfin, une secousse l'Ă©branla, et tout sombra; les objets autour de lui s'envolĂšrent, tandis qu'il Ă©prouvait un vertige anxieux de chute, qui lui tirait les entrailles. Cela dura tant qu'il fut au jour, franchissant les deux Ă©tages des recettes, au milieu de la fuite tournoyante des charpentes. Puis, tombĂ© dans le noir de la fosse, il resta Ă©tourdi, n'ayant plus la perception nette de ses sensations. - Nous voilĂ partis, dit paisiblement Maheu. Tous Ă©taient Ă l'aise. Lui, par moments, se demandait s'il descendait ou s'il montait. Il y avait comme des immobilitĂ©s, quand la cage filait droit, sans toucher aux guides; et de brusques trĂ©pidations se produisaient ensuite, une sorte de dansement dans les madriers, qui lui donnait la peur d'une catastrophe. Du reste, il ne pouvait distinguer les parois du puits, derriĂšre le grillage oĂÂč il collait sa face. Les lampes Ă©clairaient mal le tassement des corps, Ă ses pieds. Seule, la lampe Ă feu libre du porion, dans la berline voisine, brillait comme un phare. - Celui-ci a quatre mĂštres de diamĂštre, continuait Maheu, pour l'instruire. Le cuvelage aurait bon besoin d'ĂÂȘtre refait, car l'eau filtre de tous cĂÂŽtĂ©s... Tenez! nous arrivons au niveau, entendez-vous? Etienne se demandait justement quel Ă©tait ce bruit d'averse. Quelques grosses gouttes avaient d'abord sonnĂ© sur le toit de la cage, comme au dĂ©but d'une ondĂ©e; et, maintenant, la pluie augmentait, ruisselait, se changeait en un vĂ©ritable dĂ©luge. Sans doute, la toiture Ă©tait trouĂ©e, car un filet d'eau, coulant sur son Ă©paule, le trempait jusqu'Ă la chair. Le froid devenait glacial, on enfonçait dans une humiditĂ© noire, lorsqu'on traversa un rapide Ă©blouissement, la vision d'une caverne oĂÂč des hommes s'agitaient, Ă la lueur d'un Ă©clair. DĂ©jĂ , on retombait au nĂ©ant. Maheu disait - C'est le premier accrochage. Nous sommes Ă trois cent vingt mĂštres. Regardez la vitesse. Levant sa lampe, il Ă©claira un madrier des guides, qui filait ainsi qu'un rail sous un train lancĂ© Ă toute vapeur; et, au-delĂ , on ne voyait toujours rien. Trois autres accrochages passĂšrent, dans un envolement de clartĂ©s. La pluie assourdissante battait les tĂ©nĂšbres. - Comme c'est profond! murmura Etienne. Cette chute devait durer depuis des heures. Il souffrait de la fausse position qu'il avait prise, n'osant bouger, torturĂ© surtout par le coude de Catherine. Elle ne prononçait pas un mot, il la sentait seulement contre lui, qui le rĂ©chauffait. Lorsque la cage, enfin, s'arrĂÂȘta au fond, Ă cinq cent cinquante-quatre mĂštres, il s'Ă©tonna d'apprendre que la descente avait durĂ© juste une minute. Mais le bruit des verrous qui se fixaient, la sensation sous lui de cette soliditĂ©, l'Ă©gaya brusquement; et ce fut en plaisantant qu'il tutoya Catherine. - Qu'as-tu sous la peau, Ă ĂÂȘtre chaud comme ça?... J'ai ton coude dans le ventre, bien sĂ»r. Alors, elle Ă©clata aussi. Etait-il bĂÂȘte, de la prendre encore pour un garçon! Il avait donc les yeux bouchĂ©s? - C'est dans l'oeil que tu l'as, mon coude, rĂ©pondit-elle, au milieu d'une tempĂÂȘte de rires, que le jeune homme, surpris, ne s'expliqua point. La cage se vidait, les ouvriers traversĂšrent la salle de l'accrochage, une salle taillĂ©e dans le roc, voĂ»tĂ©e en maçonnerie, et que trois grosses lampes Ă feu libre Ă©clairaient. Sur les dalles de fonte, les chargeurs roulaient violemment des berlines pleines. Une odeur de cave suintait des murs, une fraĂcheur salpĂÂȘtrĂ©e oĂÂč passaient des souffles chauds, venus de l'Ă©curie voisine. Quatre galeries s'ouvraient lĂ , bĂ©antes. - Par ici, dit Maheu Ă Etienne. Vous n'y ĂÂȘtes pas, nous avons Ă faire deux bons kilomĂštres. Les ouvriers se sĂ©paraient, se perdaient par groupes, au fond de ces trous noirs. Une quinzaine venaient de s'engager dans celui de gauche; et Etienne marchait le dernier, derriĂšre Maheu, que prĂ©cĂ©daient Catherine, Zacharie et Levaque. C'Ă©tait une belle galerie de roulage, Ă travers banc, et d'un roc si solide, qu'elle avait eu besoin seulement d'ĂÂȘtre muraillĂ©e en partie. Un par un, ils allaient, ils allaient toujours, sans une parole, avec les petites flammes des lampes. Le jeune homme butait Ă chaque pas, s'embarrassait les pieds dans les rails. Depuis un instant, un bruit sourd l'inquiĂ©tait, le bruit lointain d'un orage dont la violence semblait croĂtre et venir des entrailles de la terre. Etait-ce le tonnerre d'un Ă©boulement, Ă©crasant sur leurs tĂÂȘtes la masse Ă©norme qui les sĂ©parait du jour? Une clartĂ© perça la nuit, il sentit trembler le roc; et, lorsqu'il se fut rangĂ© le long du mur, comme les camarades, il vit passer contre sa face un gros cheval blanc, attelĂ© Ă un train de berlines. Sur la premiĂšre, tenant les guides, BĂ©bert Ă©tait assis; tandis que Jeanlin, les poings appuyĂ©s au bord de la derniĂšre, courait pieds nus. On se remit en marche. Plus loin, un carrefour se prĂ©senta, deux nouvelles galeries s'ouvraient, et la bande s'y divisa encore, les ouvriers se rĂ©partissaient peu Ă peu dans tous les chantiers de la mine. Maintenant, la galerie de roulage Ă©tait boisĂ©e, des Ă©tais de chĂÂȘne soutenaient le toit, faisaient Ă la roche Ă©bouleuse une chemise de charpente, derriĂšre laquelle on apercevait les lames des schistes, Ă©tincelants de mica, et la masse grossiĂšre des grĂšs, ternes et rugueux. Des trains de berlines pleines ou vides passaient continuellement, se croisaient, avec leur tonnerre emportĂ© dans l'ombre par des bĂÂȘtes vagues, au trot de fantĂÂŽme. Sur la double voie d'un garage, un long serpent noir dormait, un train arrĂÂȘtĂ©, dont le cheval s'Ă©broua, si noyĂ© de nuit, que sa croupe confuse Ă©tait comme un bloc tombĂ© de la voĂ»te. Des portes d'aĂ©rage battaient, se refermaient lentement. Et, Ă mesure qu'on avançait, la galerie devenait plus Ă©troite, plus basse, inĂ©gale de toit, forçant les Ă©chines Ă se plier sans cesse. Etienne, rudement, se heurta la tĂÂȘte. Sans la barrette de cuir, il avait le crĂÂąne fendu. Pourtant, il suivait avec attention, devant lui, les moindres gestes de Maheu, dont la silhouette sombre se dĂ©tachait sur la lueur des lampes. Pas un des ouvriers ne se cognait, ils devaient connaĂtre chaque bosse, noeud des bois ou renflement de la roche. Le jeune homme souffrait aussi du sol glissant, qui se trempait de plus en plus. Par moments, il traversait de vĂ©ritables mares, que le gĂÂąchis boueux des pieds rĂ©vĂ©lait seul. Mais ce qui l'Ă©tonnait surtout, c'Ă©taient les brusques changements de tempĂ©rature. En bas du puits, il faisait trĂšs frais, et dans la galerie de roulage, par oĂÂč passait tout l'air de la mine, soufflait un vent glacĂ©, dont la violence tournait Ă la tempĂÂȘte, entre les muraillements Ă©troits. Ensuite, Ă mesure qu'on s'enfonçait dans les autres voies, qui recevaient seulement leur part disputĂ©e d'aĂ©rage, le vent tombait, la chaleur croissait, une chaleur suffocante, d'une pesanteur de plomb. Maheu n'avait plus ouvert la bouche. Il prit Ă droite une nouvelle galerie, en disant simplement Ă Etienne, sans se tourner - La veine Guillaume. C'Ă©tait la veine oĂÂč se trouvait leur taille. DĂšs les premiĂšres enjambĂ©es, Etienne se meurtrit de la tĂÂȘte et des coudes. Le toit en pente descendait si bas que, sur des longueurs de vingt et trente mĂštres, il devait marcher cassĂ© en deux. L'eau arrivait aux chevilles. On fit ainsi deux cents mĂštres; et, tout d'un coup, il vit disparaĂtre Levaque, Zacharie et Catherine, qui semblaient s'ĂÂȘtre envolĂ©s par une fissure mince, ouverte devant lui. - Il faut monter, reprit Maheu. Pendez votre lampe Ă une boutonniĂšre, et accrochez-vous aux bois. Lui-mĂÂȘme disparut. Etienne dut le suivre. Cette cheminĂ©e, laissĂ©e dans la veine, Ă©tait rĂ©servĂ©e aux mineurs et desservait toutes les voies secondaires. Elle avait l'Ă©paisseur de la couche de charbon, Ă peine soixante centimĂštres. Heureusement, le jeune homme Ă©tait mince, car, maladroit encore, il s'y hissait avec une dĂ©pense inutile de muscles, aplatissant les Ă©paules et les hanches, avançant Ă la force des poignets, cramponnĂ© aux bois. Quinze mĂštres plus haut, on rencontra la premiĂšre voie secondaire; mais il fallut continuer, la taille de Maheu et consorts Ă©tait la sixiĂšme voie, dans l'enfer, ainsi qu'ils disaient; et, de quinze mĂštres en quinze mĂštres, les voies se superposaient, la montĂ©e n'en finissait plus, Ă travers cette fente qui raclait le dos et la poitrine. Etienne rĂÂąlait, comme si le poids des roches lui eĂ»t broyĂ© les membres, les mains arrachĂ©es, les jambes meurtries, manquant d'air surtout, au point de sentir le sang lui crever la peau. Vaguement, dans une voie, il aperçut deux bĂÂȘtes accroupies, une petite, une grosse, qui poussaient des berlines c'Ă©taient Lydie et la Mouquette, dĂ©jĂ au travail. Et il lui restait Ă grimper la hauteur de deux tailles! La sueur l'aveuglait, il dĂ©sespĂ©rait de rattraper les autres, dont il entendait les membres agiles frĂÂŽler le roc d'un long glissement. - Courage, ça y est! dit la voix de Catherine. Mais, comme il arrivait en effet, une autre voix cria du fond de la taille - Eh bien! quoi donc? est-ce qu'on se fout du monde...? J'ai deux kilomĂštres Ă faire de Montsou, et je suis lĂ le premier! C'Ă©tait Chaval, un grand maigre de vingt-cinq ans, osseux, les traits forts, qui se fĂÂąchait d'avoir attendu. Lorsqu'il aperçut Etienne, il demanda, avec une surprise de mĂ©pris - Qu'est-ce que c'est que ça? Et, Maheu lui ayant contĂ© l'histoire, il ajouta entre les dents - Alors, les garçons mangent le pain des filles! Les deux hommes Ă©changĂšrent un regard, allumĂ© d'une de ces haines d'instinct qui flambent subitement. Etienne avait senti l'injure, sans comprendre encore. Un silence rĂ©gna, tous se mettaient au travail. C'Ă©taient enfin les veines peu Ă peu emplies, les tailles en activitĂ©, Ă chaque Ă©tage, au bout de chaque voie. Le puits dĂ©vorateur avait avalĂ© sa ration quotidienne d'hommes, prĂšs de sept cents ouvriers, qui besognaient Ă cette heure dans cette fourmiliĂšre gĂ©ante, trouant la terre de toutes parts, la criblant ainsi qu'un vieux bois piquĂ© des vers. Et, au milieu du silence lourd, de l'Ă©crasement des couches profondes, on aurait pu, l'oreille collĂ©e Ă la roche, entendre le branle de ces insectes humains en marche, depuis le vol du cĂÂąble qui montait et descendait la cage d'extraction, jusqu'Ă la morsure des outils entamant la houille, au fond des chantiers d'abattage. Etienne, en se tournant, se trouva de nouveau serrĂ© contre Catherine. Mais, cette fois, il devina les rondeurs naissantes de la gorge, il comprit tout d'un coup cette tiĂ©deur qui l'avait pĂ©nĂ©trĂ©. - Tu es donc une fille? murmura-t-il, stupĂ©fait. Elle rĂ©pondit de son air gai, sans rougeur - Mais oui... Vrai! tu y as mis le temps! I, IV Les quatre haveurs venaient de s'allonger les uns au-dessus des autres, sur toute la montĂ©e du front de taille. SĂ©parĂ©s par les planches Ă crochets qui retenaient le charbon abattu, ils occupaient chacun quatre mĂštres environ de la veine; et cette veine Ă©tait si mince, Ă©paisse Ă peine en cet endroit de cinquante centimĂštres, qu'ils se trouvaient lĂ comme aplatis entre le toit et le mur, se traĂnant des genoux et des coudes, ne pouvant se retourner sans se meurtrir les Ă©paules. Ils devaient, pour attaquer la houille, rester couchĂ©s sur le flanc, le cou tordu, les bras levĂ©s et brandissant de biais la rivelaine, le pic Ă manche court. En bas, il y avait d'abord Zacharie; Levaque et Chaval s'Ă©tageaient au-dessus; et, tout en haut enfin, Ă©tait Maheu. Chacun havait le lit de schiste, qu'il creusait Ă coups de rivelaine; puis, il pratiquait deux entailles verticales dans la couche, et il dĂ©tachait le bloc, en enfonçant un coin de fer, Ă la partie supĂ©rieure. La houille Ă©tait grasse, le bloc se brisait, roulait en morceaux le long du ventre et des cuisses. Quand ces morceaux, retenus par la planche, s'Ă©taient amassĂ©s sous eux, les haveurs disparaissaient, murĂ©s dans l'Ă©troite fente. C'Ă©tait Maheu qui souffrait le plus. En haut, la tempĂ©rature montait jusqu'Ă trente-cinq degrĂ©s, l'air ne circulait pas, l'Ă©touffement Ă la longue devenait mortel. Il avait dĂ», pour voir clair, fixer sa lampe Ă un clou, prĂšs de sa tĂÂȘte; et cette lampe, qui chauffait son crĂÂąne, achevait de lui brĂ»ler le sang. Mais son supplice s'aggravait surtout de l'humiditĂ©. La roche, au-dessus de lui, Ă quelques centimĂštres de son visage, ruisselait d'eau, de grosses gouttes continues et rapides, tombant sur une sorte de rythme entĂÂȘtĂ©, toujours Ă la mĂÂȘme place. Il avait beau tordre le cou, renverser la nuque elles battaient sa face, s'Ă©crasaient, claquaient sans relĂÂąche. Au bout d'un quart d'heure, il Ă©tait trempĂ©, couvert de sueur lui-mĂÂȘme, fumant d'une chaude buĂ©e de lessive. Ce matin-lĂ , une goutte, s'acharnant dans son oeil, le faisait jurer. Il ne voulait pas lĂÂącher son havage, il donnait de grands coups, qui le secouaient violemment entre les deux roches, ainsi qu'un puceron pris entre deux feuillets d'un livre, sous la menace d'un aplatissement complet. Pas une parole n'Ă©tait Ă©changĂ©e. Ils tapaient tous, on n'entendait que ces coups irrĂ©guliers, voilĂ©s et comme lointains. Les bruits prenaient une sonoritĂ© rauque, sans un Ă©cho dans l'air mort. Et il semblait que les tĂ©nĂšbres fussent d'un noir inconnu, Ă©paissi par les poussiĂšres volantes du charbon, alourdi par des gaz qui pesaient sur les yeux. Les mĂšches des lampes, sous leurs chapeaux de toile mĂ©tallique, n'y mettaient que des points rougeĂÂątres. On ne distinguait rien, la taille s'ouvrait, montait ainsi qu'une large cheminĂ©e, plate et oblique, oĂÂč la suie de dix hivers aurait amassĂ© une nuit profonde. Des formes spectrales s'y agitaient, les lueurs perdues laissaient entrevoir une rondeur de hanche, un bras noueux, une tĂÂȘte violente, barbouillĂ©e comme pour un crime. Parfois, en se dĂ©tachant, luisaient des blocs de houille, des pans et des arĂÂȘtes, brusquement allumĂ©s d'un reflet de cristal. Puis, tout retombait au noir, les rivelaines tapaient Ă grands coups sourds, il n'y avait plus que le halĂštement des poitrines, le grognement de gĂÂȘne et de fatigue, sous la pesanteur de l'air et la pluie des sources. Zacharie, les bras mous d'une noce de la veille, lĂÂącha vite la besogne en prĂ©textant la nĂ©cessitĂ© de boiser, ce qui lui permettait de s'oublier Ă siffler doucement, les yeux vagues dans l'ombre. DerriĂšre les haveurs, prĂšs de trois mĂštres de la veine restaient vides, sans qu'ils eussent encore pris la prĂ©caution de soutenir la roche, insoucieux du danger et avares de leur temps. - Eh! l'aristo! cria le jeune homme Ă Etienne, passe-moi des bois. Etienne, qui apprenait de Catherine Ă manoeuvrer sa pelle, dut monter des bois dans la taille. Il y en avait de la veille une petite provision. Chaque matin, d'habitude, on les descendait tout coupĂ©s sur la mesure de la couche. - DĂ©pĂÂȘche-toi donc, sacrĂ©e flemme! reprit Zacharie, en voyant le nouveau herscheur se hisser gauchement au milieu du charbon, les bras embarrassĂ©s de quatre morceaux de chĂÂȘne. Il faisait, avec son pic une entaille dans le toit, puis une autre dans le mur; et il y calait les deux bouts du bois, qui Ă©tayait ainsi la roche. L'aprĂšs-midi, les ouvriers de la coupe Ă terre prenaient les dĂ©blais laissĂ©s au fond de la galerie par les haveurs, et remblayaient les tranchĂ©es exploitĂ©es de la veine, oĂÂč ils noyaient les bois, en ne mĂ©nageant que la voie infĂ©rieure et la voie supĂ©rieure, pour le roulage. Maheu cessa de geindre. Enfin, il avait dĂ©tachĂ© son bloc. Il essuya sur sa manche son visage ruisselant, il s'inquiĂ©ta de ce que Zacharie Ă©tait montĂ© faire derriĂšre lui. - Laisse donc ça, dit-il. Nous verrons aprĂšs dĂ©jeuner... Vaut mieux abattre, si nous voulons avoir notre compte de berlines. - C'est que, rĂ©pondit le jeune homme, ça baisse. Regarde, il y a une gerçure. J'ai peur que ça n'Ă©boule. Mais le pĂšre haussa les Ă©paules. Ah! ouiche! Ă©bouler! Et puis, ce ne serait pas la premiĂšre fois, on s'en tirerait tout de mĂÂȘme. Il finit par se fĂÂącher, il renvoya son fils au front de taille. Tous, du reste, se dĂ©tiraient. Levaque, restĂ© sur le dos, jurait en examinant son pouce gauche, que la chute d'un grĂšs venait d'Ă©corcher au sang. Chaval, furieusement, enlevait sa chemise, se mettait le torse nu, pour avoir moins chaud. Ils Ă©taient dĂ©jĂ noirs de charbon, enduits d'une poussiĂšre fine que la sueur dĂ©layait, faisait couler en ruisseaux et en mares. Et Maheu recommença le premier Ă taper, plus bas, la tĂÂȘte au ras de la roche. Maintenant, la goutte lui tombait sur le front, si obstinĂ©e, qu'il croyait la sentir lui percer d'un trou les os du crĂÂąne. - Il ne faut pas faire attention, expliquait Catherine Ă Etienne. Ils gueulent toujours. Et elle reprit sa leçon, en fille obligeante. Chaque berline chargĂ©e arrivait au jour telle qu'elle partait de la taille, marquĂ©e d'un jeton spĂ©cial pour que le receveur pĂ»t la mettre au compte du chantier. Aussi devait-on avoir grand soin de l'emplir et de ne prendre que le charbon propre autrement, elle Ă©tait refusĂ©e Ă la recette. Le jeune homme, dont les yeux s'habituaient Ă l'obscuritĂ©, la regardait, blanche encore, avec son teint de chlorose; et il n'aurait pu dire son ĂÂąge, il lui donnait douze ans, tellement elle lui semblait frĂÂȘle. Pourtant, il la sentait plus vieille, d'une libertĂ© de garçon, d'une effronterie naĂÂŻve, qui le gĂÂȘnait un peu elle ne lui plaisait pas, il trouvait trop gamine sa tĂÂȘte blafarde de Pierrot, serrĂ©e aux tempes par le bĂ©guin. Mais ce qui l'Ă©tonnait, c'Ă©tait la force de cette enfant, une force nerveuse oĂÂč il entrait beaucoup d'adresse. Elle emplissait sa berline plus vite que lui, Ă petits coups de pelle rĂ©guliers et rapides; elle la poussait ensuite jusqu'au plan inclinĂ©, d'une seule poussĂ©e lente, sans accrocs, passant Ă l'aise sous les roches basses. Lui, se massacrait, dĂ©raillait, restait en dĂ©tresse. A la vĂ©ritĂ©, ce n'Ă©tait point un chemin commode. Il y avait une soixantaine de mĂštres, de la taille au plan inclinĂ©; et la voie, que les mineurs de la coupe Ă terre n'avaient pas encore Ă©largie, Ă©tait un vĂ©ritable boyau, de toit trĂšs inĂ©gal, renflĂ© de continuelles bosses Ă certaines places, la berline chargĂ©e passait tout juste, le herscheur devait s'aplatir, pousser sur les genoux, pour ne pas se fendre la tĂÂȘte. D'ailleurs, les bois pliaient et cassaient dĂ©jĂ . On les voyait, rompus au milieu, en longues dĂ©chirures pĂÂąles, ainsi que des bĂ©quilles trop faibles. Il fallait prendre garde de s'Ă©corcher Ă ces cassures; et, sous le lent Ă©crasement qui faisait Ă©clater des rondins de chĂÂȘne gros comme la cuisse, on se coulait Ă plat ventre, avec la sourde inquiĂ©tude d'entendre brusquement craquer son dos. - Encore! dit Catherine en riant. La berline d'Etienne venait de dĂ©railler, au passage le plus difficile. Il n'arrivait point Ă rouler droit, sur ces rails qui se faussaient dans la terre humide; et il jurait, il s'emportait, se battait rageusement avec les roues, qu'il ne pouvait, malgrĂ© des efforts exagĂ©rĂ©s, remettre en place. - Attends donc, reprit la jeune fille. Si tu te fĂÂąches, jamais ça ne marchera. Adroitement, elle s'Ă©tait glissĂ©e, avait enfoncĂ© Ă reculons le derriĂšre sous la berline; et, d'une pesĂ©e des reins, elle la soulevait et la replaçait. Le poids Ă©tait de sept cents kilogrammes. Lui, surpris, honteux, bĂ©gayait des excuses. Il fallut qu'elle lui montrĂÂąt Ă Ă©carter les jambes, Ă s'arc-bouter les pieds contre les bois, des deux cĂÂŽtĂ©s de la galerie, pour se donner des points d'appui solides. Le corps devait ĂÂȘtre penchĂ©, les bras raidis, de façon Ă pousser de tous les muscles, des Ă©paules et des hanches. Pendant un voyage, il la suivit, la regarda filer, la croupe tendue, les poings si bas, qu'elle semblait trotter Ă quatre pattes, ainsi qu'une de ces bĂÂȘtes naines qui travaillent dans les cirques. Elle suait, haletait, craquait des jointures, mais sans une plainte, avec l'indiffĂ©rence de l'habitude, comme si la commune misĂšre Ă©tait pour tous de vivre ainsi ployĂ©. Et il ne parvenait pas Ă en faire autant, ses souliers le gĂÂȘnaient, son corps se brisait, Ă marcher de la sorte, la tĂÂȘte basse. Au bout de quelques minutes, cette position devenait un supplice, une angoisse intolĂ©rable, si pĂ©nible, qu'il se mettait un instant Ă genoux, pour se redresser et respirer. Puis, au plan inclinĂ©, c'Ă©tait une corvĂ©e nouvelle. Elle lui apprit Ă emballer vivement sa berline. En haut et en bas de ce plan, qui desservait toutes les tailles, d'un accrochage Ă un autre, se trouvait un galibot, le freineur en haut, le receveur en bas. Ces vauriens de douze Ă quinze ans se criaient des mots abominables; et, pour les avertir, il fallait en hurler de plus violents. Alors, dĂšs qu'il y avait une berline vide Ă remonter, le receveur donnait le signal, la herscheuse emballait sa berline pleine, dont le poids faisait monter l'autre, quand le freineur desserrait son frein. En bas, dans la galerie du fond, se formaient les trains que les chevaux roulaient jusqu'au puits. - OhĂ©! sacrĂ©es rosses! criait Catherine dans le plan, entiĂšrement boisĂ©, long d'une centaine de mĂštres, qui rĂ©sonnait comme un porte-voix gigantesque. Les galibots devaient se reposer, car ils ne rĂ©pondaient ni l'un ni l'autre. A tous les Ă©tages, le roulage s'arrĂÂȘta. Une voix grĂÂȘle de fillette finit par dire - Y en a un sur la Mouquette, bien sĂ»r! Des rires Ă©normes grondĂšrent, les herscheuses de toute la veine se tenaient le ventre. - Qui est-ce? demanda Etienne Ă Catherine. Cette derniĂšre lui nomma la petite Lydie, une galopine qui en savait plus long et qui poussait sa berline aussi raide qu'une femme, malgrĂ© ses bras de poupĂ©e. Quant Ă la Mouquette, elle Ă©tait bien capable d'ĂÂȘtre avec les deux galibots Ă la fois. Mais la voix du receveur monta, criant d'emballer. Sans doute, un porion passait en bas. Le roulage reprit aux neuf Ă©tages, on n'entendit plus que les appels rĂ©guliers des galibots et que l'Ă©brouement des herscheuses arrivant au plan, fumantes comme des juments trop chargĂ©es. C'Ă©tait le coup de la bestialitĂ© qui soufflait dans la fosse, le dĂ©sir subit du mĂÂąle, lorsqu'un mineur rencontrait une de ces filles Ă quatre pattes, les reins en l'air, crevant de ses hanches sa culotte de garçon. Et, Ă chaque voyage, Etienne retrouvait au fond l'Ă©touffement de la taille, la cadence sourde et brisĂ©e des rivelaines, les grands soupirs douloureux des haveurs s'obstinant Ă leur besogne. Tous les quatre s'Ă©taient mis nus, confondus dans la houille, trempĂ©s d'une boue noire jusqu'au bĂ©guin. Un moment, il avait fallu dĂ©gager Maheu qui rĂÂąlait, ĂÂŽter les planches pour faire glisser le charbon sur la voie. Zacharie et Levaque s'emportaient contre la veine, qui devenait dure, disaient-ils, ce qui allait rendre les conditions de leur marchandage dĂ©sastreuses. Chaval se tournait, restait un instant sur le dos, Ă injurier Etienne, dont la prĂ©sence, dĂ©cidĂ©ment, l'exaspĂ©rait. - EspĂšce de couleuvre! ça n'a pas la force d'une fille!... Et veux-tu remplir ta berline! Hein? c'est pour mĂ©nager tes bras... Nom de Dieu! je te retiens les dix sous, si tu nous en fais refuser une! Le jeune homme Ă©vitait de rĂ©pondre, trop heureux jusque-lĂ d'avoir trouvĂ© ce travail de bagne, acceptant la brutale hiĂ©rarchie du manoeuvre et du maĂtre ouvrier. Mais il n'allait plus, les pieds en sang, les membres tordus de crampes atroces, le tronc serrĂ© dans une ceinture de fer. Heureusement, il Ă©tait dix heures, le chantier se dĂ©cida Ă dĂ©jeuner. Maheu avait une montre qu'il ne regarda mĂÂȘme pas. Au fond de cette nuit sans astres, jamais il ne se trompait de cinq minutes. Tous remirent leur chemise et leur veste. Puis, descendus de la taille, ils s'accroupirent, les coudes aux flancs, les fesses sur leurs talons, dans cette posture si habituelle aux mineurs, qu'ils la gardent mĂÂȘme hors de la mine, sans Ă©prouver le besoin d'un pavĂ© ou d'une poutre pour s'asseoir. Et chacun, ayant sorti son briquet, mordait gravement Ă l'Ă©paisse tranche, en lĂÂąchant de rares paroles sur le travail de la matinĂ©e. Catherine, demeurĂ©e debout, finit par rejoindre Etienne, qui s'Ă©tait allongĂ© plus loin, en travers des rails, le dos contre les bois. Il y avait lĂ une place Ă peu prĂšs sĂšche. - Tu ne manges pas? demanda-t-elle, la bouche pleine, son briquet Ă la main. Puis, elle se rappela ce garçon errant dans la nuit, sans un sou, sans un morceau de pain peut-ĂÂȘtre. - Veux-tu partager avec moi? Et, comme il refusait, en jurant qu'il n'avait pas faim, la voix tremblante du dĂ©chirement de son estomac, elle continua gaiement - Ah! si tu es dĂ©goĂ»tĂ©!... Mais, tiens! je n'ai mordu que de ce cĂÂŽtĂ©-ci, je vais te donner celui-lĂ . DĂ©jĂ , elle avait rompu les tartines en deux. Le jeune homme, prenant sa moitiĂ©, se retint pour ne pas la dĂ©vorer d'un coup; et il posait les bras sur ses cuisses, afin qu'elle n'en vĂt point le frĂ©missement. De son air tranquille de bon camarade, elle venait de se coucher prĂšs de lui, Ă plat ventre, le menton dans une main, mangeant de l'autre avec lenteur. Leurs lampes, entre eux, les Ă©clairaient. Catherine le regarda un moment en silence. Elle devait le trouver joli, avec son visage fin et ses moustaches noires. Vaguement, elle souriait de plaisir. - Alors, tu es machineur, et on t'a renvoyĂ© de ton chemin de fer... Pourquoi? - Parce que j'avais giflĂ© mon chef. Elle demeura stupĂ©faite, bouleversĂ©e dans ses idĂ©es hĂ©rĂ©ditaires de subordination, d'obĂ©issance passive. - Je dois dire que j'avais bu, continua-t-il, et quand je bois, cela me rend fou, je me mangerais et je mangerais les autres... Oui, je ne peux pas avaler deux petits verres, sans avoir le besoin de manger un homme... Ensuite, je suis malade pendant deux jours. - Il ne faut pas boire, dit-elle sĂ©rieusement. - Ah! n'aie pas peur, je me connais! Et il hochait la tĂÂȘte, il avait une haine de l'eau-de-vie, la haine du dernier enfant d'une race d'ivrognes, qui souffrait dans sa chair de toute cette ascendance trempĂ©e et dĂ©traquĂ©e d'alcool, au point que la moindre goutte en Ă©tait devenue pour lui un poison. - C'est Ă cause de maman que ça m'ennuie d'avoir Ă©tĂ© mis Ă la rue, dit-il aprĂšs avoir avalĂ© une bouchĂ©e. Maman n'est pas heureuse, et je lui envoyais de temps Ă autre une piĂšce de cent sous. - OĂÂč est-elle donc, ta mĂšre? - A Paris... Blanchisseuse, rue de la Goutte-d'Or. Il y eut un silence. Quand il pensait Ă ces choses, un vacillement pĂÂąlissait ses yeux noirs, la courte angoisse de la lĂ©sion dont il couvait l'inconnu, dans sa belle santĂ© de jeunesse. Un instant, il resta les regards noyĂ©s au fond des tĂ©nĂšbres de la mine; et, Ă cette profondeur, sous le poids et l'Ă©touffement de la terre, il revoyait son enfance, sa mĂšre jolie encore et vaillante, lĂÂąchĂ©e par son pĂšre, puis reprise aprĂšs s'ĂÂȘtre mariĂ©e Ă un autre, vivant entre les deux hommes qui la mangeaient, roulant avec eux au ruisseau, dans le vin, dans l'ordure. C'Ă©tait lĂ -bas, il se rappelait la rue, des dĂ©tails lui revenaient le linge sale au milieu de la boutique, et des ivresses qui empuantissaient la maison, et des gifles Ă casser les mĂÂąchoires. - Maintenant, reprit-il d'une voix lente, ce n'est pas avec trente sous que je pourrai lui faire, des cadeaux... Elle va crever de misĂšre, c'est sĂ»r. Il eut un haussement d'Ă©paules dĂ©sespĂ©rĂ©, il mordit de nouveau dans sa tartine. - Veux-tu boire? demanda Catherine qui dĂ©bouchait sa gourde. Oh! c'est du cafĂ©, ça ne te fera pas de mal... On Ă©touffe, quand on avale comme ça. Mais il refusa c'Ă©tait bien assez de lui avoir pris la moitiĂ© de son pain. Pourtant, elle insistait d'un air de bon coeur, elle finit par dire - Eh bien! je bois avant toi, puisque tu es si poli... Seulement, tu ne peux plus refuser Ă prĂ©sent, ce serait vilain. Et elle lui tendit sa gourde. Elle s'Ă©tait relevĂ©e sur les genoux, il la voyait tout prĂšs de lui, Ă©clairĂ©e par les deux lampes. Pourquoi donc l'avait-il trouvĂ©e laide? Maintenant qu'elle Ă©tait noire, la face poudrĂ©e de charbon fin, elle lui semblait d'un charme singulier. Dans ce visage envahi d'ombre, les dents de la bouche trop grande Ă©clataient de blancheur, les yeux s'Ă©largissaient, luisaient avec un reflet verdĂÂątre, pareils Ă des yeux de chatte. Une mĂšche des cheveux roux, qui s'Ă©tait Ă©chappĂ©e du bĂ©guin, lui chatouillait l'oreille et la faisait rire. Elle ne paraissait plus si jeune, elle pouvait bien avoir quatorze ans tout de mĂÂȘme. - Pour te faire plaisir, dit-il, en buvant et en lui rendant la gourde. Elle avala une seconde gorgĂ©e, le força Ă en prendre une aussi, voulant partager, disait-elle; et ce goulot mince, qui allait d'une bouche Ă l'autre, les amusait. Lui, brusquement, s'Ă©tait demandĂ© s'il ne devait pas la saisir dans ses bras, pour la baiser sur les lĂšvres. Elle avait de grosses lĂšvres d'un rose pĂÂąle, avivĂ©es par le charbon, qui le tourmentaient d'une envie croissante. Mais il n'osait pas, intimidĂ© devant elle, n'ayant eu Ă Lille que des filles, et de l'espĂšce la plus basse, ignorant comment on devait s'y prendre avec une ouvriĂšre encore dans sa famille. - Tu dois avoir quatorze ans alors? demanda-t-il, aprĂšs s'ĂÂȘtre remis Ă son pain. Elle s'Ă©tonna, se fĂÂącha presque. - Comment! quatorze! mais j'en ai quinze!... C'est vrai, je ne suis pas grosse. Les filles, chez nous, ne poussent guĂšre vite. Il continua Ă la questionner, elle disait tout, sans effronterie ni honte. Du reste, elle n'ignorait rien de l'homme ni de la femme, bien qu'il la sentĂt vierge de corps, et vierge enfant, retardĂ©e dans la maturitĂ© de son sexe par le milieu de mauvais air et de fatigue oĂÂč elle vivait. Quand il revint sur la Mouquette, pour l'embarrasser, elle conta des histoires Ă©pouvantables, la voix paisible, trĂšs Ă©gayĂ©e. Ah! celle-lĂ en faisait de belles! Et, comme il dĂ©sirait savoir si elle-mĂÂȘme n'avait pas d'amoureux, elle rĂ©pondit en plaisantant qu'elle ne voulait pas contrarier sa mĂšre, mais que cela arriverait forcĂ©ment un jour. Ses Ă©paules s'Ă©taient courbĂ©es, elle grelottait un peu dans le froid de ses vĂÂȘtements trempĂ©s de sueur, la mine rĂ©signĂ©e et douce, prĂÂȘte Ă subir les choses et les hommes. - C'est qu'on en trouve, des amoureux, quand on vit tous ensemble, n'est-ce pas? - Bien sĂ»r. - Et puis, ça ne fait du mal Ă personne... On ne dit rien au curĂ©. - Oh! le curĂ©, je m'en fiche!... Mais il y a l'Homme noir. - Comment, l'Homme noir? - Le vieux mineur qui revient dans la fosse et qui tord le cou aux vilaines filles. Il la regardait, craignant qu'elle ne se moquĂÂąt de lui. - Tu crois Ă ces bĂÂȘtises, tu ne sais donc rien? - Si fait, moi, je sais lire et Ă©crire... Ca rend service chez nous, car du temps de papa et de maman, on n'apprenait pas. Elle Ă©tait dĂ©cidĂ©ment trĂšs gentille. Quand elle aurait fini sa tartine, il la prendrait et la baiserait sur ses grosses lĂšvres roses. C'Ă©tait une rĂ©solution de timide, une pensĂ©e de violence qui Ă©tranglait sa voix. Ces vĂÂȘtements de garçon, cette veste et cette culotte sur cette chair de fille, l'excitaient et le gĂÂȘnaient. Lui, avait avalĂ© sa derniĂšre bouchĂ©e. Il but Ă la gourde, la lui rendit pour qu'elle la vidĂÂąt. Maintenant, le moment d'agir Ă©tait venu, et il jetait un coup d'oeil inquiet vers les mineurs, au fond, lorsqu'une ombre boucha la galerie. Depuis un instant, Chaval, debout, les regardait de loin. Il s'avança, s'assura que Maheu ne pouvait le voir; et, comme Catherine Ă©tait restĂ©e Ă terre, sur son sĂ©ant, il l'empoigna par les Ă©paules, lui renversa la tĂÂȘte, lui Ă©crasa la bouche sous un baiser brutal, tranquillement, en affectant de ne pas se prĂ©occuper d'Etienne. Il y avait, dans ce baiser, une prise de possession, une sorte de dĂ©cision jalouse. Cependant, la jeune fille s'Ă©tait rĂ©voltĂ©e. - Laisse-moi, entends-tu! Il lui maintenait la tĂÂȘte, il la regardait au fond des yeux. Ses moustaches et sa barbiche rouges flambaient dans son visage noir, au grand nez en bec d'aigle. Et il la lĂÂącha enfin, et il s'en alla, sans dire un mot. Un frisson avait glacĂ© Etienne. C'Ă©tait stupide d'avoir attendu. Certes, non, Ă prĂ©sent, il ne l'embrasserait pas, car elle croirait peut-ĂÂȘtre qu'il voulait faire comme l'autre. Dans sa vanitĂ© blessĂ©e, il Ă©prouvait un vĂ©ritable dĂ©sespoir. - Pourquoi as-tu menti? dit-il Ă voix basse. C'est ton amoureux. - Mais non, je te jure! cria-t-elle. Il n'y a pas ça entre nous. Des fois, il veut rire... MĂÂȘme qu'il n'est pas d'ici, voilĂ six mois qu'il est arrivĂ© du Pas-de-Calais. Tous deux s'Ă©taient levĂ©s, on allait se remettre au travail. Quand elle le vit si froid, elle parut chagrine. Sans doute, elle le trouvait plus joli que l'autre, elle l'aurait prĂ©fĂ©rĂ© peut-ĂÂȘtre. L'idĂ©e d'une amabilitĂ©, d'une consolation la tracassait; et, comme le jeune homme, Ă©tonnĂ©, examinait sa lampe qui brĂ»lait bleue, avec une large collerette pale, elle tenta au moins de le distraire. - Viens, que je te montre quelque chose, murmura-t-elle d'un air de bonne amitiĂ©. Lorsqu'elle l'eut menĂ© au fond de la taille, elle lui fit remarquer une crevasse, dans la houille. Un lĂ©ger bouillonnement s'en Ă©chappait, un petit bruit, pareil Ă un sifflement d'oiseau. - Mets ta main, tu sens le vent... C'est du grisou. Il resta surpris. Ce n'Ă©tait que ça, cette terrible chose qui faisait tout sauter? Elle riait, elle disait qu'il y en avait beaucoup ce jour-lĂ , pour que la flamme des lampes fĂ»t si bleue. - Quand vous aurez fini de bavarder, fainĂ©ants! cria la rude voix de Maheu. Catherine et Etienne se hĂÂątĂšrent de remplir leurs berlines et les poussĂšrent au plan inclinĂ©, l'Ă©chine raidie, rampant sous le toit bossuĂ© de la voie. DĂšs le second voyage, la sueur les inondait et leurs os craquaient de nouveau. Dans la taille, le travail des haveurs avait repris. Souvent, ils abrĂ©geaient le dĂ©jeuner, pour ne pas se refroidir; et leurs briquets, mangĂ©s aussi loin du soleil, avec une voracitĂ© muette, leur chargeaient de plomb l'estomac. AllongĂ©s sur le flanc, ils tapaient plus fort, ils n'avaient que l'idĂ©e fixe de complĂ©ter un gros nombre de berlines. Tout disparaissait dans cette rage du gain disputĂ© si rudement. Ils cessaient de sentir l'eau qui ruisselait et enflait leurs membres, les crampes des attitudes forcĂ©es, l'Ă©touffement des tĂ©nĂšbres, oĂÂč ils blĂÂȘmissaient ainsi que des plantes mises en cave. Pourtant, Ă mesure que la journĂ©e s'avançait, l'air s'empoisonnait davantage, se chauffait de la fumĂ©e des lampes, de la pestilence des haleines, de l'asphyxie du grisou, gĂÂȘnant sur les yeux comme des toiles d'araignĂ©e, et que devait seul balayer l'aĂ©rage de la nuit. Eux, au fond de leur trou de taupe, sous le poids de la terre, n'ayant plus de souffle dans leurs poitrines embrasĂ©es, tapaient toujours. I, V Maheu, sans regarder Ă sa montre laissĂ©e dans sa veste, s'arrĂÂȘta et dit - BientĂÂŽt une heure... Zacharie, est-ce fait? Le jeune homme boisait depuis un instant. Au milieu de sa besogne, il Ă©tait restĂ© sur le dos, les yeux vagues, rĂÂȘvassant aux parties de crosse qu'il avait faites la veille. Il s'Ă©veilla, il rĂ©pondit - Oui, ça suffira, on verra demain. Et il retourna prendre sa place Ă la taille. Levaque et Chaval, eux aussi, lĂÂąchaient la rivelaine. Il y eut un repos. Tous s'essuyaient le visage sur leurs bras nus, en regardant la roche du toit, dont les masses schisteuses se fendillaient. Ils ne causaient guĂšre que de leur travail. - Encore une chance, murmura Chaval, d'ĂÂȘtre tombĂ© sur des terres qui dĂ©boulent!... Ils n'ont pas tenu compte de ça, dans le marchandage. - Des filous! grogna Levaque. Ils ne cherchent qu'Ă nous foutre dedans. Zacharie se mit Ă rire. Il se fichait du travail et du reste, mais ça l'amusait d'entendre empoigner la Compagnie. De son air placide, Maheu expliqua que la nature des terrains changeait tous les vingt mĂštres. Il fallait ĂÂȘtre juste, on ne pouvait rien prĂ©voir. Puis, les deux autres continuant Ă dĂ©blatĂ©rer contre les chefs, il devint inquiet, il regarda autour de lui. - Chut! en voilĂ assez! - Tu as raison, dit Levaque, qui baissa Ă©galement la voix. C'est malsain. Une obsession des mouchards les hantait, mĂÂȘme Ă cette profondeur, comme si la houille des actionnaires, encore dans la veine, avait eu des oreilles. - N'empĂÂȘche, ajouta trĂšs haut Chaval d'un air de dĂ©fi, que si ce cochon de Dansaert me parle sur le ton de l'autre jour, je lui colle une brique dans le ventre... Je ne l'empĂÂȘche pas, moi, de se payer les blondes qui ont la peau fine. Cette fois, Zacharie Ă©clata. Les amours du maĂtre-porion et de la Pierronne Ă©taient la continuelle plaisanterie de la fosse. Catherine elle-mĂÂȘme, appuyĂ©e sur sa pelle, en bas de la taille, se tint les cĂÂŽtes et mit d'une phrase Etienne au courant; tandis que Maheu se fĂÂąchait, pris d'une peur qu'il ne cachait plus. - Hein? tu vas te taire!... Attends d'ĂÂȘtre tout seul, si tu veux qu'il t'arrive du mal. Il parlait encore, lorsqu'un bruit de pas vint de la galerie supĂ©rieure. Presque aussitĂÂŽt, l'ingĂ©nieur de la fosse, le petit NĂ©grel, comme les ouvriers le nommaient entre eux, parut en haut de la taille, accompagnĂ© de Dansaert, le maĂtre-porion. - Quand je le disais! murmura Maheu. Il y en a toujours lĂ , qui sortent de la terre. Paul NĂ©grel, neveu de M. Hennebeau, Ă©tait un garçon de vingt-six ans, mince et joli, avec des cheveux frisĂ©s et des moustaches brunes. Son nez pointu, ses yeux vifs, lui donnaient un air de furet aimable, d'une intelligence sceptique, qui se changeait en une autoritĂ© cassante, dans ses rapports avec les ouvriers. Il Ă©tait vĂÂȘtu comme eux, barbouillĂ© comme eux de charbon; et, pour les rĂ©duire au respect, il montrait un courage Ă se casser les os, passant par les endroits les plus difficiles, toujours le premier sous les Ă©boulements et dans les coups de grisou. - Nous y sommes, n'est-ce pas? Dansaert, demanda-t-il. Le maĂtre-porion, un Belge Ă face Ă©paisse, au gros nez sensuel, rĂ©pondit avec une politesse exagĂ©rĂ©e - Oui, monsieur NĂ©grel... Voici l'homme qu'on a embauchĂ© ce matin. Tous deux s'Ă©taient laissĂ©s glisser au milieu de la taille. On fit monter Etienne. L'ingĂ©nieur leva sa lampe, le regarda, sans le questionner. - C'est bon, dit-il enfin. Je n'aime guĂšre qu'on ramasse des inconnus sur les routes... Surtout, ne recommencez pas. Et il n'Ă©couta point les explications qu'on lui donnait, les nĂ©cessitĂ©s du travail, le dĂ©sir de remplacer les femmes par des garçons, pour le roulage. Il s'Ă©tait mis Ă Ă©tudier le toit, pendant que les haveurs reprenaient leurs rivelaines. Tout d'un coup, il s'Ă©cria - Dites donc, Maheu, est-ce que vous vous fichez du monde!... Vous allez tous y rester, nom d'un chien! - Oh! c'est solide, rĂ©pondit tranquillement l'ouvrier. - Comment! solide!... Mais la roche tasse dĂ©jĂ , et vous plantez des bois Ă plus de deux mĂštres, d'un air de regret! Ah! vous ĂÂȘtes bien tous les mĂÂȘmes, vous vous laisseriez aplatir le crĂÂąne, plutĂÂŽt que de lĂÂącher la veine, pour mettre au boisage le temps voulu!... Je vous prie de m'Ă©tayer ça sur-le-champ. Doublez les bois, entendez-vous! Et, devant le mauvais vouloir des mineurs qui discutaient, en disant qu'ils Ă©taient bons juges de leur sĂ©curitĂ©, il s'emporta. - Allons donc! quand vous aurez la tĂÂȘte broyĂ©e, est-ce que c'est vous qui en supporterez les consĂ©quences? Pas du tout! ce sera la Compagnie, qui devra vous faire des pensions, Ă vous ou Ă vos femmes... Je vous rĂ©pĂšte qu'on vous connaĂt pour avoir deux berlines de plus le soir, vous donneriez vos peaux. Maheu, malgrĂ© la colĂšre dont il Ă©tait peu Ă peu gagnĂ©, dit encore posĂ©ment - Si l'on nous payait assez, nous boiserions mieux. L'ingĂ©nieur haussa les Ă©paules, sans rĂ©pondre. Il avait achevĂ© de descendre le long de la taille, il conclut seulement d'en bas - Il vous reste une heure, mettez-vous tous Ă la besogne; et je vous avertis que le chantier a trois francs d'amende. Un sourd grognement des haveurs accueillit ces paroles. La force de la hiĂ©rarchie les retenait seule, cette hiĂ©rarchie militaire qui, du galibot au maĂtre-porion, les courbait les uns sous les autres. Chaval et Levaque pourtant eurent un geste furieux, tandis que Maheu les modĂ©rait du regard et que Zacharie haussait gouailleusement les Ă©paules. Mais Etienne Ă©tait peut-ĂÂȘtre le plus frĂ©missant. Depuis qu'il se trouvait au fond de cet enfer, une rĂ©volte lente le soulevait. Il regarda Catherine rĂ©signĂ©e, l'Ă©chine basse. Etait-ce possible qu'on se tuĂÂąt Ă une si dure besogne dans ces tĂ©nĂšbres mortelles, et qu'on n'y gagnĂÂąt mĂÂȘme pas les quelques sous du pain quotidien? Cependant NĂ©grel s'en allait avec Dansaert, qui s'Ă©tait contentĂ© d'approuver d'un mouvement continu de la tĂÂȘte. Et leurs voix, de nouveau, s'Ă©levĂšrent ils venaient de s'arrĂÂȘter encore, ils examinaient le boisage de la galerie, dont les haveurs avaient l'entretien sur une longueur de dix mĂštres, en arriĂšre de la taille. - Quand je vous dis qu'ils se fichent du monde! criait l'ingĂ©nieur. Et vous, nom d'un chien! vous ne surveillez donc pas? - Mais si, mais si, balbutiait le maĂtre-porion. On est las de leur rĂ©pĂ©ter les choses. NĂ©grel appela violemment - Maheu! Maheu! Tous descendirent. Il continuait - Voyez ça, est-ce que ça tient?... C'est bĂÂąti comme quatre sous. VoilĂ un chapeau que les moutons ne portent dĂ©jĂ plus, tellement on l'a posĂ© Ă la hĂÂąte... Pardi! je comprends que le raccommodage nous coĂ»te si cher. N'est-ce pas? Pourvu que ça dure tant que vous en avez la responsabilitĂ©! Et puis tout casse, et la Compagnie est forcĂ©e d'avoir une armĂ©e de raccommodeurs... Regardez un peu lĂ -bas, c'est un vrai massacre. Chaval voulut parler, mais il le fit taire. - Non, je sais ce que vous allez dire encore. Qu'on vous paie davantage, hein? Eh bien! je vous prĂ©viens que vous forcerez la Direction Ă faire une chose oui, on vous paiera le boisage Ă part, et l'on rĂ©duira proportionnellement le prix de la berline. Nous verrons si vous y gagnerez... En attendant, reboisez-moi ça tout de suite. Je passerai demain. Et, dans le saisissement causĂ© par sa menace, il s'Ă©loigna. Dansaert, si humble devant lui, resta en arriĂšre quelques secondes, pour dire brutalement aux ouvriers - Vous me faites empoigner, vous autres... Ce n'est pas trois francs d'amende que je vous flanquerai, moi! Prenez garde! Alors, quand il fut parti, Maheu Ă©clata Ă son tour. - Nom de Dieu! ce qui n'est pas juste n'est pas juste. Moi, j'aime qu'on soit calme, parce que c'est la seule façon de s'entendre; mais, Ă la fin, ils vous rendraient enragĂ©s... Avez-vous entendu? La berline baissĂ©e, et le boisage Ă part! encore une façon de nous payer moins!... Nom de Dieu de nom de Dieu! Il cherchait quelqu'un sur qui tomber, lorsqu'il aperçut Catherine et Etienne, les bras ballants. - Voulez-vous bien me donner des bois! Est-ce que ça vous regarde?... Je vas vous allonger mon pied quelque part. Etienne alla se charger, sans rancune de cette rudesse, si furieux lui-mĂÂȘme contre les chefs, qu'il trouvait les mineurs trop bons enfants. Du reste, Levaque et Chaval s'Ă©taient soulagĂ©s en gros mots. Tous, mĂÂȘme Zacharie, boisaient rageusement. Pendant prĂšs d'une demi-heure, on n'entendit que le craquement des bois, calĂ©s Ă coups de masse. Ils n'ouvraient plus la bouche, ils soufflaient, s'exaspĂ©raient contre la roche, qu'ils auraient bousculĂ©e et remontĂ©e d'un renfoncement d'Ă©paules, s'ils l'avaient pu. - En voilĂ assez! dit enfin Maheu, brisĂ© de colĂšre et de fatigue. Une heure et demie... Ah! une propre journĂ©e, nous n'aurons pas cinquante sous!... Je m'en vais, ça me dĂ©goĂ»te. Bien qu'il y eĂ»t encore une demi-heure de travail, il se rhabilla. Les autres l'imitĂšrent. La vue seule de la taille les jetait hors d'eux. Comme la herscheuse s'Ă©tait remise au roulage, ils l'appelĂšrent en s'irritant de son zĂšle si le charbon avait des pieds, il sortirait tout seul. Et les six, leurs outils sous le bras, partirent, ayant Ă refaire les deux kilomĂštres, retournant au puits par la route du matin. Dans la cheminĂ©e, Catherine et Etienne s'attardĂšrent, tandis que les haveurs glissaient jusqu'en bas. C'Ă©tait une rencontre, la petite Lydie, arrĂÂȘtĂ©e au milieu d'une voie pour les laisser passer, et qui leur racontait une disparition de la Mouquette, prise d'un tel saignement de nez, que depuis une heure elle Ă©tait allĂ©e se tremper la figure quelque part, on ne savait pas oĂÂč. Puis, quand ils la quittĂšrent, l'enfant poussa de nouveau sa berline, Ă©reintĂ©e, boueuse, raidissant ses bras et ses jambes d'insecte, pareille Ă une maigre fourmi noire en lutte contre un fardeau trop lourd. Eux, dĂ©valaient sur le dos, aplatissaient leurs Ă©paules, de peur de s'arracher la peau du front; et ils filaient si raide, le long de la roche polie par tous les derriĂšres des chantiers, qu'ils devaient, de temps Ă autre, se retenir aux bois, pour que leurs fesses ne prissent pas feu, disaient-ils en plaisantant. En bas, ils se trouvĂšrent seuls. Des Ă©toiles rouges disparaissaient au loin, Ă un coude de la galerie. Leur gaietĂ© tomba, ils se mirent en marche d'un pas lourd de fatigue, elle devant, lui derriĂšre. Les lampes charbonnaient, il la voyait Ă peine, noyĂ©e d'une sorte de brouillard fumeux; et l'idĂ©e qu'elle Ă©tait une fille lui causait un malaise, parce qu'il se sentait bĂÂȘte de ne pas l'embrasser, et que le souvenir de l'autre l'en empĂÂȘchait. AssurĂ©ment, elle lui avait menti l'autre Ă©tait son amant, ils couchaient ensemble sur tous les tas d'escaillage, car elle avait dĂ©jĂ le dĂ©hanchement d'une gueuse. Sans raison, il la boudait, comme si elle l'eĂ»t trompĂ©. Elle pourtant, Ă chaque minute, se tournait, l'avertissait d'un obstacle, semblait l'inviter Ă ĂÂȘtre aimable. On Ă©tait si perdu, on aurait si bien pu rire en bons amis! Enfin, ils dĂ©bouchĂšrent dans la galerie de roulage, ce fut pour lui un soulagement Ă l'indĂ©cision dont il souffrait; tandis qu'elle, une derniĂšre fois, eut un regard attristĂ©, le regret d'un bonheur qu'ils ne retrouveraient plus. Maintenant, autour d'eux, la vie souterraine grondait, avec le continuel passage des porions, le va-et-vient des trains, emportĂ©s au trot des chevaux. Sans cesse, des lampes Ă©toilaient la nuit. Ils devaient s'effacer contre la roche, laisser la voie Ă des ombres d'hommes et de bĂÂȘtes, dont ils recevaient l'haleine au visage. Jeanlin, courant pieds nus derriĂšre son train, leur cria une mĂ©chancetĂ© qu'ils n'entendirent pas, dans le tonnerre des roues. Ils allaient toujours, elle silencieuse Ă prĂ©sent, lui ne reconnaissant pas les carrefours ni les rues du matin, s'imaginant qu'elle le perdait de plus en plus sous la terre; et ce dont il souffrait surtout, c'Ă©tait du froid, un froid grandissant qui l'avait pris au sortir de la taille, et qui le faisait grelotter davantage, Ă mesure qu'il se rapprochait du puits. Entre les muraillements Ă©troits, la colonne d'air soufflait de nouveau en tempĂÂȘte. Ils dĂ©sespĂ©raient d'arriver jamais, lorsque, brusquement, ils se trouvĂšrent dans la salle de l'accrochage. Chaval leur jeta un regard oblique, la bouche froncĂ©e de mĂ©fiance. Les autres Ă©taient lĂ , en sueur, dans le courant glacĂ©, muets comme lui, ravalant des grondements de colĂšre. Ils arrivaient trop tĂÂŽt, on refusait de les remonter avant une demi-heure, d'autant plus qu'on faisait des manoeuvres compliquĂ©es, pour la descente d'un cheval. Les chargeurs emballaient encore des berlines, avec un bruit assourdissant de ferrailles remuĂ©es, et les cages s'envolaient, disparaissaient dans la pluie battante qui tombait du trou noir. En bas, le bougnou, un puisard de dix mĂštres, empli de ce ruissellement, exhalait lui aussi son humiditĂ© vaseuse. Des hommes tournaient sans cesse autour du puits, tiraient les cordes des signaux, pesaient sur les bras des leviers, au milieu de cette poussiĂšre d'eau dont leurs vĂÂȘtements se trempaient. La clartĂ© rougeĂÂątre des trois lampes Ă feu libre, dĂ©coupant de grandes ombres mouvantes, donnait Ă cette salle souterraine un air de caverne scĂ©lĂ©rate, quelque forge de bandits, voisine d'un torrent. Maheu tenta un dernier effort. Il s'approcha de Pierron, qui avait pris son service Ă six heures. - Voyons, tu peux bien nous laisser monter. Mais le chargeur, un beau garçon, aux membres forts et au visage doux, refusa d'un geste effrayĂ©. - Impossible, demande au porion... On me mettrait Ă l'amende. De nouveaux grondements furent Ă©touffĂ©s. Catherine se pencha, dit Ă l'oreille d'Etienne - Viens donc voir l'Ă©curie. C'est lĂ qu'il fait bon! Et ils durent s'Ă©chapper sans ĂÂȘtre vus, car il Ă©tait dĂ©fendu d'y aller. Elle se trouvait Ă gauche, au bout d'une courte galerie. Longue de vingt-cinq mĂštres, haute de quatre, taillĂ©e dans le roc et voĂ»tĂ©e en briques, elle pouvait contenir vingt chevaux. Il y faisait bon en effet, une bonne chaleur de bĂÂȘtes vivantes, une bonne odeur de litiĂšre fraĂche, tenue proprement. L'unique lampe avait une lueur calme de veilleuse. Des chevaux au repos tournaient la tĂÂȘte, avec leurs gros yeux d'enfants, puis se remettaient Ă leur avoine, sans hĂÂąte, en travailleurs gras et bien portants, aimĂ©s de tout le monde. Mais, comme Catherine lisait Ă voix haute les noms, sur les plaques de zinc, au-dessus des mangeoires, elle eut un lĂ©ger cri, en voyant un corps se dresser brusquement devant elle. C'Ă©tait la Mouquette, effarĂ©e, qui sortait d'un tas de paille, oĂÂč elle dormait. Le lundi, lorsqu'elle Ă©tait trop lasse des farces du dimanche, elle se donnait un violent coup de poing sur le nez, quittait sa taille sous le prĂ©texte d'aller chercher de l'eau, et venait s'enfouir lĂ , avec les bĂÂȘtes, dans la litiĂšre chaude. Son pĂšre, d'une grande faiblesse pour elle, la tolĂ©rait, au risque d'avoir des ennuis. Justement, le pĂšre Mouque entra, court, chauve, ravagĂ©, mais restĂ© gros quand mĂÂȘme, ce qui Ă©tait rare chez un ancien mineur de cinquante ans. Depuis qu'on en avait fait un palefrenier, il chiquait Ă un tel point, que ses gencives saignaient dans sa bouche noire. En apercevant les deux autres avec sa fille, il se fĂÂącha. - Qu'est-ce que vous fichez lĂ , tous? Allons, houp! bougresses qui m'amenez un homme ici!... C'est propre de venir faire vos saletĂ©s dans ma paille. Mouquette trouvait ça drĂÂŽle, se tenait le ventre. Mais Etienne, gĂÂȘnĂ©, s'en alla, tandis que Catherine lui souriait. Comme tous trois retournaient Ă l'accrochage, BĂ©bert et Jeanlin y arrivaient aussi, avec un train de berlines. Il y eut un arrĂÂȘt pour la manoeuvre des cages, et la jeune fille s'approcha de leur cheval, le caressa de la main, en parlant de lui Ă son compagnon. C'Ă©tait Bataille, le doyen de la mine, un cheval blanc qui avait dix ans de fond. Depuis dix ans, il vivait dans ce trou, occupant le mĂÂȘme coin de l'Ă©curie, faisant la mĂÂȘme tĂÂąche le long des galeries noires, sans avoir jamais revu le jour. TrĂšs gras, le poil luisant, l'air bonhomme, il semblait y couler une existence de sage, Ă l'abri des malheurs de lĂ -haut. Du reste, dans les tĂ©nĂšbres, il Ă©tait devenu d'une grande malignitĂ©. La voie oĂÂč il travaillait avait fini par lui ĂÂȘtre si familiĂšre, qu'il poussait de la tĂÂȘte les portes d'aĂ©rage, et qu'il se baissait, afin de ne pas se cogner, aux endroits trop bas. Sans doute aussi il comptait ses tours, car lorsqu'il avait fait le nombre rĂ©glementaire de voyages, il refusait d'en recommencer un autre, on devait le reconduire Ă sa mangeoire. Maintenant, l'ĂÂąge venait, ses yeux de chat se voilaient parfois d'une mĂ©lancolie. Peut-ĂÂȘtre revoyait-il vaguement, au fond de ses rĂÂȘvasseries obscures, le moulin oĂÂč il Ă©tait nĂ©, prĂšs de Marchiennes, un moulin plantĂ© sur le bord de la Scarpe, entourĂ© de larges verdures, toujours Ă©ventĂ© par le vent. Quelque chose brĂ»lait en l'air, une lampe Ă©norme, dont le souvenir exact Ă©chappait Ă sa mĂ©moire de bĂÂȘte. Et il restait la tĂÂȘte basse, tremblant sur ses vieux pieds, faisant d'inutiles efforts pour se rappeler le soleil. Cependant, les manoeuvres continuaient dans le puits, le marteau des signaux avait tapĂ© quatre coups, on descendait le cheval; et c'Ă©tait toujours une Ă©motion, car il arrivait parfois que la bĂÂȘte, saisie d'une telle Ă©pouvante, dĂ©barquait morte. En haut, liĂ© dans un filet, il se dĂ©battait Ă©perdument; puis, dĂšs qu'il sentait le sol manquer sous lui, il restait comme pĂ©trifiĂ©, il disparaissait sans un frĂ©missement de la peau, l'oeil agrandi et fixe. Celui-ci Ă©tant trop gros pour passer entre les guides, on avait dĂ», en l'accrochant au-dessous de la cage, lui rabattre et lui attacher la tĂÂȘte sur le flanc. La descente dura prĂšs de trois minutes, on ralentissait la machine par prĂ©caution. Aussi, en bas, l'Ă©motion grandissait-elle. Quoi donc? Est-ce qu'on allait le laisser en route, pendu dans le noir? Enfin, il parut, avec son immobilitĂ© de pierre, son oeil fixe, dilatĂ© de terreur. C'Ă©tait un cheval bai, de trois ans Ă peine, nommĂ© Trompette. - Attention! criait le pĂšre Mouque, chargĂ© de le recevoir. Amenez-le, ne le dĂ©tachez pas encore. BientĂÂŽt, Trompette fut couchĂ© sur les dalles de fonte, comme une masse. Il ne bougeait toujours pas, il semblait dans le cauchemar de ce trou obscur, infini, de cette salle profonde, retentissante de vacarme. On commençait Ă le dĂ©lier, lorsque Bataille, dĂ©telĂ© depuis un instant, s'approcha, allongea le cou pour flairer ce compagnon, qui tombait ainsi de la terre. Les ouvriers Ă©largirent le cercle en plaisantant. Eh bien! quelle bonne odeur lui trouvait-il? Mais Bataille s'animait, sourd aux moqueries. Il lui trouvait sans doute la bonne odeur du grand air, l'odeur oubliĂ©e du soleil dans les herbes. Et il Ă©clata tout Ă coup d'un hennissement sonore, d'une musique d'allĂ©gresse, oĂÂč il semblait y avoir l'attendrissement d'un sanglot. C'Ă©tait la bienvenue, la joie de ces choses anciennes dont une bouffĂ©e lui arrivait, la mĂ©lancolie de ce prisonnier de plus qui ne remonterait que mort. - Ah! cet animal de Bataille! criaient les ouvriers Ă©gayĂ©s par ces farces de leur favori. Le voilĂ qui causĂ© avec le camarade. Trompette, dĂ©liĂ©, ne bougeait toujours pas. Il demeurait sur le flanc, comme s'il eĂ»t continuĂ© Ă sentir le filet l'Ă©treindre, garrottĂ© par la peur. Enfin, on le mit debout d'un coup de fouet, Ă©tourdi, les membres secouĂ©s d'un grand frisson. Et le pĂšre Mouque emmena les deux bĂÂȘtes qui fraternisaient. - Voyons, y sommes-nous, Ă prĂ©sent? demanda Maheu. Il fallait dĂ©barrasser les cages, et du reste dix minutes manquaient encore pour l'heure de la remonte. Peu Ă peu, les chantiers se vidaient, des mineurs revenaient de toutes les galeries. Il y avait dĂ©jĂ lĂ une cinquantaine d'hommes, mouillĂ©s et grelottants, sous les fluxions de poitrine qui soufflaient de partout. Pierron, malgrĂ© son visage doucereux, gifla sa fille Lydie, parce qu'elle avait quittĂ© la taille avant l'heure. Zacharie pinçait sournoisement la Mouquette, histoire de se rĂ©chauffer. Mais le mĂ©contentement grandissait, Chaval et Levaque racontaient la menace de l'ingĂ©nieur, la berline baissĂ©e de prix, le boisage payĂ© Ă part; et des exclamations accueillaient ce projet, une rĂ©bellion germait dans ce coin Ă©troit, Ă prĂšs de six cents mĂštres sous la terre. BientĂÂŽt, les voix ne se continrent plus, ces hommes souillĂ©s de charbon, glacĂ©s par l'attente, accusĂšrent la Compagnie de tuer au fond une moitiĂ© de ses ouvriers, et de faire crever l'autre moitiĂ© de faim. Etienne Ă©coutait, frĂ©missant. - DĂ©pĂÂȘchons! dĂ©pĂÂȘchons! rĂ©pĂ©tait aux chargeurs le porion Richomme. Il hĂÂątait la manoeuvre pour la remonte, ne voulant point sĂ©vir, faisant semblant de ne pas entendre. Cependant, les murmures devenaient tels, qu'il fut forcĂ© de s'en mĂÂȘler. DerriĂšre lui, on criait que ça ne durerait pas toujours et qu'un beau matin la boutique sauterait. - Toi qui es raisonnable, dit-il Ă Maheu, fais-les donc taire. Quand on n'est pas les plus forts, on doit ĂÂȘtre les plus sages. Mais Maheu, qui se calmait et finissait par s'inquiĂ©ter, n'eut point Ă intervenir. Soudain, les voix tombĂšrent NĂ©grel et Dansaert, revenant de leur inspection, dĂ©bouchaient d'une galerie, en sueur aussi tous les deux. L'habitude de la discipline fit ranger les hommes, tandis que l'ingĂ©nieur traversait le groupe, sans une parole. Il se mit dans une berline, le maĂtre-porion dans une autre; on tira cinq fois le signal, sonnant Ă la grosse viande, comme on disait pour les chefs; et la cage fila en l'air, au milieu d'un silence morne. I, VI Dans la cage qui le remontait, tassĂ© avec quatre autres, Etienne rĂ©solut de reprendre sa course affamĂ©e, le long des routes. Autant valait-il crever tout de suite que de redescendre au fond de cet enfer, pour n'y pas mĂÂȘme gagner son pain. Catherine, enfournĂ©e au-dessus de lui, n'Ă©tait plus lĂ , contre son flanc, d'une bonne chaleur engourdissante. Et il aimait mieux ne pas songer Ă des bĂÂȘtises, et s'Ă©loigner; car, avec son instruction plus large, il ne se sentait point la rĂ©signation de ce troupeau, il finirait par Ă©trangler quelque chef. Brusquement, il fut aveuglĂ©. La remonte venait d'ĂÂȘtre si rapide, qu'il restait ahuri du grand jour, les paupiĂšres battantes dans cette clartĂ© dont il s'Ă©tait dĂ©shabituĂ© dĂ©jĂ . Ce n'en fut pas moins un soulagement pour lui, de sentir la cage retomber sur les verrous. Un moulineur ouvrait la porte, le flot des ouvriers sautait des berlines. - Dis donc, Mouquet, murmura Zacharie Ă l'oreille du moulineur, filons-nous au Volcan, ce soir? Le Volcan Ă©tait un cafĂ©-concert de Montsou. Mouquet cligna l'oeil gauche, avec un rire silencieux qui lui fendait les mĂÂąchoires. Petit et gros comme son pĂšre, il avait le nez effrontĂ© d'un gaillard qui mangeait tout, sans nul souci du lendemain. Justement, la Mouquette sortait Ă son tour, et il lui allongea une claque formidable sur les reins, par tendresse fraternelle. Etienne reconnaissait Ă peine la haute nef de la recette, qu'il avait vue inquiĂ©tante, dans les lueurs louches des lanternes. Ce n'Ă©tait que nu et sale. Un jour terreux entrait par les fenĂÂȘtres poussiĂ©reuses. Seule, la machine luisait, lĂ -bas, avec ses cuivres; les cĂÂąbles d'acier, enduits de graisse, filaient comme des rubans trempĂ©s d'encre; et les molettes en haut, l'Ă©norme charpente qui les supportait, les cages, les berlines, tout ce mĂ©tal prodiguĂ© assombrissait la salle de leur gris dur de vieilles ferrailles. Sans relĂÂąche, le grondement des roues Ă©branlait les dalles de fonte; tandis que, de la houille ainsi promenĂ©e, montait une fine poudre de charbon, qui poudrait Ă noir le sol, les murs, jusqu'aux solives du beffroi. Mais Chaval, ayant donnĂ© un coup d'oeil au tableau des jetons, dans le petit bureau vitrĂ© du receveur, revint furieux. Il avait constatĂ© qu'on leur refusait deux berlines, l'une parce qu'elle ne contenait pas la quantitĂ© rĂ©glementaire, l'autre parce que la houille en Ă©tait malpropre. - La journĂ©e est complĂšte, cria-t-il. Encore vingt sous de moins!... Aussi est-ce qu'on devrait prendre des fainĂ©ants, qui se servent de leurs bras comme un cochon de sa queue! Et son regard oblique, dirigĂ© sur Etienne, complĂ©tait sa pensĂ©e. Celui-ci fut tentĂ© de rĂ©pondre Ă coups de poing. Puis, il se demanda Ă quoi bon, puisqu'il partait. Cela le dĂ©cidait absolument. - On ne peut pas bien faire le premier jour, dit Maheu pour mettre la paix. Demain, il fera mieux. Tous n'en restaient pas moins aigris, agitĂ©s d'un besoin de querelle. Comme ils passaient Ă la lampisterie rendre leurs lampes, Levaque s'empoigna avec le lampiste, qu'il accusait de mal nettoyer la sienne. Ils ne se dĂ©tendirent un peu que dans la baraque, oĂÂč le feu brĂ»lait toujours. MĂÂȘme on avait dĂ» trop le charger, car le poĂÂȘle Ă©tait rouge, la vaste piĂšce sans fenĂÂȘtre semblait en flammes, tellement les reflets du brasier saignaient sur les murs. Et ce furent des grognements de joie, tous les dos se rĂÂŽtissaient Ă distance, fumaient ainsi que des soupes. Quand les reins brĂ»laient, on se cuisait le ventre. La Mouquette, tranquillement, avait rabattu sa culotte pour sĂ©cher sa chemise. Des garçons blaguaient, on Ă©clata de rire, parce qu'elle leur montra tout Ă coup son derriĂšre, ce qui Ă©tait chez elle l'extrĂÂȘme expression du dĂ©dain. - Je m'en vais, dit Chaval qui avait serrĂ© ses outils dans sa caisse. Personne ne bougea. Seule, Mouquette se hĂÂąta, s'Ă©chappa derriĂšre lui, sous le prĂ©texte qu'ils rentraient l'un et l'autre Ă Montsou. Mais on continuait de plaisanter, on savait qu'il ne voulait plus d'elle. Catherine, cependant, prĂ©occupĂ©e, venait de parler bas Ă son pĂšre. Celui-ci s'Ă©tonna, puis il approuva d'un hochement de tĂÂȘte; et, appelant Etienne pour lui rendre son paquet - Ecoutez donc, murmura-t-il, si vous n'avez pas le sou, vous aurez le temps de crever avant la quinzaine... Voulez-vous que je tĂÂąche de vous trouver du crĂ©dit quelque part? Le jeune homme resta un instant embarrassĂ©. Justement, il allait rĂ©clamer ses trente sous et partir. Mais une honte le retint devant la jeune fille. Elle le regardait fixement, peut-ĂÂȘtre croirait-elle qu'il boudait le travail. - Vous savez, je ne vous promets rien, continua Maheu. Nous en serons quittes pour un refus. Alors, Etienne ne dit pas non. On refuserait. Du reste, ça ne l'engageait point, il pourrait toujours s'Ă©loigner, aprĂšs avoir mangĂ© un morceau. Puis, il fut mĂ©content de n'avoir pas dit non, en voyant la joie de Catherine, un joli rire, un regard d'amitiĂ©, heureuse de lui ĂÂȘtre venue en aide. A quoi bon tout cela? Quand ils eurent repris leurs sabots et fermĂ© leurs cases, les Maheu quittĂšrent la baraque, Ă la queue des camarades qui s'en allaient un Ă un, dĂšs qu'ils s'Ă©taient rĂ©chauffĂ©s. Etienne les suivit, Levaque et son gamin se mirent de la bande. Mais, comme ils traversaient le criblage, une scĂšne violente les arrĂÂȘta. C'Ă©tait dans un vaste hangar, aux poutres noires de poussiĂšre envolĂ©e, aux grandes persiennes d'oĂÂč soufflait un continuel courant d'air. Les berlines de houille arrivaient directement de la recette, Ă©taient versĂ©es ensuite par des culbuteurs sur les trĂ©mies, de longues glissiĂšres de tĂÂŽle; et, Ă droite et Ă gauche de ces derniĂšres, les cribleuses, montĂ©es sur des gradins, armĂ©es de la pelle et du rĂÂąteau, ramassaient les pierres, poussaient le charbon propre, qui tombait ensuite par des entonnoirs dans les wagons de la voie ferrĂ©e, Ă©tablie sous le hangar. PhilomĂšne Levaque se trouvait lĂ , mince et pĂÂąle, d'une figure moutonniĂšre de fille crachant le sang. La tĂÂȘte protĂ©gĂ©e d'un lambeau de laine bleue, les mains et les bras noirs jusqu'aux coudes, elle triait au-dessous d'une vieille sorciĂšre, la mĂšre de la Pierronne, la BrĂ»lĂ© ainsi qu'on la nommait, terrible avec ses yeux de chat-huant et sa bouche serrĂ©e comme la bourse d'un avare. Elles s'empoignaient toutes les deux, la jeune accusant la vieille de lui ratisser ses pierres, Ă ce point qu'elle n'en faisait pas un panier en dix minutes. On les payait au panier, c'Ă©taient des querelles sans cesse renaissantes. Les chignons volaient, les mains restaient marquĂ©es en noir sur les faces rouges. - Fous-lui donc un renfoncement! cria d'en haut Zacharie Ă sa maĂtresse. Toutes les cribleuses Ă©clatĂšrent. Mais la BrĂ»lĂ© se jeta hargneusement sur le jeune homme. - Dis donc, saletĂ©! tu ferais mieux de reconnaĂtre les deux gosses dont tu l'as emplie!... S'il est permis, une bringue de dix-huit ans, qui ne tient pas debout! Maheu dut empĂÂȘcher son fils de descendre, pour voir un peu, disait-il, la couleur de sa peau, Ă cette carcasse. Un surveillant accourait, les rĂÂąteaux se remirent Ă fouiller le charbon. On n'apercevait plus, du haut en bas des trĂ©mies, que les dos ronds des femmes, acharnĂ©es Ă se disputer les pierres. Dehors, le vent s'Ă©tait brusquement calmĂ©, un froid humide tombait du ciel gris. Les charbonniers gonflĂšrent les Ă©paules, croisĂšrent les bras et partirent, dĂ©bandĂ©s, avec un roulis des reins qui faisait saillir leurs gros os, sous la toile mince des vĂÂȘtements. Au grand jour, ils passaient comme une bande de nĂšgres culbutes dans de la vase. Quelques-uns n'avaient pas fini leur briquet; et ce reste de pain, rapportĂ© entre la chemise et la veste, les rendait bossus. - Tiens! voilĂ Bouteloup, dit Zacharie en ricanant. Levaque, sans s'arrĂÂȘter, Ă©changea deux phrases avec son logeur, gros garçon brun de trente-cinq ans, l'air placide et honnĂÂȘte. - Ca y est, la soupe, Louis? - Je crois. - Alors, la femme est gentille, aujourd'hui? - Oui, gentille, je crois. D'autres mineurs de la coupe Ă terre arrivaient, des bandes nouvelles qui, une Ă une, s'engouffraient dans la fosse. C'Ă©tait la descente de trois heures, encore des hommes que le puits mangeait, et dont les Ă©quipes allaient remplacer les marchandages des haveurs, au fond des voies. Jamais la mine ne chĂÂŽmait, il y avait nuit et jour des insectes humains fouissant la roche, Ă six cents mĂštres sous les champs de betteraves. Cependant, les gamins marchaient les premiers. Jeanlin confiait Ă BĂ©bert un plan compliquĂ©, pour avoir Ă crĂ©dit quatre sous de tabac; tandis que Lydie, respectueusement, venait Ă distance. Catherine suivait avec Zacharie et Etienne. Aucun ne parlait. Et ce fut seulement devant le cabaret de l'Avantage, que Maheu et Levaque les rejoignirent. - Nous y sommes, dit le premier Ă Etienne. Voulez-vous entrer? On se sĂ©para. Catherine Ă©tait restĂ©e un instant immobile, regardant une derniĂšre fois le jeune homme de ses grands yeux, d'une limpiditĂ© verdĂÂątre d'eau de source, et dont le visage noir creusait encore le cristal. Elle sourit, elle disparut avec les autres, sur le chemin montant qui conduisait au coron. Le cabaret se trouvait entre le village et la fosse, au croisement des deux routes. C'Ă©tait une maison de briques Ă deux Ă©tages, blanchie du haut en bas Ă la chaux, Ă©gayĂ©e autour des fenĂÂȘtres d'une large bordure bleu ciel. Sur une enseigne carrĂ©e, clouĂ©e au-dessus de la porte, on lisait en lettres jaunes A l'Avantage, dĂ©bit tenu par Rasseneur. DerriĂšre, s'allongeait un jeu de quilles, clos d'une haie vive. Et la Compagnie, qui avait tout fait pour acheter ce lopin, enclavĂ© dans ses vastes terres, Ă©tait dĂ©solĂ©e de ce cabaret, poussĂ© en plein champ, ouvert Ă la sortie mĂÂȘme du Voreux. - Entrez, rĂ©pĂ©ta Maheu Ă Etienne. La salle, petite, avait une nuditĂ© claire, avec ses murs blancs, ses trois tables et sa douzaine de chaises, son comptoir de sapin, grand comme un buffet de cuisine. Une dizaine de chopes au plus Ă©taient lĂ , trois bouteilles de liqueur, une carafe, une petite caisse de zinc Ă robinet d'Ă©tain, pour la biĂšre; et rien autre, pas une image, pas une tablette, pas un jeu. Dans la cheminĂ©e de fonte, vernie et luisante, brĂ»lait doucement une pĂÂątĂ©e de houille. Sur les dalles, une fine couche de sable blanc buvait l'humiditĂ© continuelle de ce pays trempĂ© d'eau. - Une chope, commanda Maheu Ă une grosse fille blonde, la fille d'une voisine qui parfois gardait la salle. Rasseneur est lĂ ? La fille tourna le robinet, en rĂ©pondant que le patron allait revenir. Lentement, d'un seul trait, le mineur vida la moitiĂ© de la chope, pour balayer les poussiĂšres qui lui obstruaient la gorge. Il n'offrit rien Ă son compagnon. Un seul consommateur, un autre mineur mouillĂ© et barbouillĂ©, Ă©tait assis devant une table et buvait sa biĂšre en silence, d'un air de profonde mĂ©ditation. Un troisiĂšme entra, fut servi sur un geste, paya et s'en alla, sans avoir dit un mot. Mais un gros homme de trente-huit ans, rasĂ©, la figure ronde, parut avec un sourire dĂ©bonnaire. C'Ă©tait Rasseneur, un ancien haveur que la Compagnie avait congĂ©diĂ© depuis trois ans, Ă la suite d'une grĂšve. TrĂšs bon ouvrier, il parlait bien, se mettait Ă la tĂÂȘte de toutes les rĂ©clamations, avait fini par ĂÂȘtre le chef des mĂ©contents. Sa femme tenait dĂ©jĂ un dĂ©bit, ainsi que beaucoup de femmes de mineurs; et, quand il fut jetĂ© sur le pavĂ©, il resta cabaretier lui-mĂÂȘme, trouva de l'argent, planta son cabaret en face du Voreux, comme une provocation Ă la Compagnie. Maintenant, sa maison prospĂ©rait, il devenait un centre, il s'enrichissait des colĂšres qu'il avait peu Ă peu soufflĂ©es au coeur de ses anciens camarades. - C'est ce garçon que j'ai embauchĂ© ce matin, expliqua Maheu tout de suite. As-tu une de tes deux chambres libre, et veux-tu lui faire crĂ©dit d'une quinzaine? La face large de Rasseneur exprima subitement une grande dĂ©fiance. Il examina d'un coup d'oeil Etienne et rĂ©pondit, sans se donner la peine de tĂ©moigner un regret - Mes deux chambres sont prises. Pas possible. Le jeune homme s'attendait Ă ce refus; et il en souffrit pourtant, il s'Ă©tonna du brusque ennui qu'il Ă©prouvait Ă s'Ă©loigner. N'importe, il s'en irait, quand il aurait ses trente sous. Le mineur qui buvait Ă une table Ă©tait parti. D'autres, un Ă un, entraient toujours se dĂ©crasser la gorge, puis se remettaient en marche du mĂÂȘme pas dĂ©hanchĂ©. C'Ă©tait un simple lavage, sans joie ni passion, le muet contentement d'un besoin. - Alors, il n'y a rien? demanda d'un ton particulier Rasseneur Ă Maheu, qui achevait sa biĂšre Ă petits coups. Celui-ci tourna la tĂÂȘte et vit qu'Etienne seul Ă©tait lĂ . - Il y a qu'on s'est chamaillĂ© encore... Oui, pour le boisage. Il conta l'affaire. La face du cabaretier avait rougi, une Ă©motion sanguine la gonflait, lui sortait en flammes de la peau et des yeux. Enfin, il Ă©clata. - Ah bien! s'ils s'avisent de baisser les prix, ils sont fichus. Etienne le gĂÂȘnait. Cependant, il continua, en lui lançant des regards obliques. Et il avait des rĂ©ticences, des sous-entendus, il parlait du directeur, M. Hennebeau, de sa femme, de son neveu le petit NĂ©grel, sans les nommer, rĂ©pĂ©tant que ça ne pouvait pas continuer ainsi, que ça devait casser un de ces quatre matins. La misĂšre Ă©tait trop grande, il cita les usines qui fermaient, les ouvriers qui s'en allaient. Depuis un mois, il donnait plus de six livres de pain par jour. On lui avait dit, la veille, que M. Deneulin, le propriĂ©taire d'une fosse voisine, ne savait comment tenir le coup. Du reste, il venait de recevoir une lettre de Lille, pleine de dĂ©tails inquiĂ©tants. - Tu sais, murmura-t-il, ça vient de cette personne que tu as vue ici un soir. Mais il fut interrompu. Sa femme entrait Ă son tour, une grande femme maigre et ardente, le nez long, les pommettes violacĂ©es. Elle Ă©tait en politique beaucoup plus radicale que son mari. - La lettre de Pluchart, dit-elle. Ah! s'il Ă©tait le maĂtre, celui-lĂ , ça ne tarderait pas Ă mieux aller! Etienne Ă©coutait depuis un instant, comprenait, se passionnait, Ă ces idĂ©es de misĂšre et de revanche. Ce nom, jetĂ© brusquement, le fit tressaillir. Il dit tout haut, comme malgrĂ© lui - Je le connais, Pluchart. On le regardait, il dut ajouter - Oui, je suis machineur, il a Ă©tĂ© mon contremaĂtre, Ă Lille... Un homme capable, j'ai causĂ© souvent avec lui. Rasseneur l'examinait de nouveau; et il y eut, sur son visage, un changement rapide, une sympathie soudaine. Enfin, il dit Ă sa femme - C'est Maheu qui m'amĂšne Monsieur, un herscheur Ă lui, pour voir s'il n'y a pas une chambre en haut, et si nous ne pourrions pas faire crĂ©dit d'une quinzaine. Alors, l'affaire fut conclue en quatre paroles. Il y avait une chambre, le locataire Ă©tait parti le matin. Et le cabaretier, trĂšs excitĂ©, se livra davantage, tout en rĂ©pĂ©tant qu'il demandait seulement le possible aux patrons, sans exiger, comme tant d'autres, des choses trop dures Ă obtenir. Sa femme haussait les Ă©paules, voulait son droit, absolument. - Bonsoir, interrompit Maheu. Tout ça n'empĂÂȘchera pas qu'on descende, et tant qu'on descendra, il y aura du monde qui en crĂšvera... Regarde, te voilĂ gaillard, depuis trois ans que tu en es sorti. - Oui, je me suis beaucoup refait, dĂ©clara Rasseneur complaisamment. Etienne alla jusqu'Ă la porte, remerciant le mineur qui partait; mais celui-ci hochait la tĂÂȘte, sans ajouter un mot, et le jeune homme le regarda monter pĂ©niblement le chemin du coron. Mme Rasseneur, en train de servir des clients, venait de le prier d'attendre une minute, pour qu'elle le conduisĂt Ă sa chambre, oĂÂč il se dĂ©barbouillerait. Devait-il rester? Une hĂ©sitation l'avait repris, un malaise qui lui faisait regretter la libertĂ© des grandes routes, la faim au soleil, soufferte avec la joie d'ĂÂȘtre son maĂtre. Il lui semblait qu'il avait vĂ©cu lĂ des annĂ©es, depuis son arrivĂ©e sur le terri, au milieu des bourrasques, jusqu'aux heures passĂ©es sous la terre, Ă plat ventre dans les galeries noires. Et il lui rĂ©pugnait de recommencer, c'Ă©tait injuste et trop dur, son orgueil d'homme se rĂ©voltait, Ă l'idĂ©e d'ĂÂȘtre une bĂÂȘte qu'on aveugle et qu'on Ă©crase. Pendant qu'Etienne se dĂ©battait ainsi, ses yeux, qui erraient sur la plaine immense, peu Ă peu l'aperçurent. Il s'Ă©tonna, il ne s'Ă©tait pas figurĂ© l'horizon de la sorte, lorsque le vieux Bonnemort le lui avait indiquĂ© du geste, au fond des tĂ©nĂšbres. Devant lui, il retrouvait bien le Voreux, dans un pli de terrain, avec ses bĂÂątiments de bois et de briques, le criblage goudronnĂ©, le beffroi couvert d'ardoises, la salle de la machine et la haute cheminĂ©e d'un rouge pĂÂąle, tout cela tassĂ©, l'air mauvais. Mais, autour des bĂÂątiments, le carreau s'Ă©tendait, et il ne se l'imaginait pas si large, changĂ© en un lac d'encre par les vagues montantes du stock de charbon, hĂ©rissĂ© des hauts chevalets qui portaient les rails des passerelles, encombrĂ© dans un coin de la provision des bois, pareille Ă la moisson d'une forĂÂȘt fauchĂ©e. Vers la droite, le terri barrait la vue, colossal comme une barricade de gĂ©ants, dĂ©jĂ couvert d'herbe dans sa partie ancienne, consumĂ© Ă l'autre bout par un feu intĂ©rieur qui brĂ»lait depuis un an, avec une fumĂ©e Ă©paisse, en laissant Ă la surface, au milieu du gris blafard des schistes et des grĂšs, de longues traĂnĂ©es de rouille sanglante. Puis, les champs se dĂ©roulaient, des champs sans fin de blĂ© et de betteraves, nus Ă cette Ă©poque de l'annĂ©e, des marais aux vĂ©gĂ©tations dures, coupĂ©s de quelques saules rabougris, des prairies lointaines, que sĂ©paraient des files maigres de peupliers. TrĂšs loin, de petites taches blanches indiquaient des villes, Marchiennes au nord, Montsou au midi; tandis que la forĂÂȘt de Vandame, Ă l'est, bordait l'horizon de la ligne violĂÂątre de ses arbres dĂ©pouillĂ©s. Et, sous le ciel livide, dans le jour bas de cet aprĂšs-midi d'hiver, il semblait que tout le noir du Voreux, toute la poussiĂšre volante de la houille se fĂ»t abattue sur la plaine, poudrant les arbres, sablant les routes, ensemençant la terre. Etienne regardait, et ce qui le surprenait surtout, c'Ă©tait un canal, la riviĂšre de la Scarpe canalisĂ©e, qu'il n'avait pas vu dans la nuit. Du Voreux Ă Marchiennes, ce canal allait droit, un ruban d'argent mat de deux lieues, une avenue bordĂ©e de grands arbres, Ă©levĂ©e au-dessus des bas terrains, filant Ă l'infini avec la perspective de ses berges vertes, de son eau pĂÂąle oĂÂč glissait l'arriĂšre vermillonnĂ© des pĂ©niches. PrĂšs de la fosse, il y avait un embarcadĂšre, des bateaux amarrĂ©s, que les berlines des passerelles emplissaient directement. Ensuite, le canal faisait un coude, coupait de biais les marais; et toute l'ĂÂąme de cette plaine rase paraissait ĂÂȘtre lĂ , dans cette eau gĂ©omĂ©trique qui la traversait comme une grande route, charriant la houille et le fer. Les regards d'Etienne remontaient du canal au coron, bĂÂąti sur le plateau, et dont il distinguait seulement les tuiles rouges. Puis, ils revenaient vers le Voreux, s'arrĂÂȘtaient, en bas de la pente argileuse, Ă deux Ă©normes tas de briques, fabriquĂ©es et cuites sur place. Un embranchement du chemin de fer de la Compagnie passait derriĂšre une palissade, desservant la fosse. On devait descendre les derniers mineurs de la coupe Ă terre. Seul, un wagon que poussaient des hommes jetait un cri aigu. Ce n'Ă©tait plus l'inconnu des tĂ©nĂšbres, les tonnerres inexplicables, les flamboiements d'astres ignorĂ©s. Au loin, les hauts fourneaux et les fours Ă coke avaient pĂÂąli avec l'aube. Il ne restait lĂ , sans un arrĂÂȘt, que l'Ă©chappement de la pompe, soufflant toujours de la mĂÂȘme haleine grosse et longue, l'haleine d'un ogre dont il distinguait la buĂ©e grise maintenant, et que rien ne pouvait repaĂtre. Alors, Etienne, brusquement, se dĂ©cida. Peut-ĂÂȘtre avait-il cru revoir les yeux clairs de Catherine, lĂ -haut, Ă l'entrĂ©e du coron. Peut-ĂÂȘtre Ă©tait-ce plutĂÂŽt un vent de rĂ©volte, qui venait du Voreux. Il ne savait pas, il voulait redescendre dans la mine pour souffrir et se battre, il songeait violemment Ă ces gens dont parlait Bonnemort, Ă ce dieu repu et accroupi, auquel dix mille affamĂ©s donnaient leur chair, sans le connaĂtre. DEUXIEME PARTIE II, I La propriĂ©tĂ© des GrĂ©goire, la Piolaine, se trouvait Ă deux kilomĂštres de Montsou, vers l'est, sur la route de Joiselle. C'Ă©tait une grande maison carrĂ©e, sans style, bĂÂątie au commencement du siĂšcle dernier. Des vastes terres qui en dĂ©pendaient d'abord, il ne restait qu'une trentaine d'hectares, clos de murs, d'un facile entretien. On citait surtout le verger et le potager, cĂ©lĂšbres par leurs fruits et leurs lĂ©gumes, les plus beaux du pays. D'ailleurs, le parc manquait, un petit bois en tenait lieu. L'avenue de vieux tilleuls, une voĂ»te de feuillage de trois cents mĂštres, plantĂ©e de la grille au perron, Ă©tait une des curiositĂ©s de cette plaine rase, oĂÂč l'on comptait les grands arbres, de Marchiennes Ă Beaugnies. Ce matin-lĂ , les GrĂ©goire s'Ă©taient levĂ©s Ă huit heures. D'habitude, ils ne bougeaient guĂšre qu'une heure plus tard, dormant beaucoup, avec passion; mais la tempĂÂȘte de la nuit les avait Ă©nervĂ©s. Et, pendant que son mari Ă©tait allĂ© voir tout de suite si le vent n'avait pas fait de dĂ©gĂÂąts, Mme GrĂ©goire venait de descendre Ă la cuisine, en pantoufles et en peignoir de flanelle. Courte, grasse, ĂÂągĂ©e dĂ©jĂ de cinquante-huit ans, elle gardait une grosse figure poupine et Ă©tonnĂ©e, sous la blancheur Ă©clatante de ses cheveux. - MĂ©lanie, dit-elle Ă la cuisiniĂšre, si vous faisiez la brioche ce matin, puisque la pĂÂąte est prĂÂȘte. Mademoiselle ne se lĂšvera pas avant une demi-heure, et elle en mangerait avec son chocolat... Hein! ce serait une surprise. La cuisiniĂšre, vieille femme maigre qui les servait depuis trente ans, se mit Ă rire. - Ca, c'est vrai, la surprise serait fameuse... Mon fourneau est allumĂ©, le four doit ĂÂȘtre chaud; et puis, Honorine va m'aider un peu. Honorine, une fille d'une vingtaine d'annĂ©es, recueillie enfant et Ă©levĂ©e Ă la maison, servait maintenant de femme de chambre. Pour tout personnel, outre ces deux femmes, il n'y avait que le cocher, Francis, chargĂ© des gros ouvrages. Un jardinier et une jardiniĂšre s'occupaient des lĂ©gumes, des fruits, des fleurs et de la basse-cour. Et, comme le service Ă©tait patriarcal, d'une douceur familiĂšre, ce petit monde vivait en bonne amitiĂ©. Mme GrĂ©goire, qui avait mĂ©ditĂ© dans son lit la surprise de la brioche, resta pour voir mettre la pĂÂąte au four. La cuisine Ă©tait immense, et on la devinait la piĂšce importante, Ă sa propretĂ© extrĂÂȘme, Ă l'arsenal des casseroles, des ustensiles, des pots qui l'emplissaient. Cela sentait bon la bonne nourriture. Des provisions dĂ©bordaient des rĂÂąteliers et des armoires. - Et qu'elle soit bien dorĂ©e, n'est-ce pas? recommanda Mme GrĂ©goire en passant dans la salle Ă manger. MalgrĂ© le calorifĂšre qui chauffait toute la maison, un feu de houille Ă©gayait cette salle. Du reste, il n'y avait aucun luxe la grande table, les chaises, un buffet d'acajou; et, seuls, deux fauteuils profonds trahissaient l'amour du bien-ĂÂȘtre, les longues digestions heureuses. On n'allait jamais au salon, on demeurait lĂ , en famille. Justement, M. GrĂ©goire rentrait, vĂÂȘtu d'un gros veston de futaine, rose lui aussi pour ses soixante ans, avec de grands traits honnĂÂȘtes et bons, dans la neige de ses cheveux bouclĂ©s. Il avait vu le cocher et le jardinier aucun dĂ©gĂÂąt important, rien qu'un tuyau de cheminĂ©e abattu. Chaque matin, il aimait Ă donner un coup d'oeil Ă la Piolaine, qui n'Ă©tait pas assez grande pour lui causer des soucis, et dont il tirait tous les bonheurs du propriĂ©taire. - Et CĂ©cile? demanda-t-il, elle ne se lĂšve donc pas, aujourd'hui? - Je n'y comprends rien, rĂ©pondit sa femme. Il me semblait l'avoir entendue remuer. Le couvert Ă©tait mis, trois bols sur la nappe blanche. On envoya Honorine voir ce que devenait Mademoiselle. Mais elle redescendit aussitĂÂŽt, retenant des rires, Ă©touffant sa voix, comme si elle eĂ»t parlĂ© en haut, dans la chambre. - Oh! si monsieur et madame voyaient mademoiselle!... Elle dort, oh! elle dort, ainsi qu'un JĂ©sus... On n'a pas idĂ©e de ça, c'est un plaisir Ă la regarder. Le pĂšre et la mĂšre Ă©changeaient des regards attendris. Il dit en souriant - Viens-tu voir? - Cette pauvre mignonne! murmura-t-elle. J'y vais. Et ils montĂšrent ensemble. La chambre Ă©tait la seule luxueuse de la maison, tendue de soie bleue, garnie de meubles laquĂ©s, blancs Ă filets bleus, un caprice d'enfant gĂÂątĂ©e satisfait par les parents. Dans les blancheurs vagues du lit, sous le demi-jour qui tombait de l'Ă©cartement d'un rideau, la jeune fille dormait, une joue appuyĂ©e sur son bras nu. Elle n'Ă©tait pas jolie, trop saine, trop bien portante, mĂ»re Ă dix-huit ans; mais elle avait une chair superbe, une fraĂcheur de lait, avec ses cheveux chĂÂątains, sa face ronde au petit nez volontaire, noyĂ© entre les joues. La couverture avait glissĂ©, et elle respirait si doucement, que son haleine ne soulevait mĂÂȘme pas sa gorge dĂ©jĂ lourde. - Ce maudit vent l'aura empĂÂȘchĂ©e de fermer les yeux, dit la mĂšre doucement. Le pĂšre, d'un geste, lui imposa silence. Tous les deux se penchaient, regardaient avec adoration, dans sa nuditĂ© de vierge, cette fille si longtemps dĂ©sirĂ©e, qu'ils avaient eue sur le tard, lorsqu'ils ne l'espĂ©raient plus. Ils la voyaient parfaite, point trop grasse, jamais assez bien nourrie. Et elle dormait toujours, sans les sentir prĂšs d'elle, leur visage contre le sien. Pourtant, une onde lĂ©gĂšre troubla sa face immobile. Ils tremblĂšrent qu'elle ne s'Ă©veillĂÂąt, ils s'en allĂšrent sur la pointe des pieds. - Chut! dit M. GrĂ©goire Ă la porte. Si elle n'a pas dormi, il faut la laisser dormir. - Tant qu'elle voudra, la mignonne, appuya Mme GrĂ©goire. Nous attendrons. Ils descendirent, s'installĂšrent dans les fauteuils de la salle Ă manger; tandis que les bonnes, riant du gros sommeil de Mademoiselle, tenaient sans grogner le chocolat sur le fourneau. Lui, avait pris un journal; elle, tricotait un grand couvre-pieds de laine. Il faisait trĂšs chaud, pas un bruit ne venait de la maison muette. La fortune des GrĂ©goire, quarante mille francs de rentes environ, Ă©tait tout entiĂšre dans une action des mines de Montsou. Ils en racontaient avec complaisance l'origine, qui partait de la crĂ©ation mĂÂȘme de la Compagnie. Vers le commencement du dernier siĂšcle, un coup de folie s'Ă©tait dĂ©clarĂ©, de Lille Ă Valenciennes, pour la recherche de la houille. Les succĂšs des concessionnaires qui devaient plus tard former la Compagnie d'Anzin, avaient exaltĂ© toutes les tĂÂȘtes. Dans chaque commune, on sondait le sol; et les sociĂ©tĂ©s se crĂ©aient, et les concessions poussaient en une nuit. Mais, parmi les entĂÂȘtĂ©s de l'Ă©poque, le baron Desrumaux avait certainement laissĂ© la mĂ©moire de l'intelligence la plus hĂ©roĂÂŻque. Pendant quarante annĂ©es, il s'Ă©tait dĂ©battu sans faiblir, au milieu de continuels obstacles premiĂšres recherches infructueuses, fosses nouvelles abandonnĂ©es au bout de longs mois de travail, Ă©boulements qui comblaient les trous, inondations subites qui noyaient les ouvriers, centaines de mille francs jetĂ©s dans la terre; puis, les tracas de l'administration, les paniques des actionnaires, la lutte avec les seigneurs terriens, rĂ©solus Ă ne pas reconnaĂtre les concessions royales, si l'on refusait de traiter d'abord avec eux. Il venait enfin de fonder la sociĂ©tĂ© Desrumaux, Fauquenoix et Cie, pour exploiter la concession de Montsou, et les fosses commençaient Ă donner de faibles bĂ©nĂ©fices, lorsque deux concessions voisines, celle de Cougny, appartenant au comte de Cougny, et celle de Joiselle, appartenant Ă la sociĂ©tĂ© Cornille et Jenard, avaient failli l'Ă©craser sous le terrible assaut de leur concurrence. Heureusement, le 25 aoĂ»t 1760, un traitĂ© intervenait entre les trois concessions et les rĂ©unissait en une seule. La Compagnie des mines de Montsou Ă©tait créée, telle qu'elle existe encore aujourd'hui. Pour la rĂ©partition, on avait divisĂ©, d'aprĂšs l'Ă©talon de la monnaie du temps, la propriĂ©tĂ© totale en vingt-quatre sous, dont chacun se subdivisait en douze deniers, ce qui faisait deux cent quatre-vingt-huit deniers; et, comme le denier Ă©tait de dix mille francs, le capital reprĂ©sentait une somme de prĂšs de trois millions. Desrumeaux, agonisant, mais vainqueur, avait eu, dans le partage, six sous et trois deniers. En ces annĂ©es-lĂ le baron possĂ©dait la Piolaine, d'oĂÂč dĂ©pendaient trois cents hectares, et il avait Ă son service, comme rĂ©gisseur, HonorĂ© GrĂ©goire, un garçon de la Picardie, l'arriĂšre-grand-pĂšre de LĂ©on GrĂ©goire, pĂšre de CĂ©cile. Lors du traitĂ© de Montsou, HonorĂ©, qui cachait dans un bas une cinquantaine de mille francs d'Ă©conomies, cĂ©da en tremblant Ă la foi inĂ©branlable de son maĂtre. Il sortit dix mille livres de beaux Ă©cus, il prit un denier, avec la terreur de voler ses enfants de cette somme. Son fils EugĂšne toucha en effet des dividendes fort minces; et, comme il s'Ă©tait mis bourgeois et qu'il avait eu la sottise de manger les quarante autres mille francs de l'hĂ©ritage paternel dans une association dĂ©sastreuse, il vĂ©cut assez chichement. Mais les intĂ©rĂÂȘts du denier montaient peu Ă peu, la fortune commença avec FĂ©licien, qui put rĂ©aliser un rĂÂȘve dont son grand-pĂšre, l'ancien rĂ©gisseur, avait bercĂ© son enfance l'achat de la Piolaine dĂ©membrĂ©e, qu'il eut comme bien national, pour une somme dĂ©risoire. Cependant, les annĂ©es qui suivirent furent mauvaises, il fallut attendre le dĂ©nouement des catastrophes rĂ©volutionnaires, puis la chute sanglante de NapolĂ©on. Et ce fut LĂ©on GrĂ©goire qui bĂ©nĂ©ficia, dans une progression stupĂ©fiante, du placement timide et inquiet de son bisaĂÂŻeul. Ces dix pauvres mille francs grossissaient, s'Ă©largissaient, avec la prospĂ©ritĂ© de la Compagnie. DĂšs 1820, ils rapportaient cent pour cent, dix mille francs. En 1844, ils en produisaient vingt mille; en 1850, quarante. Il y avait deux ans enfin, le dividende Ă©tait montĂ© au chiffre prodigieux de cinquante mille francs la valeur du denier, cotĂ© Ă la Bourse de Lille un million, avait centuplĂ© en un siĂšcle. M. GrĂ©goire, auquel on conseillait de vendre, lorsque ce cours d'un million fut atteint, s'y Ă©tait refusĂ©, de son air souriant et paterne. Six mois plus tard, une crise industrielle Ă©clatait, le denier retombait Ă six cent mille francs. Mais il souriait toujours, il ne regrettait rien, car les GrĂ©goire avaient maintenant une foi obstinĂ©e en leur mine. Ca remonterait, Dieu n'Ă©tait pas si solide. Puis, Ă cette croyance religieuse, se mĂÂȘlait une profonde gratitude pour une valeur, qui, depuis un siĂšcle, nourrissait la famille Ă ne rien faire. C'Ă©tait comme une divinitĂ© Ă eux, que leur Ă©goĂÂŻsme entourait d'un culte, la bienfaitrice du foyer, les berçant dans leur grand lit de paresse, les engraissant Ă leur table gourmande. De pĂšre en fils, cela durait pourquoi risquer de mĂ©contenter le sort, en doutant de lui? Et il y avait, au fond de leur fidĂ©litĂ©, une terreur superstitieuse, la crainte que le million du denier ne se fĂ»t brusquement fondu, s'ils l'avaient rĂ©alisĂ© et mis dans un tiroir. Ils le voyaient plus Ă l'abri dans la terre, d'oĂÂč un peuple de mineurs, des gĂ©nĂ©rations d'affamĂ©s l'extrayaient pour eux, un peu chaque jour, selon leurs besoins. Du reste, les bonheurs pleuvaient sur cette maison. M. GrĂ©goire, trĂšs jeune, avait Ă©pousĂ© la fille d'un pharmacien de Marchiennes, une demoiselle laide, sans un sou, qu'il adorait et qui lui avait tout rendu, en fĂ©licitĂ©. Elle s'Ă©tait enfermĂ©e dans son mĂ©nage, extasiĂ©e devant son mari, n'ayant d'autre volontĂ© que la sienne; jamais des goĂ»ts diffĂ©rents ne les sĂ©paraient, un mĂÂȘme idĂ©al de bien-ĂÂȘtre confondait leurs dĂ©sirs; et ils vivaient ainsi depuis quarante ans, de tendresse et de petits soins rĂ©ciproques. C'Ă©tait une existence rĂ©glĂ©e, les quarante mille francs mangĂ©s sans bruit, les Ă©conomies dĂ©pensĂ©es pour CĂ©cile, dont la naissance tardive avait un instant bouleversĂ© le budget. Aujourd'hui encore, ils contentaient chacun de ses caprices un second cheval, deux autres voitures, des toilettes venues de Paris. Mais ils goĂ»taient lĂ une joie de plus, ils ne trouvaient rien de trop beau pour leur fille, avec une telle horreur personnelle de l'Ă©talage, qu'ils avaient gardĂ© les modes de leur jeunesse. Toute dĂ©pense qui ne profitait pas leur semblait stupide. Brusquement, la porte s'ouvrit, et une voix forte cria - Eh bien! quoi donc, on dĂ©jeune sans moi! C'Ă©tait CĂ©cile, au saut du lit, les yeux gonflĂ©s de sommeil. Elle avait simplement relevĂ© ses cheveux et passĂ© un peignoir de laine blanche. - Mais non, dit la mĂšre, tu vois qu'on t'attendait... Hein? ce vent a dĂ» t'empĂÂȘcher de dormir, pauvre mignonne!! La jeune fille la regarda, trĂšs surprise. - Il a fait du vent?... Je n'en sais rien, je n'ai pas bougĂ© de la nuit. Alors, cela leur sembla drĂÂŽle, tous les trois se mirent Ă rire; et les bonnes, qui apportaient le dĂ©jeuner, Ă©clatĂšrent aussi, tellement l'idĂ©e que Mademoiselle avait dormi d'un trait ses douze heures, Ă©gayait la maison. La vue de la brioche acheva d'Ă©panouir les visages. - Comment! elle est donc cuite? rĂ©pĂ©tait CĂ©cile. En voilĂ une attrape qu'on me fait!... C'est ça qui va ĂÂȘtre bon, tout chaud, dans le chocolat! Ils s'attablaient enfin, le chocolat fumait dans les bols, on ne parla longtemps que de la brioche. MĂ©lanie et Honorine restaient, donnaient les dĂ©tails sur la cuisson, les regardaient se bourrer, les lĂšvres grasses, en disant que c'Ă©tait un plaisir de faire un gĂÂąteau, quand on voyait les maĂtres le manger si volontiers. Mais les chiens aboyĂšrent violemment on crut qu'ils annonçaient la maĂtresse de piano, qui venait de Marchiennes le lundi et le vendredi. Il venait aussi un professeur de littĂ©rature. Toute l'instruction de la jeune fille s'Ă©tait ainsi faite Ă la Piolaine, dans une ignorance heureuse, dans des caprices d'enfant, jetant le livre par la fenĂÂȘtre, dĂšs qu'une question l'ennuyait. - C'est M. Deneulin, dit Honorine en rentrant. DerriĂšre elle, Deneulin, un cousin de M. GrĂ©goire, parut sans façon, le verbe haut, le geste vif, avec une allure d'ancien officier de cavalerie. Bien qu'il eĂ»t dĂ©passĂ© la cinquantaine, ses cheveux coupĂ©s ras et ses grosses moustaches Ă©taient d'un noir d'encre. - Oui, c'est moi, bonjour... Ne vous dĂ©rangez donc pas! Il s'Ă©tait assis, pendant que la famille s'exclamait. Elle finit par se remettre Ă son chocolat. - Est-ce que tu as quelque chose Ă me dire? demanda M. GrĂ©goire. - Non, rien du tout, se hĂÂąta de rĂ©pondre Deneulin. Je suis sorti
8perso - Topic Dans une Ă©chelle de douleur de 1 Ă 10, la Rage de dent vous la placez oĂč ? du 01-05-2020 21:37:23 sur les forums de Retour Jeux
Cet article approfondit lâanalyse du concept de fonction de mesurage continue, introduite dans lâarticle 5a, qui utilise lâexemple dâune Ă©chelle analogique de douleur. Il sâagit de prĂ©ciser lâincertitude thĂ©orique qui sâattache Ă lâinterprĂ©tation des mesures lues sur lâĂ©chelle de mesure et dâen tirer les consĂ©quences du point de vue psychologique. 1. Comparaison inter-individuelle ConsidĂ©rons tout dâabord le graphique ci-dessous qui reprĂ©sente la fonction de mesurage de Paul et la fonction de mesurage de Julie pour zoomer sur lâimage, cliquer dessus ; on se place dans la situation oĂč ces fonctions seraient connues. Tous deux, lors dâune mesure, indiquent sur lâĂ©chelle une valeur dâenviron 7 cm. Qui des deux a le plus de douleur ? Sauf quand leur douleur est nulle ou maximale, lorsque Paul et Julie indiquent lâintensitĂ© de leur douleur par une mĂȘme mesure, la douleur de Julie est plus grande que la douleur de Paul ce qui, en termes courants, signifie que Julie est plus rĂ©sistante Ă la douleur que Paul. Ainsi, si on admet que les fonctions de mesurage sont propres aux personnes et que ces fonctions ne sont pas identifiĂ©es, on ne peut pas utiliser les mesures pour comparer les quantitĂ©s mesurĂ©es chez les diffĂ©rentes personnes chacun est son propre instrument de mesure et on ignore comment passer dâun instrument Ă un autre. 2. Comparaison intra-individuelle Concentrons-nous Ă prĂ©sent sur le mesurage de la douleur de Paul par sa fonction reprĂ©sentĂ©e ci-dessous et envisageons quatre Ă©tats de sa douleur, q1 Fq4 â Fq3. En dâautres termes, la fonction de mesurage ne conserve pas lâunitĂ© de changement de la douleur, ou encore, la mesure nâest pas mĂ©trique mais seulement ordinale. Calculer une diffĂ©rence entre plusieurs mesures pour quantifier le changement de la douleur, câest-Ă -dire connaĂźtre la quantitĂ© de changement de douleur, est une chose vaine cf. Bachelard, 1938/1983. Les hauteurs lues sur lâĂ©chelle de douleur indiquent seulement le sens positif ou nĂ©gatif du changement de la douleur. DâoĂč la question suivante que faut-il pour que la diffĂ©rence entre deux mesures ait une signification quantitative, câest-Ă -dire quâon puisse rĂ©fĂ©rer Ă une unitĂ© de douleur ? En dâautres termes, que faut-il pour que le taux dâaccroissement dy/dq soit une constante positive ? Il faut et il suffit que la fonction de mesurage soit une fonction affine, câest-Ă -dire du type Fq = aq + b, avec a > 0. En effet, quels que soient q1 et q2 distincts, [Fq2 â Fq1]/q2 â q1 = a Fq2 â Fq1 = aq2 â aq1 pour tout q Fq = aq + b. Les mesures obtenues par une fonction de mesurage affine conservent les intervalles de quantitĂ©s de la grandeur mesurĂ©e, câest pourquoi on les appelle des mesures dâintervalle cf. 40a. Enfin, les mesures sont-elles additives ? Autrement dit, quels que soient q1 et q2, a-t-on Fq1 + Fq2 = Fq1 + q2 ? Si F est linĂ©aire, ie., Fq = aq, ce qui correspond Ă ce quâon appelle une Ă©chelle de ratio, F est additive pour tous q1 et q2, Fq1 + q2 = aq1 + q2 = aq1 + aq2 = Fq1 + Fq2. Par exemple, les mesures de tempĂ©rature effectuĂ©es Ă lâaide dâun thermomĂštre en degrĂ©s Celsius ne sont pas additives parce que b, dans lâĂ©quation de la fonction affine de mesurage, nâest pas nul quand on lit 0°, la tempĂ©rature nâest pas nulle. Si F est additive et continue, elle est linĂ©aire preuve que mâa expliquĂ©e Julien Labetaa. 3. ConsĂ©quences Si, lorsquâon demande Ă quelquâun dâindiquer lâintensitĂ© de sa douleur en utilisant une Ă©chelle de douleur, on veut interprĂ©ter ses rĂ©ponses comme des mesures, il faut admettre que toute rĂ©ponse dĂ©pend de la quantitĂ© de douleur instantanĂ©e via une fonction de mesurage, dont on ignore la nature. Si on veut considĂ©rer que la mesure effectuĂ©e est quantitative, il faut admettre que cette fonction est affine Ă©chelle dâintervalle ou linĂ©aire Ă©chelle de ratio. Toutes ces suppositions sont invraisemblables si on admet que la personne rĂ©pond non pas machinalement mais selon ce quâelle veut, quand bien mĂȘme sa volontĂ© nous demeure inaccessible. Au lieu de fonder son interprĂ©tation de la rĂ©ponse sur des arguments psychomĂ©triques ou mĂ©trologiques dont la plausibilitĂ© est douteuse, le psychologue peut plutĂŽt considĂ©rer cette rĂ©ponse comme un acte de langage, qui implique lâintentionnalitĂ© des interlocuteurs plongĂ©s dans un champ de significations possibles. Si, par exemple, la personne Ă©nonce â7 cmâ hier et â6 cmâ aujourdâhui, il est possible quâelle dise âjâai un peu moins mal aujourdâhui quâhierâ dans le langage du clinicien qui la fait sâexprimer par dĂ©placements du curseur de lâĂ©chelle. La sagesse philosophique de Bachelard 1938/1983 peut ĂȘtre utile au psychologue Mesurer exactement un objet fuyant ou indĂ©terminĂ©, mesurer exactement un objet fixe et bien dĂ©terminĂ© avec un instrument grossier, voilĂ deux types dâoccupations vaines que rejette de prime abord la discipline scientifique. p. 213 RĂ©fĂ©rence Bachelard, G. 1983. La formation de lâesprit scientifique. Paris Vrin. PremiĂšre Ă©dition en 1938
Depuissa crĂ©ation en 2004, la Fondation APICIL a accompagnĂ© plus de 800 projets sur lâensemble du territoire français : projets de recherche, projets pilotes, formations, information et sensibilisation. La Fondation APICIL a choisi de soutenir les associations et les professionnels actifs et audacieux, qui Ćuvrent au plus prĂšs desSite Fiable Pour Acheter Norvasc. Livraison dans le monde entier 1-3 Jours. Meilleur prix et de haute qualitĂ© Site Fiable Pour Acheter Norvasc Camping 5de luxe en Espagne en bord de mer au sud de Barcelone, Ă 30km de Tarragone. There may also be times when youâll want to use suggĂ©rer in the French site Fiable Pour Acheter Norvasc. Article trĂšs Ă©difiant, je vous laisse en prendre connaissance ww. 541 754-3010 Prendre rendez-vous » Avant de consulter cette clinique, jai fait 3 mois de physiothĂ©rapie et javais une douleur sites Fiable Pour Acheter Norvasc mon arche gauche qui mempĂȘchait de marcher plus de 5 minutes. 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Copyright 2019 Onmeda â Un site du groupe aufeminin En poursuivant votre navigation sur notre site, vous acceptez lâutilisation de cookies Ă des fins statistiques, ou pour vous proposer des contenus et publicitĂ©s adaptĂ©s Ă vos centres dâintĂ©rĂȘts, anonymement ou dans le respect de votre vie privĂ©e. Voici quelques idĂ©es de recette site Fiable Pour Acheter Norvasc vous aider Ă choisir. Le grain de poivre noir est. Comme quoi il y a du fil Ă retordre pour ceux qui veulent semer la zizanie entre les arabes et les peuples qui se sont arabisĂ©s. 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Until recently, Karen utilized her nursing education and management skills as the Manager of the Prostate & Uro-Oncology Clinical Trial Unit led by Dr. Neil Fleshner. During this period, she was actively involved in the oversight of research team members and their clinical trial patients in addition to grant-writing and participation on multiple clinical research committees. She currently supports the physician assistant and/or nurse-led ADT Injection Clinic for Toronto Urology Associates, acts as a senior consultant for the Uro-oncology Clinical Research team at The Princess Margaret and sits on ad hoc Nurse Consultancy Boards for pharmaceutical companies involved in delivering and developing prostate cancer therapies. Karen has co-authored over 35 peer-reviewed publications and has been an invited presenter numerous times, focusing primarily on quality of life issues experienced by men undergoing prostate cancer therapy. Karen is an avid reader, a music and cat lover and mother of three grown daughters.Elleparticipe Ă la construction, dans notre cerveau, de cartes des diffĂ©rentes parties de notre corps au travers de leurs mouvements. Lâensemble de ces cartes, constituant une image mentale de notre corps, est appelĂ© schĂ©ma corporel. Comprendre la proprioception, câest donc comprendre son rĂŽle dans lâĂ©laboration de ces cartes Ce goniomĂštre plastique Ă 360° comporteune Ă©chelle d'Ă©valuation de la suffit de dĂ©placer le curseur sur l'undes 5 niveaux de la douleur par votre 20 x l. 4,5 x ep 0,7 cm
LesmĂ©decins sont, eux aussi, invitĂ©s Ă la prĂ©caution, en recommandant la plus petite dose efficace, le moins de temps possible. En cas de douleurs, lâutilisation du paracĂ©tamol est recommandĂ©e en prioritĂ© pour lâautomĂ©dication mais aussi sur prescription (3). Les AINS, eux, sont Ă rĂ©server aux douleurs qui ne cĂšdent pas Ă cet
AffinerImagesPhotosIllustrationsVectorielsVidĂ©osToutEssentialsDes images de tous les joursSignatureContenu exclusifAfficher les vidĂ©os de Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurParcourez 91 illustrations et vectoriels libres de droits disponibles de Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleur ou lancez une nouvelle recherche pour dĂ©couvrir plus dâimages et vectoriels dâ cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de douleur Ă©chelle de notes tableau - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurDouleur Ă©chelle de notes tableauillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de carte dâĂ©chelle de douleur horizontal - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurCarte dâĂ©chelle de douleur horizontalillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de graphique d'effort ou illustration d'Ă©chelle de douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurGraphique d'effort ou illustration d'Ă©chelle de douleurillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de conception dâillustration vectorielle Ă lâĂ©chelle de la douleur comparative. ache mĂštre - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurConception dâillustration vectorielle Ă lâĂ©chelle de la douleur...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de tableau des visages-douleur Ă©chelle. - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurTableau des visages-douleur cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle de douleur ou tableau de compteur de mal dans les icĂŽnes de visage plat vecteur isolĂ© sur le blanc. - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle de douleur ou tableau de compteur de mal dans les icĂŽnes...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle horizontale de mesure de la douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle horizontale de mesure de la douleurillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de diffĂ©rentes mĂ©thodes dâĂ©pilation. rasoir, crĂšme dĂ©pilatoire, Ă©plilateur, cire et laser. types dâĂ©pilation avec des actions de chronologie [converti] - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurDiffĂ©rentes mĂ©thodes dâĂ©pilation. 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Outil mĂ©dical d'Ă©valuatiillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle de mesure de la douleur ou outil d'Ă©valuation de la douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle de mesure de la douleur ou outil d'Ă©valuation de la...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de illustration vectorielle de lâĂ©chelle de mesure de la douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurIllustration vectorielle de lâĂ©chelle de mesure de la douleurillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©lĂ©ments dâinterface utilisateur de lâĂ©chelle de la douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂlĂ©ments dâinterface utilisateur de lâĂ©chelle de la douleurillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de fait face Ă lâoutil dâĂ©valuation de la douleur. - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurFait face Ă lâoutil dâĂ©valuation de la cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de graphiques de mesure de la douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurGraphiques de mesure de la douleurillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de graphique d'Ă©chelle de douleur avec l'illustration de vecteur de visages d'Ă©moticĂŽne - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurGraphique d'Ă©chelle de douleur avec l'illustration de vecteur de...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle de douleur. jauge horizontale mesure indicateur de niveau dâĂ©valuation de la douleur avec smiley faces notation outil graphique de vecteur de manomĂštre - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle de douleur. 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Retour dâinformation sous forme dâĂ©motions. illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de le diagramme de lâĂ©chelle de la douleur mesure la douleur dâun patient - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurle diagramme de lâĂ©chelle de la douleur mesure la douleur dâun...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle de douleur horizontale plate de vecteur. couleur du vert aux symboles rouges de douleur de cercle avec le nombre isolĂ© sur le blanc. cinq gradation forment aucune douleur Ă l'Ă©lĂ©ment indicible de conception d'interface ui pour l'essai mĂ©dical - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle de douleur horizontale plate de vecteur. Couleur du vert...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de compteur dâĂ©chelle de douleur. mesure de sourire et dâĂ©motion triste, aucune douleur et lâensemble de la pire Ă©chellede de douleur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurCompteur dâĂ©chelle de douleur. 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Outil mĂ©dical d'Ă©valuatiillustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle de douleur. compteur de cotation douloureuse, indicateur de niveau de la douleur avec des icĂŽnes de pĂ©diatrie visage Ă©motion - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle de douleur. Compteur de cotation douloureuse, indicateur...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©valuation de l'Ă©chelle de douleur Ă©chelle horizontale mesure de mesure indicateur de l'effort de l'indicateur - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂvaluation de l'Ă©chelle de douleur Ă©chelle horizontale mesure de...illustrations, cliparts, dessins animĂ©s et icĂŽnes de Ă©chelle horizontale de mesure de la douleur. icĂŽnes emoji avec couleur de remplissage pour lâoutil dâĂ©valuation. - Ă©chelle d'Ă©valuation de la douleurĂchelle horizontale de mesure de la douleur. 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LEVA de la douleur est une mesure unidimensionnelle de l'intensitĂ© de la douleur, qui a Ă©tĂ© largement utilisĂ©e dans diverses populations adultes. Ăchelle de douleur analogue (EVA). Lundi au vendredi - 08h30 Ă 16h30 (HNE) auteur Disabled World Contact Date de Publication originale 2016-05-20 Mise Ă jour â Date rĂ©visĂ©e 2020-03-12 Synopsis et points clĂ©s diagramme de LâĂ©chelle de la douleur et tableau qui comprend une explication de chacun des niveaux de douleur classĂ©s dâun Ă dix.i lâune des choses les plus difficiles Ă propos de la douleur chronique est que vous seul savez Ă quel point votre douleur est grave., Notre Ă©chelle de douleur diagramme et tableau comprend une explication de chacun des niveaux de douleur qui peuvent vous aider Ă mieux expliquer aux autres la douleur que vous ressentez. la Douleur est mĂ©diĂ©e par des fibres nerveuses qui transportent les impulsions de douleur au cerveau⊠rĂ©sumĂ© principal La douleur est dĂ©finie comme une sensation dĂ©clenchĂ©e dans le systĂšme nerveux. La douleur peut ĂȘtre vive ou terne. Il peut aller et venir, ou il peut ĂȘtre constant. la douleur est mĂ©diĂ©e par des fibres nerveuses spĂ©cifiques qui transportent les impulsions de douleur au cerveau oĂč leur apprĂ©ciation consciente peut ĂȘtre modifiĂ©e par de nombreux facteurs., la Douleur peut ĂȘtre utile pour diagnostiquer un problĂšme. Sans douleur, vous pourriez vous blesser sĂ©rieusement sans le savoir, ou vous pourriez ne pas rĂ©aliser que vous avez un problĂšme mĂ©dical qui nĂ©cessite un traitement. Une fois que vous prenez soin du problĂšme, la douleur disparaĂźt gĂ©nĂ©ralement. Cependant, parfois, la douleur dure des semaines, des mois ou mĂȘme des annĂ©es. Ceci est appelĂ© la douleur chronique. Parfois, la douleur chronique est due Ă une cause continue, comme le cancer ou lâarthrite., les types de douleur comprennent douleur psychogĂšne Ă©galement appelĂ©e psychalgie ou douleur somatoforme, est une douleur physique causĂ©e, augmentĂ©e ou prolongĂ©e par des facteurs mentaux, Ă©motionnels ou comportementaux. Maux de tĂȘte, maux de dos ou maux dâestomac sont quelques-uns des types les plus courants de douleur psychogĂšne. Douleur fantĂŽme la sensation de douleur dâun membre ou dâun organe qui a Ă©tĂ© perdu ou dont une personne ne reçoit plus de signaux physiques. La douleur du membre fantĂŽme est une expĂ©rience presque universellement rapportĂ©e par les amputĂ©s et les tĂ©traplĂ©giques. La douleur fantĂŽme est une douleur neuropathique., douleur aiguĂ« La douleur qui survient rapidement peut ĂȘtre sĂ©vĂšre, mais dure relativement peu de temps. Contrairement Ă la douleur chronique. La douleur aiguĂ« sert dâavertissement de maladie ou de menace pour le corps. douleur chronique dĂ©finie comme une douleur qui persiste plus longtemps que le cours temporel de la guĂ©rison naturelle, associĂ©e Ă un type particulier de processus de blessure ou de maladie., La douleur chronique nuit Ă la capacitĂ© de diriger lâattention, en particulier par rapport aux pairs avec une faible intensitĂ© ou pas de douleur chronique, les personnes souffrant de douleur chronique de haute intensitĂ© ont considĂ©rablement rĂ©duit la capacitĂ© dâeffectuer des tĂąches exigeantes en attention. lâune des choses les plus difficiles Ă propos de la douleur chronique est que vous seul savez Ă quel point la douleur est mauvaise. Il nây a pas de tests qui rĂ©vĂšlent combien vous souffrez. Il nây a souvent aucun signe extĂ©rieur montrant Ă quel point une personne souffre., Une Ă©chelle de douleur mesure lâintensitĂ© de la douleur dâune personne et est basĂ©e sur des donnĂ©es dâauto-Ă©valuation, dâobservation comportementale ou physiologiques. Diverses Ă©chelles de douleur sont disponibles pour les nouveau-nĂ©s, les nourrissons, les enfants, les adolescents, les adultes, les personnes ĂągĂ©es et les personnes dont la communication est altĂ©rĂ©e. Les Ă©valuations de la douleur sont souvent considĂ©rĂ©es comme » le 5Ăšme signe Vital., » Le dĂ©pistage universel de la douleur est une pratique de plus en plus courante, en grande partie en raison de lâexigence de la Commission mixte sur LâaccrĂ©ditation des organismes de santĂ© JCAHO selon laquelle les hĂŽpitaux et les cliniques accrĂ©ditĂ©s doivent Ă©valuer systĂ©matiquement tous les patients pour la douleur. Le dĂ©pistage de la douleur vise Ă amĂ©liorer la qualitĂ© de la prise en charge de la douleur en identifiant systĂ©matiquement les patients souffrant de douleur en milieu clinique. tableau de LâĂ©chelle de douleur le Personnel militaire et les anciens combattants peuvent ĂȘtre mieux adaptĂ©s Ă lâaide de LâĂ©chelle DâĂ©valuation de la douleur de la DĂ©fense et des Anciens Combattants DVPRS 2.,0-un outil dâĂ©valuation de la douleur utilisant une Ă©chelle de notation, des descripteurs de mots, un code couleur, des expressions faciales imagĂ©es qui correspondent aux niveaux de douleur. le tableau de base de lâĂ©chelle de douleur ci-dessous fournit quelques exemples des diffĂ©rents niveaux qui dĂ©finissent lâĂ©chelle de douleur de 0 Ă 10. Ă©chelle de douleur Comparative de 0 Ă 10 tableau DâĂ©valuation de lâĂ©chelle de douleur imprimable qui peut ĂȘtre imprimĂ© et utilisĂ© pour que les gens et les enfants puissent indiquer le niveau de douleur actuel quâils ressentent., Pas de Douleur Pas de douleur icĂŽneNiveau de Douleur 0 Pas de douleur, vous vous sentez parfaitement normal. Mineure Niveaux de Douleur une LĂ©gĂšre douleur icĂŽne Mineure niveaux de douleur en gĂ©nĂ©ral, ne pas interfĂ©rer avec la plupart des activitĂ©s de jour en jour. Capable de sâadapter Ă la douleur psychologiquement et avec des mĂ©dicaments ou des dispositifs tels que des coussins., niveau de douleur 1 le niveau de douleur un signifie une douleur trĂšs lĂ©gĂšre Ă peine perceptible, comme une piqĂ»re de moustique ou une dĂ©mangeaison dâherbe Ă puce. La plupart du temps, vous ne pensez jamais Ă la douleur. niveau de douleur 2 le niveau de douleur deux est une douleur mineure inconfortable, comme pincer lĂ©gĂšrement le pli de la peau entre le pouce et le premier doigt avec lâautre main, en utilisant les ongles. Les gens peuvent rĂ©agir diffĂ©remment Ă cet autotest., niveau de douleur 3 le niveau de douleur trois est une douleur tolĂ©rable, mais trĂšs perceptible, comme une coupure accidentelle, un coup au nez provoquant un nez ensanglantĂ© ou un mĂ©decin qui vous fait une injection. La douleur nâest pas si forte que vous ne pouvez pas vous y habituer. Finalement, la plupart du temps, vous ne remarquez pas la douleur, que vous sont adaptĂ©s. la Douleur ModĂ©rĂ©e Niveaux la douleur ModĂ©rĂ©e icĂŽne la douleur ModĂ©rĂ©e niveaux dâinterfĂ©rer avec les activitĂ©s quotidiennes., Ces niveaux de douleur nĂ©cessitent gĂ©nĂ©ralement des changements de style de vie, mais vous pouvez rester indĂ©pendant, cependant, vous ĂȘtes incapable de vous adapter Ă la douleur. niveau de douleur 4 le niveau de douleur quatre est une douleur forte et profonde pĂ©nible, comme un mal de dents Moyen, la douleur initiale dâune piqĂ»re dâabeille, ou un traumatisme mineur Ă une partie du corps, comme le fait de se coincer lâorteil trĂšs fort. Si fort que vous remarquez la douleur tout le temps et ne pouvez pas vous adapter complĂštement., Ce niveau de douleur peut ĂȘtre simulĂ© en pinçant le pli de la peau entre le pouce et le premier doigt avec lâautre main, en utilisant les ongles et en serrant trĂšs fort. Notez comment la douleur simulĂ©e est initialement perçante mais devient terne aprĂšs cela. niveau de douleur 5 le niveau de douleur cinq est une douleur forte, profonde et perçante trĂšs pĂ©nible, telle quâune entorse Ă la cheville lorsque vous vous tenez mal ou une lĂ©gĂšre douleur au dos. Non seulement vous remarquez la douleur tout le temps, vous ĂȘtes maintenant si prĂ©occupĂ© par sa gestion que votre mode de vie normal est rĂ©duit., Les troubles temporaires de la personnalitĂ© sont frĂ©quents. la Douleur au Niveau 6 la Douleur au niveau de six est une douleur intense qui est fort, profond et perçant. La douleur est si forte quâelle semble dominer partiellement vos sens, vous obligeant Ă penser un peu mal. Ă ce stade, vous commencez Ă avoir du mal Ă occuper un emploi ou Ă maintenir des relations sociales normales., Comparable Ă un mal de tĂȘte non migraineux combinĂ© Ă plusieurs piqĂ»res dâabeilles, ou Ă un mal de dos niveaux de douleur sĂ©vĂšres icĂŽne de douleur sĂ©vĂšre niveaux de douleur sĂ©vĂšres, ce qui signifie que vous ĂȘtes incapable de Le patient est considĂ©rĂ© comme handicapĂ© et incapable de fonctionner indĂ©pendamment. Niveau de la Douleur 7 niveau de Douleur sept se compose de trĂšs intense douleur., Ă peu prĂšs la mĂȘme chose que le niveau 6, sauf que la douleur domine complĂštement vos sens, vous obligeant Ă penser de maniĂšre non claire environ la moitiĂ© du temps. Ă ce stade, vous ĂȘtes effectivement handicapĂ© et ne pouvez souvent pas vivre seul. Comparable Ă une migraine moyenne. une douleur TrĂšs sĂ©vĂšre icĂŽneNiveau de la Douleur 8 niveau de Douleur huit est horrible douleur. La douleur que vous ressentez est si intense que vous ne pouvez plus penser clairement et que vous avez souvent subi un changement de personnalitĂ© sĂ©vĂšre si la douleur est prĂ©sente depuis longtemps., Le Suicide est souvent envisagĂ© et parfois essayĂ©. Comparable Ă lâaccouchement ou Ă un vrai mal de migraine. niveau de douleur 9 le niveau de douleur neuf est une douleur atroce, si intense que vous ne pouvez pas la tolĂ©rer et exiger des analgĂ©siques ou une intervention chirurgicale, quels que soient les effets secondaires ou les risques. Si cela ne fonctionne pas, le suicide est frĂ©quent car il nây a plus de joie dans la vie. Comparable au cancer de la gorge. une douleur Terrible icĂŽneNiveau de la Douleur 10 niveau de la Douleur de dix moyens inimaginables de la douleur., Ce niveau de douleur est si intense que vous allez perdre connaissance sous peu. La plupart des gens nâont jamais connu ce niveau de douleur. Ceux qui ont subi un accident grave, comme une main Ă©crasĂ©e, et ont perdu conscience Ă la suite de la douleur et non de la perte de sang, ont connu le niveau 10. pour Mesurer la Douleur la tolĂ©rance Ă la Douleur est considĂ©rĂ© comme le niveau maximal de la douleur dâune personne est en mesure de tolĂ©rer sans sâĂ©vanouir. La tolĂ©rance Ă la douleur est diffĂ©rente du seuil de douleur » qui est le point oĂč la douleur commence Ă ĂȘtre ressentie., Le Seuil de douleur seuil de douleur est le point le long dâune courbe de perception croissante dâun stimulus auquel la douleur commence Ă ĂȘtre ressentie. Les mesures du seuil de douleur comprennent la pression Ă laquelle le son devient douloureux pour un auditeur est appelĂ©e pression du seuil de douleur ». La tempĂ©rature Ă laquelle la chaleur devient douloureuse pour une personne est connue sous le nom de seuil de douleur thermique ». Quâest-ce Quâun DolorimĂštre? La DolorimĂ©trie a Ă©tĂ© dĂ©finie comme la mesure de la sensibilitĂ© Ă la douleur ou de lâintensitĂ© de la douleur »., Un dolorimĂštre est un instrument utilisĂ© pour mesurer le seuil de douleur et la tolĂ©rance Ă la douleur. Les dolorimĂštres appliquent une pression constante, de la chaleur ou une stimulation Ă©lectrique Ă une zone. Parfois, la pression appliquĂ©e utilise un objet contondant, ou en augmentant la pression de lâair sur une zone du corps,et parfois en appuyant un instrument tranchant contre le corps afin de dĂ©placer une jointure, t ou une autre partie du corps, pour dĂ©terminer le niveau de chaleur, de pression, de courant Ă©lectrique ou la quantitĂ© de mouvement produit une sensation de douleur. Plusieurs types de dolorimĂštre diffĂ©rents ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s., Un dolorimĂštre connu sous le nom de PalpomĂštre sonique a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© Ă lâUniversitĂ© de Victoria en Colombie-Britannique, au Canada. Le PalpomĂštre sonique utilise les ultrasons et la technologie informatique pour automatiser la technique de palpation afin de dĂ©terminer la sensibilitĂ© dâune zone du corps du patient. quelles sont les choses les plus douloureuses que vous puissiez vivre?,la Stimulation du cordon Al rĂ©duit la douleur chronique aspect Ă©motionnel Ohio State University Wexner Medical Center 2016/03/22 5 La cafĂ©ine peut aider Ă rĂ©duire les douleurs articulaires et autres Disabled World 2014/06/17 6 syndrome douloureux rĂ©gional complexe CRPS Ă©tude Insights UniversitĂ© de Bath 2017/07/10 7 douleur un Ă©vĂ©nement Progressif multicouche Max-Planck-Gesellschaft 2016/03/25 important âą disabled WORLD est strictement un site web de nouvelles et dâinformation fourni Ă titre dâinformation gĂ©nĂ©rale uniquement et ne constitue pas un avis mĂ©dical., Les documents prĂ©sentĂ©s ne sont en aucun cas destinĂ©s Ă remplacer les soins mĂ©dicaux professionnels dispensĂ©s par un praticien qualifiĂ©, et ils ne doivent pas non plus ĂȘtre interprĂ©tĂ©s comme tels. Toute offre ou publicitĂ© de tiers sur ne constitue pas une approbation par Disabled World. Veuillez nous signaler des informations obsolĂštes ou inexactes. la Page Citation Commander Version numĂ©rique. Tordre la douleur . AndrĂ© Bucher âUn roman fort, Ă©crit dâune plume incandescente qui raconte la vie de personnages en proie Ă de douloureuses aventures intĂ©rieures et qui affrontent leurs dĂ©mons en un huis clos fascinant.â Alain Bosmans, Le DauphinĂ© libĂ©rĂ©. Ce quâen pensent les libraires : âEntre ronds-points et montagne, accident, May 3, 2022 0 minutes Ă la diffĂ©rence de lâhypertension ou du diabĂšte, aucune You're reading a preview, sign up to read your free monthRelated InterestsPainMedical SpecialtiesClinical MedicineEpidemiologyMedicineMore from Top SantĂ© FranceTop SantĂ© France2 min readChemistry6 Soins Contre Les Coups De SoleilPourquoi le soleil brĂ»le-t-il mĂȘme sâil ne chauffe pas toujours fort ? 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